Ce dimanche 25 septembre 2016 avait lieu le pardon de Notre-Dame des Fleurs, en Plouay. Nous étions plusieurs de l’équipe d’Ar Gedour à nous rendre sur place. Car la renommée du pardon semble ne pas devoir se démentir. Il faut dire que cette année encore, le comité de quartier aura su mettre les petits plats dans les grands. Le président du comité des Fleurs, entouré d’une solide équipe de bénévoles, aura réussi une performance à la hauteur de l’événement. Mgr Centène, spécialement invité par la paroisse aura lui aussi particulièrement apprécié les efforts déployés pour la réussite de ce grand pardon de Notre-Dame de Délivrance à la chapelle des Fleurs : célébrations grandioses, et festivités magnifiquement bien préparées. La messe présidée par l’évêque de Vannes, et encadrée par pas moins de 6 prêtres (dont le nouveau doyen de Plouay le Père Vincent Daniel), 1 diacre (mexicain) 7 servants d’autel, et presque autant d’enfants de choeur aura marquée par sa dignité, et sa solennité. Bien des pardons pourraient y trouver des recettes pour les redynamiser.
Porté par une équipe dynamique, ce pardon a tout pour attirer des fidèles tout comme des gens plus loin de l’Eglise. Hier, il avait une dimension particulière. En effet, dans le cadre de leur week-end d’intégration, 90 jeunes de la Mission Etudiante Morbihan (dont leurs aumôniers) se sont rendus sur Plouay, menés par le Père Philippe Le Bigot. A l’instar du pardon de Kernascléden le 15 août, le pardon des Fleurs a aussi attiré beaucoup de jeunes familles, sensibles à une belle liturgie conforme à ce que demande Vatican II. Et ce 25 septembre, tout était fait dans le respect de cette liturgie, dans un enracinement profond.
Il faut reconnaître que l’ensemble de la chapelle se prête bien au déploiement liturgique, et que l’accompagnement musical assuré par la chorale des Kanerion er Skorv était proche de la perfection.
Environ 400 personnes, dont bien des gens en costumes bretons, s’étaient donc serrées dans la petite chapelle et à l’extérieur, sous un magnifique soleil. Le nombre de célébrants et de servants d’autel étant assez important, les déplacements dans le choeur paraissaient difficiles. Il a donc été choisi de retirer l’autel d’appoint et de célébrer la messe ad orientem au maître-autel, dont l’imposant retable en tuffeau devenait ainsi un superbe écrin pour Jésus Eucharistie, fleuri pour l’occasion.
L’office, chanté en breton, latin et français, était, nous le disions, soutenu par la chorale des Kanerion er Skorv dirigée par Paulette Carré (qui était aussi à l’orgue), animé par Mikael Messina (dont l’investissement dans les pardons du secteur de Plouay est à souligner) et Jean-Jacques Le Floch (de la commission diocésaine pour la pastorale en breton). D’après les témoignages d’anciens et de plus jeunes, cette édition a été particulièrement porteuse, de la messe à la mise à feu du tantad, en passant par la procession et la bénédiction à la fontaine.
« Ce pardon est magnifique ! «
« Ce pardon est magnifique ! « nous confie Pierre, un ancien. « Et c’est formidable, tous ces jeunes. On pensait que l’Eglise était en train de mourir, mais finalement, ce pardon nous montre que la relève est là » ajoute une autre personne à ses côtés.
Un jeune, très touché, nous livre : « Je ne comprends pas tout, mais pourtant, ca me parle. C’est comme si je redécouvrais la messe ! ». Un autre pardonneur du secteur enchaîne :
« J’ai connu des anciens qui auraient vraiment aimé vivre une telle cérémonie avant de mourir. C’était tellement beau. Moi aussi je ne pensais pas revivre un tel pardon ici un jour ! »
A la fin de la messe, Monseigneur Centène, a rappelé que « les pardons sont l’identité de la Bretagne et l’identité de l’Eglise en Bretagne ». Et c’est dans le cadre du pardon que 17 missionnaires provenant de 5 origines différentes (Bretagne, Côte d’Ivoire, Colombie, Mexique, Etats-Unis) ont été envoyés en mission par l’évêque après la procession aux multiples bannières, petits saints (amenés par le Père Galerne), bénédiction de l’eau à la fontaine et une remise de croix. Sur Ar Gedour, nous répétons régulièrement que les pardons sont un lieu fort d’évangélisation, et ce dimanche, nous l’avons vu, c’est dans ce cadre particulier que l’envoi en mission a été fait, témoignage formidable pour les jeunes et les plus anciens.
La procession s’est ensuite dirigée vers le tantad, qui a été béni et allumé par l’évêque de Vannes, avant d’entonner l’Anjelus et de poser pour la traditionnelle photo. Le repas champêtre a rassemblé plus de 630 convives, et le fest-deiz animé par de nombreux musiciens et chanteurs plouaysiens et languidiciens s’est prolongé jusque en soirée. Dans l’après-midi, une foule nombreuse, proche du millier de personnes était rassemblée devant la chapelle pour admirer la descente de l’ange pyrophore des Fleurs, lequel aura assuré ses trois allées et retours sans faute et en musique.
Quand un évêque est-il venu à la chapelle des Fleurs pour la dernière fois ?
C’était sans doute en 1950. Partant de la chapelle des Fleurs, une foule considérable, estimée à plusieurs milliers de personnes accompagnèrent à pieds leur évêque par un vieux chemin dit »chemin de Kerguiton ». Il s’agissait de Monseigneur Béllec, évêque de Vannes. Tous se rendaient à Poulgroix, pour l’inauguration et la bénédiction d’une nouvelle école, elle aussi consacrée à la sainte Vierge : Notre-Dame de Poulgroix.
Les points forts :
- une messe trilingue en breton, latin, français, animée par une chorale de qualité.
- un respect certain de la liturgie, conforme à ce que demande Vatican II
- un lien intergénérationnel fort, avec notamment des jeunes familles qui se mêlent aux anciens.
- un ancrage traditionnel fort, avec bénédiction à la fontaine, tantad, costumes bretons, procession avec bannières et statues des petits saints ou de la Sainte Vierge.
- un comité de chapelle dynamique.
- une chapelle et une fontaine très bien entretenues.
Les points à améliorer :
- il serait souhaitable, tout en maintenant le programme de la messe qui est vraiment bien équilibré, d’inscrire sur les livrets les traductions des cantiques bretons et latins. Non seulement pour la compréhension des non-brittophones mais aussi pour rendre compte de la richesse catéchétique des textes.
- Deux enceintes seraient bienvenues sur le parcours de la procession, de manière à bien sonoriser l’ensemble et permettre aux gens de reprendre les chants tous ensemble.
Mat eo ! De très belles images et un compte-rendu qui donnent envie d’y aller. Peut-être que je viendrai avec mon costume, l’an prochain.
Je tiens à dire à Ar Gedour que cette façon de rendre compte des pardons est vraiment excellente avec le récapitulatif à la fin en points forts et en points à améliorer.
A galon, kenavo !
Trugarez deoc’h, Fabrig. Merci pour ces encouragements.
Moaiand ‘uehè lakat or version gallek de heul er breton hag er latin, mè n’es ket kalz a léh ar er paperiaou, neze n’e ket és… Meit ha lakat tèr feuilhen mè rhé-gér ‘uehè morhat…
Parmi les points fort, il y a aussi la bonne idée d’enlever l’encombrant autel d’appoint et de célébrer sur le maître-autel, ad orientem. (les conseils d’Ar Gedour après le pardon du Sacré-Coeur à Berné ont peut être porté ! )
Comme je l’ai écrit à propos de ce précédent article :
» La possibilité de célébrer tourné vers l’assemblée ne justifie pas de célébrer sur une quelconque table, et de délaisser l’autel consacré. Sans compter le ridicule [et le non-sens liturgique], dans les petites églises, d’avoir deux autels l’un devant l’autre.
Comme il est difficile d’appliquer du jour au lendemain les conseils du cardinal Sarah sur la célébration ad orientem, on pourrait (ré)habituer progressivement les fidèles à cette orientation en le faisant lors des messes occasionnelles dans les chapelles qui n’ont d’autel digne de ce nom que l’ancien maître-autel, au lieu d’utiliser des tréteaux et du contre-plaqué ou une table de salon de jardin en plastique.
Ce serait l’occasion pour le prêtre de rappeler l’importance de l’autel, et d’expliquer l’intérêt de célébrer ad orientem, après avoir rappelé que ce n’est ni interdit, ni anti-conciliaire, comme d’aucuns ont l’air de le croire. »
Nous travaillons effectivement à éveiller les consciences en ce sens, mais nous ne sommes pas seuls, heureusement. Et vous avez tout à fait raison dans votre propos.
Une remarque concernant la date de certains pardons.
Les pardons, d’abord fêtes patronales de ND de Ceci ou de Saint Untel tendent à devenir « fête de la chapelle du village » ou « fête paroissiale de X ». En effet, prenons l’exemple de ce pardon de Notre Dame des Fleurs, il a lieu un dimanche ordinaire de septembre et on a dû célébrer la messe du dimanche per annum comme le montre la chasuble verte de mgr Centène. Autre exemple, le pardon de ND de Joie à Pontivy, anciennement le 15 août, et aujourd’hui célébré un quelconque dimanche de septembre. Résultat, la juxtaposition de la messe dominicale « normale » et d’une procession mariale qui vient comme un cheveu sur la soupe, de même l’éventuelle célébration mariale de l’après midi qui n’a aucun rapport avec la liturgie du jour. On peut penser aussi au pardon de Sainte-Anne des Bois célébré bizarrement le lundi de Pentecôte. Le risque est aussi que le culte du saint soit déconnecté du culte divin, alors qu’avec la messe dédiée à un saint (à commencer par Marie) la vénération du saint est parfaitement reliée à l’adoration du Seigneur. « il est nécessaire d’instruire les fidèles sur le lien existant entre les fêtes des Saints et la célébration du mystère du Christ. En effet, la raison d’être des fêtes des Saints est de mettre en lumière les réalisations concrètes du dessein de salut de Dieu, et de « proclamer les merveilles du Christ chez ses serviteurs »; les fêtes des membres de l’Église, que sont les Saints, sont en réalité aussi des fêtes de la Tête de cette même Église, c’est-à-dire des fêtes du Christ » (Directoire sur la piété populaire et la liturgie)
Outre le retour aux sources du pardon, ce serait aussi respecter Sacrosanctum Concilium qui, après avoir rappelé la primauté de la prière liturgique, reconnaît la valeur d’autres formes de prière, mais demande à relier davantage les deux, au lieu de les juxtaposer : « Les pieux exercices doivent être réglés en tenant compte du temps liturgique [et par extension du jour liturgique], à en découler d’une certaine manière « . Il me semble qu’il serait donc plus opportun de célébrer les pardons le jour de la fête du saint (ou un dimanche proche) de façon à pouvoir célébrer la messe en l’honneur du saint. Pour les fêtes mariales, la date du 15 août est bien sûr la plus indiquée (comme à ND de Quelven, ND de Kernascléden, etc mais je suis conscient du grand nombre d’églises et chapelles dédiées à Notre-Dame, dont la fête patronale ne peut avoir lieu en même temps, surtout vu la raréfaction des prêtres) ou encore le 8 septembre (ou un dimanche proche) comme à Josselin ou Querrien. Je suppose que la date du pardon de ND de Fatima à Bieuzy doit être liée à la fête de ND du Rosaire le 7 octobre. Certains pardons mariaux ont lieu de dimanche qui suit l’Assomption (Crénenan, Rochefort en Terre), je ne sais pas s’il est licite de dire la messe de Marie Reine (fête du 22 août) plutôt que la messe du temps ordinaire. On pourrait éventuellement fêter le pardon un samedi, et célébrer une messe votive en l’honneur de la Sainte Vierge.
A moins d’une tradition contraire très ancrée, il serait bon de réfléchir à choisir une date sur un critère plus liturgique.