Analogie de la Parole de Dieu, tirée de l’exhortation apaostolique Verbum Domini, donnée par le Pape Benoit XVI le 30 septembre 2010.
7. À partir de ces considérations, qui naissent de la méditation du mystère chrétien exprimé dans le Prologue de Jean, il est nécessaire à présent de souligner ce qu’ont affirmé les Pères synodaux concernant les diverses modalités avec lesquelles nous utilisons l’expression « Parole de Dieu ». On a parlé avec justesse d’une symphonie de la Parole, d’une Parole unique qui s’exprime de différentes manières : « comme un chant à plusieurs voix »[17]. Les Pères synodaux ont parlé à ce propos, en référence à la Parole de Dieu, d’une utilisation analogique du langage humain. En effet, si d’un côté cette expression concerne la communication que Dieu fait de lui-même, de l’autre, elle assume des significations diverses qui doivent être considérées avec attention et mises en relation les unes avec les autres, aussi bien du point de vue de la réflexion théologique que de l’usage pastoral. Comme nous le montre de manière claire le Prologue de Jean, le Logos désigne à l’origine le Verbe éternel, c’est-à-dire, le Fils unique engendré par le Père avant tous les siècles et qui lui est consubstantiel : le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. Mais ce même Verbe, affirme saint Jean, « s’est fait chair » (Jn 1, 14) ; c’est pourquoi Jésus Christ, né de la Vierge Marie, est réellement le Verbe de Dieu qui s’est fait consubstantiel à nous. Par conséquent, l’expression « Parole de Dieu » indique ici la personne de Jésus Christ, le Fils éternel du Père, fait homme.
Par ailleurs, si au centre de la Révélation divine se situe l’événement du Christ, on doit aussi reconnaître que la création elle-même, le liber naturae, fait aussi essentiellement partie de cette symphonie à plusieurs voix dans laquelle le Verbe unique s’exprime. En même temps, nous affirmons que Dieu a communiqué sa Parole dans l’histoire du salut, qu’il a fait entendre sa voix ; par la puissance de son Esprit, « il a parlé par les prophètes »[18]. La Parole divine se révèle donc au cours de l’histoire du salut et elle parvient à sa plénitude dans le mystère de l’incarnation, de la mort et de la résurrection du Fils de Dieu. La Parole de Dieu est encore celle qui est prêchée par les apôtres, dans l’obéissance au commandement de Jésus ressuscité : « Allez dans le monde entier. Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création » (Mc 16, 15). La Parole de Dieu est donc transmise dans la Tradition vivante de l’Église. Enfin, la Parole divine, attestée et divinement inspirée, c’est l’Écriture Sainte, l’Ancien et le Nouveau Testament. Tout cela nous fait comprendre pourquoi, dans l’Église, nous vénérons beaucoup les Saintes Écritures, bien que la foi chrétienne ne soit pas une « religion du Livre » : le Christianisme est la « religion de la Parole de Dieu », non d’« une parole écrite et muette, mais du Verbe incarné et vivant »[19]. L’Écriture doit donc être proclamée, écoutée, lue, accueillie et vécue comme la Parole de Dieu, dans le sillage de la Tradition apostolique dont elle est inséparable[20].
Comme l’ont affirmé les Pères synodaux, nous nous trouvons réellement face à une utilisation analogique de l’expression « Parole de Dieu », dont nous devons être conscients. Il faut donc que les fidèles soient davantage préparés à en saisir les différents sens et à en comprendre l’unité. De même, du point de vue théologique, il est nécessaire d’approfondir l’articulation des différentes significations de cette expression pour que resplendissent davantage l’unité du dessein divin et son centre : la personne du Christ[21].
[17] XIIe Assemblée Générale ordinaire du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 9.
[18] Credo de Nicée Constantinople : DS 150.
[19] Saint Bernard de Clairvaux, Homelia super missus est, IV, 11 : PL 183, 86 B.
[20] Cf. Conc. Œcum. Vat. II, Const. dogm. sur la Révélation divine Dei Verbum, n. 10.