[26 juin 2016] Pardon Loyehann é Rianteg / Pardon de Locjean à Riantec

Amzer-lenn / Temps de lecture : 11 min
Disul ma za – er sul 26 a viz méhewen – é vo lidet pardon Loyehann é chapél sant Yehann er Badéour é parréz Rianteg.

De 10 eur é vo en overenn – é galleg get rah er hanenneù é brehoneg – ha goudé en overenn é vo er préhésion betak er fetan, en tan ha diskenn er glomm. Ha goudé é vo moiand évein ur banné. 

pardon de locjean à RiantecDimanche prochain aura lieu comme tous les ans le pardon de Locjean en la chapelle de saint Jean-Baptiste (paroisse de Riantec, route de Merlevenez)

La messe aura lieu à 10 heures, (messe en français avec tous les cantiques en breton) suivie de la procession à la fontaine, du feu de joie, de la descente de la colombe vers la fontaine (le Saint Esprit qui descend sur le baptême du Christ)

Le pardon de Locjean en Riantec était un des pardons les plus fréquentés du pays de Port-Louis.

Après une période de désaffection, il est modestement revenu à la vie par la détermination de quelques bénévoles du quartier qui ne voulaient pas le voir mourir. Il est vrai que le lieu est majestueux, la chapelle est blottie dans un vallon boisé à l’ombre de hêtres de tilleuls plus que centenaires.

Les cantiques bretons sont spécialement à l’honneur lors de ce pardon, ce qui fait une partie de son succès, et ils sont chantés avec beaucoup de bonheur et de conviction. Vous retrouverez ces cantiques d’ici peu sur KAN ILIZ, mais retrouvez-les déjà sur ce fichier PDF : Présentation Saint Jean

Le culte à Saint Jean-Baptiste est très ancien et populaire en Bretagne. En effet, nos vieux saints bretons ont trouvé un modèle d’acèse et de prédication dans la figure du précurseur du Christ. La dévotion envers le dernier des prophètes se développa davantage par l’intermédiaire des chevaliers saint Jean de Jérusalem (actuellement Ordre de Malte) qui s’implantèrent en Bretagne à partir du XIIème siècle, et de nombreuses chapelles et églises eurent dès lors pour titulaire Saint Jean-Baptiste, et de nombreuses églises reçurent une statue , un tableau ou un vitrail du saint. Son culte rayonne encore plus à partir du XVème siècle quand la paroisse de Plougasnou dans le Trégor reçut un morceau de phalange du saint. Saint Jean du doigt devint alors un grand lieu de pèlerinage et le haut-lieu de la dévotion à saint Jean –Baptiste en Bretagne.

Bref aperçu historique et architectural de la chapelle de Locjean de Riantec

– Ses origines

Le vocable breton de Lok Yehann (Prononcé Lo Yehann) vient du latin locus : lieu ; il fait remonter les origines de la chapelle à une période située entre le Xe et le XIIIe siècle, dates d’apparition des toponymes en Loc. Certains supposent une fondation d’origine hospitalière par les chevaliers de saint Jean de Jérusalem (actuellement ordre des chevaliers de Malte), ce qui n’est confirmé par aucune source écrite, mais qui est tout même tout à fait plausible.

Elle est pour la première fois mentionnée dans les archives de l’abbaye cistercienne N.D de la Joie d’Hennebont en 1323.

Il ne reste pour ainsi dire rien de l’ancienne chapelle qui fut reconstruite à la fin du XIXe siècle et achevée en 1884. On ignore quelle était sa taille et son aspect. D’après la tradition locale, la nouvelle chapelle a été construite un peu plus loin et l’on peut deviner l’emplacement de l’ancienne chapelle à quelques mètres de la nouvelle. Entre autres, quelques pierres du seuil ont été conservées. On peut encore déchiffrer les inscriptions dans la sacristie qui relatent la dédicace de la chapelle en 1884 par Mgr Trégaro, évêque de Sées en Normandie, originaire de Guer dans le diocèse de Vannes et ancien condisciple de séminaire du recteur de Riantec d’alors, l’abbé Collet.

La tradition locale affirme l’existence d’un double vocable de saint Jean Baptiste et de saint Jean l’Evangéliste avec un pardon pour chaque patron. Cette tradition est confirmée par la présence d’une statue de saint Jean l’évangéliste à gauche de l’autel.

Il y aurait donc eu auparavant deux  pardons : le principal à la saint Jean d’été le 24 juin et le second à la saint Jean d’hiver le 27 décembre. On remarquera la symétrie des dates, toutes deux proches des solstices d’été et d’hiver. On reconnaît dans la célébration de ces deux pardons une intention de symbolique cosmique.

À une date inconnue, le pardon d’hiver serait tombé en désuétude, aurait disparu, et saint Jean-Baptiste serait devenu le patron unique de la chapelle probablement pour des raisons de commodité et pour une plus grande fréquentation des pèlerins à la belle saison. En outre, la chapelle recevait aussi chaque année les  Rogations, rite de procession lors des trois jours précédant l’Ascension pour bénir les champs et les bêtes et demander à Dieu la croissance des produits de la terre.

– Sa localisation

La chapelle se situe dans un environnement boisé et vallonné, construite à flanc de coteau, blottie dans la petite vallée du ruisseau le Riant (appellation récente, les cartes anciennes le désignent comme “ruisseau de Kergamenan”). Ses alentours sont plantés de vieux tilleuls et hêtres dont l’âge remonte à la construction de la chapelle.

En contrebas de la chapelle, au pied du mur de soutènement, se dresse la fontaine dédiée à saint Jean-Baptiste. Elle date  du XVIème ou du XVIIème siècle, et est construite avec sobriété et élégance. À l’intérieur, se trouve un beau groupe sculpté d’une touchante naïveté représentant le Baptême du Christ par Jean-Baptiste.

– Son architecture

L’ensemble  est simple tout en étant harmonieux et imposant, présentant une symétrie sans faille. Le corps de la chapelle est composé d’un vaisseau unique rectangulaire à chevet plat. Sur la sacristie polygonale est inscrite dans une niche triangulaire la date de reconstruction de la chapelle (1884). Six contreforts de pierre épaulent les murs.  Deux portes en anse de panier s’ouvrent au nord et au sud. Les six fenêtres s’ouvrent en plein cintre.La chapelle est vaste et haute, construite en petit appareil de moellons recouverts d’un enduit blanchi à la chaux. Contrairement aux chapelles reconstruites à la fin du XIXe siècle qui emploient sans modération le style néo-flamboyant, on peut dénoter un certain conservatisme dans l’architecture de la chapelle : sa structure rappelle fortement les nombreuses chapelles vannetaises construites au XVIIIe siècle selon un style assez sobre et élégant, avec un clocheton au sommet du pignon occidental.

La sévérité du pignon ouest est tempérée par une imposte (légère avancée) La partie basse du portail s’ouvre en plein cintre et est surmontée d’un arc ogival.

La porte et la fenêtre de plein cintre de la sacristie sont des remplois du XVIIème ou du XVIIIème siècle provenant probablement de l’ancienne chapelle.

– Le décor extérieur

Il est très sobre mais comporte quelques éléments dignes d’intérêt :

Les quatre anges surmontant les contreforts des coins (il n’en reste plus que trois) datent probablement du XVIème siècle. Ils viennent certainement d’un ancien calvaire qui devait se trouver près de la chapelle.

La statue surmontant le portail ouest, contrairement aux apparences est celle de saint Jean Baptiste et non de saint Jean l’évangéliste comme pourrait le laisser penser le livre qu’il tient à la main. La barbe (l’évangéliste est toujours représenté imberbe) la forme du vêtement et surtout la présence de l’Agneau immolé ne laissent aucun doute possible.

Sur le pignon oriental, une statue de la Vierge provenant elle aussi du calvaire.

– Le mobilier intérieur

Il paraît lui aussi assez pauvre surtout au regard de la taille et de la hauteur de la chapelle. Les murs blanchis à la chaux ainsi que les fenêtres translucides offrent beaucoup de lumière même s’ils renforcent cette impression d’austérité.

Les vitraux d’origine, eux aussi, étaient très simples : verre transparent, motifs floraux et quelques verres de couleurs ; ils ont été détruits en grande partie pendant la guerre. En effet, la chapelle se trouvant au cœur du dispositif de défense allemand de la “Poche de Lorient” en 1944-1945, ses abords ont été largement bombardés sans qu’elle-même ne soit touchée. Le reste des vitraux a été victime du vandalisme, et seuls quelques fragments subsistent.

L’autel de bois peint date de la reconstruction de la chapelle. Il est peint en imitation de marbre blanc et s’inspire des modèles classiques du XVIIIème siècle. Sa structure en tronc de pyramide renversée et sa facture naïve ne manquent pas de charme, tout comme celle du dais à colonnettes corinthiennes qui le couronne et abrite la croix. Ce dais est l’œuvre du sculpteur local Jean-Marie le Frapper.

La voûte de lambris de bois nu en carène est très élégante dans sa simplicité.

La balustrade du chœur provenant aussi de l’ancienne chapelle, date du XVIIème siècle, tout comme les stalles simples du chœur. Les stalles cloisonnées, elles, datent du XVIIIème siècle et viennent de l’église paroissiale. Elles se trouvaient à l’origine dans le couvent franciscain qui s’élevait sur l’île de sainte Catherine en Locmiquélic (faisant partie de la paroisse de Riantec jusqu’au début du XXème siècle)

Dans la sacristie, se trouve un buffet datant lui aussi du XVIIIème siècle.

– Le décor intérieur

Dans le chœur, la statue de gauche adossée au mur du chevet est celle de saint Jean l’évangéliste. On reconnaît dans sa facture le style des sculpteurs de la Marine Royale spécialisés dans les figures de proue. Nombre d’entre eux exécutaient aussi des commandes pour les paroisses des alentours de Lorient. Elle date de la fin du XVIIème siècle ou du XVIIIème siècle.

Celle de droite représente saint Cornéli (le pape saint Corneille), protecteur du bétail (en particulier à corne, compte tenu de son nom). La statue date de la seconde moitié du XIXème siècle, oeuvre du sculpteur lorientais Le Brun ou d’un de ses élèves. Les deux consoles de pierre sont des remplois de l’ancienne chapelle.

Tout en haut s’ouvre dans une niche une touchante représentation de l’apparition mariale de Pontmain. Malheureusement, les petits personnages  du premier plan ont été aussi victimes du vandalisme. Chose curieuse, de chaque côté du chœur ont été représentées aussi les apparitions mariales de Lourdes et de la Salette.

Cette dernière a aussi été victime du vandalisme. Ces statues de plâtre, avec celle de sainte Thérèse de Lisieux si elles ne sont pas d’un grand intérêt artistique car fabriquées en série, sont représentatives d’une fervente piété populaire entre la fin du XIXème siècle et la première moitié du XXème siècle.

À l’emplacement du groupe de la Salette, se trouve la statue de saint Jean-Baptiste, datée  du XVIème siècle, provenant de l’ancienne chapelle. Elle ressemble beaucoup à la statue extérieure du portail occidental. Elle a malheureusement été repeinte de manière maladroite, de même que l’autre statue de saint Jean utilisée lors de la procession du pardon. Cette statue, montée sur brancards est plus récente et peut être datée de la reconstruction de la chapelle, dans la seconde moitié du XIXème siècle. Deux autres petites statues en bois de saint Pierre et saint Paul, probablement du XVIIIème siècle se trouvaient aussi dans la chapelle, sûrement en raison de la proximité de la date de leur fête (29 juin) avec celle de saint Jean Baptiste (24 juin). Elles se trouvent actuellement au presbytère.

– Le Pardon

Célébré le dernier dimanche de juin (souvent le plus proche de la fête de saint Jean-Baptiste) , le pardon reste très fréquenté. Au son des cantiques bretons, après la messe, la procession se rend à la fontaine. Cette procession est très réduite par rapport à jadis, où elle cheminait dans les bois alentours.

Le feu de joie est allumé. Ce symbole est de mise pour tous les pardons mais prend une signification toute particulière lors de la saint Jean, compte tenu de la symbolique cosmique qu’il revêt. Le solstice d’été, à partir duquel baisse la durée des jours symbolise saint Jean qui a dit de Jésus: “il faut que je diminue et que lui croisse”. (Jn 3, 30)

Néanmoins, même s’il reste bien vivant, le pardon n’est plus qu’un pâle reflet de la splendeur qu’il revêtait autrefois. L’historien, archiviste et ethnographe Henri-François Buffet spécialiste du pays vannetais et en particulier du pays de Port-Louis  témoigne vers les années 50 :

Témoignage

À propos du rédacteur Erwan Kermorvant

Erwan Kermorvant est père de famille. D'une plume acérée, il publie occasionnellement des articles sur Ar Gedour sur divers thèmes. Il assure aussi la veille rédactionnelle du blog et assure la mission de Community Manager du site.

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