Dynamique et diversifié, le scoutisme français des années 1930 et 1960 en Bretagne s’inscrit sans doute dans l’esprit de son temps et bien des traits le rapprochent des autres mouvements de jeunesse que l’époque a vu naître et se développer. Il s’en distingue pourtant et son originalité tient à la fois à sa sociologie, à sa pratique et à son idéologie : triple détermination qui s’impose quelles que soient par ailleurs les évolutions suscitées par les circonstances extérieures ou par ses conflits internes.
Moyennement implanté en Bretagne, mais fortement enclin à se ressourcer dans le mythe d’une chrétienté bretonne idéale, il rencontre finalement, plus que bien d’autres organisations analogues, les divers problèmes de la question nationale bretonne. Toutes ces considérations seraient, bien entendu, à nuancer, d’autant plus que certaines ne valent que sous bénéfice d’inventaire. En toute hypothèse, elles laissent de côté une interrogation majeure : comment s’articulent, dans la redistribution du paysage scout, au milieu des bouleversements des années soixante, les identités bretonne, française et européenne ? Ou, pour le dire autrement, quelle est la part de l’affirmation bretonne des Bleimor dans le développement des Scouts d’Europe ?
Nous nous proposons ici de tenter de répondre à la question posée il y a quinze ans, que sous-tend une autre interrogation : comment se fait-il que le scoutisme Bleimor, identitaire et voulu national pour la Bretagne, catholique parce que Breton, s’est intégré en 1962, comme un seul homme ou plus exactement à la suite d’un seul homme, dans une fédération scoute transnationale à vocation européenne, œcuménique puisque européenne, organisation devenue paradoxalement et malgré elle, à la fin des années soixante pour la France, une des composantes malvenues, dans l’Église conciliaire, du courant catholique intransigeant ?
L’histoire est connue, les scouts et guides Bleimor sont nés à Paris en 1946 sous l’impulsion d’un couple, Pierre et Lucienne Géraud. L’histoire certes, mais l’archéologie qui la rend intelligible, en revanche… Et puis, le projet Bleimor, de quoi est-il réellement porteur, au delà de sa réalité vécue du moment et du souvenir qu’il en reste ? Et d’abord, qu’est-ce que le projet Bleimor ? Ce qui revient à se demander ce que voulait son promoteur principal, Pierre Géraud dit Perig Keraod. [… ]
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