Saints bretons à découvrir

BILLET D’HUMEUR : Et si les églises ouvraient leurs portes ?

Amzer-lenn / Temps de lecture : 5 min

Bon… Le titre (à la base j’avais prévu « L’Eglise ferme ses portes ») est certes un peu provocateur, mais un coup de gueule s’impose, parce qu’à force, ca commence à me taper sur le système : je viens de passer dans une petite paroisse bretonne.  Je décide de rentrer dans l’église ; pas de chance car elle fermée, en pleine journée. J’apprends que c’est toujours comme cela, ici. D’ailleurs, c’est pareil ailleurs.  Evidemment, vous en aurez sans doute aussi fait l’expérience, c’est loin d’être la seule à travers la Bretagne ! A force de sillonner les routes bretonnes, on s’en rend compte…

Alors bien sûr, les raisons se multiplient et justifient les portes closes : éviter les dégradations, les vols, ou encore « personne pour accueillir », etc… On trouve toujours mille raisons à un échec.

A l’heure où les équipes paroissiales sont légions, au moment où les animateurs locaux ne peuvent s’empêcher (avec certes la meilleure volonté du monde) d’être de toutes les célébrations, comment comprendre qu’il n’y ait personne pour ouvrir les églises de manière à ce que l’on puisse aller à la rencontre de Jésus Eucharistie  ? Ne parlons même pas de la possibilité d’aller se confesser en passant…

Une Eglise ouverte sur le monde, une Eglise ouvrant ses bras pour accueillir chaque enfant de Dieu ne doit-elle pas commencer par ouvrir en grand les portes des églises ?

ouvrir les eglises,evangelisationDans nos paroisses rurales qui se meurent, l’église est encore (parfois le seul) signe de vie, bâtisse où Dieu attend que ceux qui sont à sa recherche viennent lui rendre visite. Alors aujourd’hui, peut-on encore s’étonner que les églises se vident (et l’Eglise avec), tandis que personne n’a la possibilité d’y entrer et d’y entendre l’appel de Dieu , de s’y confier et de s’y attarder  ?

Chrétien ou promeneur que le Hasard a porté jusque ici, passe ton chemin… la porte t’est close. Un peu comme celle de l’auberge, laissant Joseph et Marie dehors ?

Certes, c »est bien joli d’ouvrir ces églises le dimanche (et encore, ça dépend des fois…) pour faire son office dominical auprès d’une assemblée déclinante comme on s’emploierait à une maintenance ecclésiale jusqu’au dernier cercueil ! Avant l’abandon…

C’est encore sympa d’ouvrir nos joyaux ecclésiaux pour les journées du Patrimoine, pour la Nuit des églises ou l’Art dans les chapelles ! Mais Jésus fait-il partie du seul patrimoine culturel pour le fixer ainsi en quasi-pièce archéologique de musée ?

Est-ce seulement là la vocation de ces bâtiments ? Accueillir les gens pour de l’événementiel religieux ou culturel, profitant d’une acoustique idéale et d’un panorama original ? L’évangélisation des Peuples ne doit-elle pas commencer là, en faisant en sorte de laisser venir à Dieu les petits enfants que nous sommes et la communauté que nous devons former ? Cela 7 jours / 7 ?

Je reprendrai ici ce qu’en a dit Jacques Lefebvre, qui résume parfaitement ce que je pense de tout cela :

 » Devant les vols, mais aussi le vandalisme, bris, salissures, la tentation est grande de fermer nos églises. Impensable sans doute pour les grandes églises urbaines (monuments historiques). Mais que dire des églises de campagne ? De fait, un certain nombre d’entre elles sont fermées. Mais regardons-y de près ! Y a-t-il des choses à voler ? À moins que les micros et la sono ne soient restés en place après la messe dominicale, au lieu de revenir sous clef à la sacristie. Les statues de plâtre ne sont généralement pas convoitées… Les objets proprement religieux ne semblent pas tellement recherchés : revendre un calice ou une croix de procession, en brocante, est plus risqué aujourd’hui qu’il y a quelques années.

S’il y a des objets précieux, qu’ils soient au moins connus, respectés, aimés par la communauté locale qui en est l’affectataire. On comprend que les listes départementales ne soient pas divulguées comme sources d’information générale, mais qu’au moins chaque curé, et à chaque nomination successive – les papiers s’envolent aussi ! -, sache de quel patrimoine il est responsable. Bien des dégradations, pertes ou ventes indues ont été tout simplement le fruit d’une ignorance.

Cela dit, ouvrons les églises, fermons les sacristies, sans que les clefs traînent au coin d’une nappe d’autel, secret de polichinelle vite repéré.

Fermer une église est un contresigne dans un village, un signe d’une démission, d’un abandon, signe d’une église morte, sans avenir.

Ouverte, une église est signe, si humble soit-il, mais signe tout de même de la foi d’une communauté. Fleurie, habitée, elle attirera le respect. Que quelques personnes y viennent y prier, tout peut renaître.

Est-ce une raison, parce qu’un tabernacle a été profané, il y a un dizaine d’années, pour qu’une église soit encore fermée aujourd’hui ? Les vols mentionnés s’échelonnent, souvent, sur des décennies et ne justifient pas une psychose : la proportion d’objets volés, sur la masse, est finalement très faible.

Ouvrons les églises. Se rejoignent ici et une proposition culturelle, et un atout pastoral évident, qui l’emporte sûrement sur les inconvénients signalés. »

Alors peut-on faire un pari en cette année de la Foi ? Que les prêtres se décident enfin à (faire) ouvrir TOUTES les églises et qu’elles redeviennent lieux d’évangélisation ouverts sur le monde, à commencer par l’attention au pauvre type du coin qui attend de pouvoir rendre visite à Jésus quand il en a envie, et non en prenant rendez-vous au secrétariat d’une bureaucratie ecclésiale qui a parfois oublié une certaine dimension pastorale.

On a envie de crier avec force d’une seule voix « Epphata » (Ouvre-toi)… Et peut-être que là, on verra les portes s’ouvrir…

 

Photo : Boreally.org  – Première publication de l’article le 23/05/2013

À propos du rédacteur Eflamm Caouissin

Marié et père de 5 enfants, Eflamm Caouissin est impliqué dans la vie du diocèse de Vannes au niveau de la Pastorale du breton. Tout en approfondissant son bagage théologique par plusieurs années d’études, il s’est mis au service de l’Eglise en devenant aumônier. Il est le fondateur du site et de l'association Ar Gedour et assure la fonction bénévole de directeur de publication. Il anime aussi le site Kan Iliz (promotion du cantique breton). Après avoir co-écrit dans le roman Havana Café, il a publié en 2022 son premier roman "CANNTAIREACHD".

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5 Commentaires

  1. Ouvrez les portes, Dieu est à tous ! …disait un graffiti

  2. VALERIE MAUGRION

    Je souscris à 100% ! pouvoir reprendre des forces dans une église , au déboté ,au tournant d’une ballade, équivaut parfois à trouver une oasis en plein désert…le désespoir transformé en lumière de vie dans une petite chapelle ,bretonne ou non n’est pas qu’un cliché…

  3. Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, sauf les maires qui ferment les églises et qui sont les méchants. Parce que dans les églises il n’y a rien à voler, en dehors de statues de plâtre sans valeur…

    Ben non. Tout autour de chez moi, dans toutes les églises, et dans la plupart des chapelles, il y a de belles et anciennes statues (au pluriel), qui disparaîtraient très vite si les portes étaient ouvertes.

    C’est évidemment regrettable, mais c’est ainsi. Oui, les portes des églises doivent être fermées, sauf s’il y a quelqu’un qui puisse effectivement surveiller.

  4. Mais les statues serviront-elles encore à quelque chose le jour où seules les chauve-souris fréquenteront les lieux ?

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