Pardons et pèlerinages occupent une place particulière dans la culture en Bretagne. Ils constituent selon l’historien Georges Provost « une des expressions les plus vivantes et les plus parlantes du catholicisme breton à travers les siècles » [1]. Le pardon est une fête le plus souvent à date fixe, en l’honneur du saint ou de la sainte titulaire d’une chapelle, d’une église ou d’une cathédrale tandis que le pèlerinage peut être entrepris à tout moment de l’année. Les deux termes renvoient donc à des pratiques différentes mais qui souvent se confondent. Ces dernières se déroulent alors dans les mêmes lieux, s’appuient sur les mêmes objets de culte et prennent parfois la même forme.
Après plusieurs périodes successives de déclin et de renouveau, ces pratiques qui sont attestées depuis le Moyen Âge, connaissent depuis les années 1970 un regain d’intérêt. L’association Bretagne Culture Diversité dénombre en 2022 1968 pardons en activité sur l’ensemble de la Bretagne historique. En mai 2020, l’inscription à l’Inventaire national du Patrimoine culturel immatériel a reconnu la vitalité de ces traditions et le rôle joué par les communautés qui les animent.
La présente enquête porte sur les aspects matériels de ces pratiques. Elle procède d’une approche globale, prenant en compte le cadre architectural et spatial ainsi que les objets et supports de dévotion liés. Etudier ces éléments sous l’angle de la pratique doit permettre de renouveler et d’enrichir les regards sur ces sanctuaires, en plaçant leur dimension sociale au cœur de l’analyse. D’anciens dossiers d’Inventaire sont revisités et de nouveaux dossiers d’Inventaire voient le jour.
Cette enquête semble d’autant plus utile aujourd’hui qu’elle s’appuie sur de nombreuses associations en charge de l’organisation des pardons et en capacité de transmettre la mémoire dont elles sont dépositaires. Outre l’aspect documentaire et mémoriel, il s’agit aussi de contribuer à la sauvegarde de ces lieux et objets dont certains sont encore utilisés, en dépit de leur fragilité, tandis que d’autres, au contraire, tombent dans l’oubli.
Le choix d’une étude thématique régionale à l’échelle de la Bretagne administrative rend possibles des comparaisons à l’échelle de tout le territoire et l’identification de dynamiques communes ou bien de spécificités locales. Il offre un terrain d’étude complet, riche d’une variété d’édifices et d’objets à l’image de la diversité des pardons et pèlerinages auxquels ils se rattachent. Le périmètre historique de l’étude s’étend du Moyen Âge à nos jours et permet d’inclure des lieux qui accueillaient autrefois des pardons aujourd’hui disparus comme de capter les rythmes de la vie de certains sanctuaires durablement restés actifs.
Afin de resserrer le champ de l’enquête, l’attention est portée en premier lieu aux sanctuaires dédiés à la Vierge. Ils représentent 20 à 30 % des lieux de pardon et de pèlerinage. Un recensement général, mené département par département, donne une mesure plus précise de leur nombre. Une partie de ces édifices sont retenus pour être étudiés de façon plus approfondie, soit parce qu’ils correspondent à un sanctuaire important, soit parce qu’ils sont représentatifs d’un type de pèlerinage ou de pardon, soit au contraire parce qu’ils sont singuliers dans le corpus.
Le caractère vivant des pardons est un levier pour porter l’enquête de façon participative. Chaque site peut donner lieu à un collectage, si possible co-construit avec les associations de pardon. L’enquête elle-même a vocation à donner lieu à des partenariats avec l’université (dispositifs d’accompagnement pour des travaux de recherche), avec les collectivités et institutions concernées, ou tout simplement les Bretonnes et les Bretons qui souhaitent s’y associer.
[1] PROVOST, G., La Fête et le sacré. Pardons et pèlerinages en Bretagne aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Ed. du Cerf, 1998.