ÉCOLES CATHOLIQUES : ET SI ELLES ÉTAIENT AUSSI DES ÉCOLES D‘INTÉRIORITÉ ?

Amzer-lenn / Temps de lecture : 3 min

« Etre » est peut-être la seule chose qui n’est pas vraiment enseignée dans le bagage éducatif, pas même dans l’enseignement catholique. Et pourtant, l’école devrait être le lieu où le jeune peut trouver des éléments de réponse à sa recherche fondamentale, humaine et spirituelle. « Le monde, a fortiori la jeunesse, a plus que jamais besoin d’intériorité. Tous les instants de la vie humaine semblent être désormais remplis par la recherche du rendement, par le divertissement, par le bruit des media. Mais l’être humain a besoin aussi de silence prolongé, de contemplation gratuite, de relations personnalisées », alertait saint Jean-Paul II. Je vois dans cette remarque du Saint-Père une invitation pressante à rendre les systèmes éducatifs chrétiens soucieux du climat relationnel autant que des programmes, de l’être que du faire, du comment que du quoi…

 

Et si ce n’était pas qu’un vœu pieux ? Et si chaque chaque école catholique se faisait aussi école d’intériorité ? Avec, à la clé pour l’élève la chance d’y développer estime et confiance en lui-même, de mieux s’accepter avec ses forces et ses limites, de se sentir compris et de mieux comprendre les autres, d’être accompagné et respecté dans son cheminement… Avec une feuille de route toute simple, l’enfant pourrait se mettre en quête de son identité, de sens, de transcendance, de Dieu… Il y a urgence pour lui à se libérer de ses croyances non fondées, de ses automatismes de fonctionnement, du ressassement du passé, de la crainte de l’avenir… A dégager ce qui obstrue la source. Dans ce monde qui se dessèche, si nous ne voulons pas mourir de soif, il nous faut nous-même devenir source. L‘avons-nous assez remarqué ? Dans chaque tradition on retrouve le symbole d’une eau source de vie. Trop de théologiens de toutes les religions, discutent inlassablement pour savoir si celle-ci est alcaline, minérale, sulfatée, magnésienne ou si elle contient trop de nitrate… Sans même avoir bu une gorgée de cette eau !

Très concrètement, pourquoi l’Enseignement Catholique n’instaurerait-il pas une semaine de l’intériorité dans chacune de ses écoles ? Pour aider les enfant à explorer leur espace intérieur, à voyager jusqu’aux marches d’eux-mêmes. En période de Carême, par exemple, en proposant un jeûne d’un nouveau genre. Et cela passerait notamment par la déconnexion des  téléphones portables, d’internet, des écrans… Pour entendre le chant de son âme, il existe une clé principale : le silence, un silence qu’il faut apprendre à apprivoiser et cela ne se fera pas sans efforts..  Mais au final, au bout de quelques semaines, l’arbre se reconnaîtra à ses fruits : et ceux-ci ont noms paix intérieure, réconciliation avec soi, bienveillance envers l’autre, gratitude pour la vie, facilité à dédramatiser les circonstances, développement de l’écoute et de la compassion, capacité de goûter le moment présent, de se remettre en question et de rire de soi, perte d’intérêt dans les rapports de force, meilleure disposition à la clarté, joie contagieuse…

L’Enseignement catholique a une chance à saisir et un boulevard devant lui s’il consent à développer sa singularité, à ne pas remiser les crucifix dans les placards dans le respect bien sûr des convictions et des cheminements de chacun. Les élèves adressent à leurs maîtres une parole : « Faites-nous vivre ! ». Ils pressentent confusément qu’il ne leur servirait à rien de connaître toutes les sciences du monde s’ils n’ont pas la connaissance d’eux-même et qu’ils passeraient à côté de l’essentiel. En un mot, ils attendent d’être traités comme des êtres spirituels. Car la vie spirituelle, c’est le mystère en chacun de nous qui correspond au mystère de Dieu. C’est ce mystère-là que les professeurs sont aussi chargés de servir et c’est la belle tâche à laquelle ils devraient être attelés.

À propos du rédacteur Philippe Abjean

Souhaitant redonner à la Bretagne une nouvelle dimension spirituelle et culturelle, Philippe Abjean a remis à l'honneur le pèlerinage du Tro Breizh (Tour de Bretagne), fondé la Vallée des Saints et l'Oeuvre de St Joseph. Ancien professeur de philosophie, il a publié plusieurs ouvrages, retraçant ses intuitions et ses engagements (que vous pouvez retrouver sur Ar Gedour).

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Un commentaire

  1. On peut proposer , à ceux qui cherchent à créer une réflexion spirituelle bretonne, de lire l’oeuvre de Viktor Frankl, contemporain de Freud, qui s’en détacha en créant une psychothérapie d’inspiration spirituelle (celle de Freud étant matérialiste):
    – « Découvrir un sens à sa vie, grâce à la logothérapie » (1959) Les Editions de l’homme, 2021. (16 millions d’exemplaires vendus dans le monde). Sens de la vie. Vide existentiel. La responsabilité. Le sens de la souffrance. La psychiatrie réhumanisée, etc…
    – « Le Dieu inconscient. Psychothérapie et religion » (1988). InterEditions, 2020. Livre beaucoup plus théorique, et moins abordable.
    Créons notre propre spiritualité bretonne, chrétienne et aussi non chrétienne, car le freudisme athée a infiltré toute la réflexion contemporaine, surtout française. (la pensée non chrétienne bretonne est toujours influencée par le christianisme).

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