Ce conte, que nous avons trouvé sur le blog « Pour que l’histoire vive« , est aimablement mis à disposition des lecteurs d’Ar Gedour par Blandine Meil, 91 ans, qui anime ce blog. Originaire du Cap Sizun mais demeurant au Québec depuis 1951, et lectrice occasionnelle d’Ar Gedour, elle nous confie : « Ça me fait infiniment plaisir de le partager avec vos lecteurs, surtout qu’il me vient d’un breton. Un conte appartient à celui qui l’aime. Et les contes sont écrits pour être partager. Il me vient d’un breton du Nord Finistère, Jean Cueff. Missionnaire des pères de Saint-Jacques, en Haiti venu se reposer à Montréal où j’habite. Il a tenu la paroisse Saint Émile durant 6 ans, puis est retourner en Haiti. Il avait lu ce conte en chaire durant le temps des fêtes. Il m’avait demandé si je le voulais. Vous comprenez que j’ai dit oui tout de suite. D’entendre parler de la Bretagne du haut de la chaire m’avait vraiment émue. Je vous souhaite un joyeux Noël ».
Savez-vous que chaque année, la nuit de Noël, entre le roc Trédudon et le Tuchen Kador, si l’on retient bien son souffle, on peut entendre une étonnante conversation entre l’ajonc et la bruyère.
OUI! Tous les ans ils se racontent la même histoire.
Une histoire qui remonte au temps où de magnifiques forêts habillaient les pentes et les crêtes aujourd’hui dénudées, des Montagnes D’Arrée; il n’y a pas si longtemps d’ailleurs.
C’était en l’an 752 de la fondation de Rome.
Cette nuit-là, portée par un léger vent de sud-est ou peut-être par un ange, une rumeur parcourut la forêt comme un frisson. D’arbre en arbre on se la répétait car c’était vraiment une bonne nouvelle. Et elle disait cette rumeur : » Là-bas par delà les horizons à Bethléem en Palestine, le sauveur vient de naître ».
Cette nouvelle fit tellement chaud au cœur des arbres que le givre qui recouvrait leurs branches, se mit à fondre. Depuis le temps qu’ils attendaient cette bonne nouvelle!!! Immédiatement plusieurs furent d’avis qu’il fallait absolument y dépêcher une délégation.
OUI! Les Monts d’Arrée se devaient d’être représentés à Bethléem.
On tint conseil pour choisir les délégués.
A tout seigneur, tout honneur! Bien sur, on proposa donc au chêne de conduire la délégation. Mais le roi de la forêt fit observer qu’il ne pouvait pas en conscience accepter cet honneur. Impossible d’abandonner son peuple disait-il! Lui, parti ce serait le chaos!
En réalité, Il craignait que l’on s’habituât à se passer de Roi !
On se tourne alors vers le doyen, un if multi centenaire…et encore plus savant que vieux. Mais l’if, non plus n’était pas intéressé. ! Il n’avait plus rien à apprendre depuis longtemps! Surtout pas de ces pauvres pays de sable ou rien ne poussait.
Le hêtre l’Orme et le Merisier se dérobèrent aussi, prétextant que les gens avaient besoin de bons sabots et de beaux meubles. Finalement on se rabattit sur le sapin, l’ajonc et la bruyère … Les bons à rien quoi! Les petits, les sans-grades. Eux, acceptèrent de bon cœur, simplement étonnés que pour une fois on ait pensé à eux ! Le cœur battant, ils prirent la route.
OH! Que ce fut long! Que ce fut long! Surtout pour l’ajonc et la bruyère qui même ne allongeant le pas, avaient bien du mal à suivre le sapin.
Horizon après horizon, ils parvinrent enfin à Bethléem. Et là, ma foi, ils firent les choses à leur manière avec une telle discrétion que les évangiles ont oubliés de mentionner leur visite. Donc les voilà à Bethléem!
Toute rougissante, la petite bruyère félicita Marie en s’offrant elle-même en un ravissant bouquet. L’ajonc se laissa brouter par l’âne qui n’avait jamais rien manger d’aussi bon…. De mémoire d’âne on n’avait jamais fait un tel réveillon….
Quant au sapin, il sacrifia sa plus belle branche pour que Joseph, qui était menuisier dit-on, fabriquât un bon berceau pour l’enfant. Ce n’était pas humain pensait-il de laisser un enfant de Dieu dans une mangeoire! Même pas un enfant d’homme d’ailleurs.
Ils demeurèrent quelques jours à Bethléem, heureux, tout à fait à l’aise avec la sainte famille. Dame! On était entre pauvre gens!
Leur mission accomplie, ils s’en retournèrent au pays, racontant partout, en cours de route, la Bonne Nouvelle : Dieu est venu chez nous disaient-ils. Nous l’avons vu. Maintenant il sera toujours avec nous.
Et tous les petits, les pauvres, les méprisés, toute l’humanité souffrante, les affamés, les mitraillés, les torturés, les opprimés, les sans-travail et les sans amour sentirent monter en eux un sentiment qu’ils ne connaissaient plus depuis longtemps et c’était l’espérance.
On leur posait tellement de questions qu’ils étaient embarrassés pour répondre.
Faut comprendre! Ils n’avaient pas été au Séminaire ou à l’université, ils ne savaient pas dire les choses comme on les dit dans les sermons.
Ils disaient par exemple » Vous savez le fils de Dieu, il n’a pas l’air d’un Dieu, il a l’air d’un homme. Alors si on ne sait pas voir, on ne peut pas le reconnaître. Et ce serait vraiment dommage!
Voilà l’histoire que se racontent encore le soir de Noël, l’ajonc, la bruyère et le sapin des Monts d’Arrée.
Et bien sur nous comprenons pourquoi la bruyère, l’ajonc et le sapin ne perdent pas leurs feuilles en hiver. C’est qu’ils sont devenus immortels comme Dieu.
Comment ne pas être heureux de cette bonne nouvelle !
Kanamb Noel, kanet gant Gedourion ar Mintin – 2009
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