Sainte Anne-la-Palud, lieu de transmission

Amzer-lenn / Temps de lecture : 6 min

Sainte Anne-la-Palud, c’est l’un de ces pardons qui à la fois déploie une belle liturgie, enracinée dans cette culture propre à la Bretagne, qui garde cet héritage empreint de piété populaire tout en essayant de la transmettre au mieux aux générations futures. Attirant encore cette année des milliers de personnes, les cérémonies étaient présidées ce dimanche par Mgr Denis Jachiet, évêque auxiliaire de Paris, et en présence de Mgr Laurent Dognin, évêque du diocèse de Quimper et Léon. L’évêque parisien a confié apprécier « ce lieu rassemble des gens différents, qui sont heureux de se retrouver dans un même lieu pour célébrer sainte Anne. C’est une tradition précieuse qu’il ne faut pas perdre. Elle permet de transmettre une mémoire importante. Le support culturel aide à garder le contenu du message ».

Une messe en breton la veille, puis le lendemain et les jours suivants une messe alliant le français, le latin et le breton, les vêpres (et bénédiction de la terre et de la mer) qui sont là avec la procession, en présence de ces très nombreuses bannières et croix portées par des pèlerins jeunes et anciens portant les costumes bretons des aïeux comme une tradition qui n’est pas morte et ne s’est pas métamorphosée en un folklore. Et cet enracinement attire, aussi bien les cathos que les périphéries, les locaux que les touristes. Sainte Anne, sanctuaire du Porzay que parfois on considère à tort comme une chapelle parmi d’autres, est en effet l’un de ces lieux d’évangélisation que les jeunes générations aiment à retrouver, avec des anciens qui vous accueillent comme si l’on était une seule et même famille. Il suffit de parler un peu avec ceux que l’on retrouve d’année en année, venant parfois de loin, pour s’en rendre compte, même si comme le disait Mgr Jachiet, « c’est certainement un volet qu’il faudrait étoffer ». Il est vrai que peuvent survenir des incompréhensions intergénérationnelles, mais quand on prend le temps de découvrir et de parler avec ceux qui tiennent ce phare du Porzay tout au long de l’année et le font vivre, on arrive très vite à se retrouver sur l’essentiel.

Et tout cela transparait lors du grand pardon qui a lieu chaque année du samedi au mardi de la dernière semaine d’août, débutant avec une messe e brezhoneg et se concluant par le « pardon des Douarnenistes » qui a lieu le mardi, attirant toujours les habitants de Douarnenez mais bien au-delà. C’est ce qui transparait lorsque l’on voit les délégations des sanctuaires et chapelles du diocèse (et d’ailleurs) reçues avec sympathie, participant au repas ou au verre de l’amitié. C’est ce que l’on ressent en voyant ce dimanche des pèlerins de Sainte Anne-des-Bois (Berné – Diocèse de Vannes) venir sur les dunes de Plonevez-Porzay assister à ce beau pardon, de la même manière qu’une délégation de Sainte Anne-la-Palud vient chaque année le lundi de Pentecôte pour le pardon de Sainte Anne-des-Bois, initiative lancée par l’un des membres d’Ar Gedour et suivie depuis.

Oui, Sainte Anne-la-Palud est l’un de ces pardons qui vivent encore, parce qu’on tient peut-être compte de ce qui compte aux yeux des Bretons et de ceux qui aiment la Bretagne. Et c’est sans doute pour cela aussi que, parce que tout au long de l’année se vivent des temps forts qui ont leur point d’orgue dans cet événement d’été, viennent alors les nouvelles générations pour les étapes marquantes de leur vie chrétienne. Et l’on pense alors à ce qu’avait dit le Pape François en novembre 2018, considérant que la piété populaire est un joyau à préserver, et appelant à ce que soit favorisée dans ces lieux «la prière de l’Église», c’est-à-dire la célébration des sacrements pour que «chacun puisse sentir qu’il fait partie d’une communauté plus grande qui de par le monde professe l’unique foi, témoigne du même amour et vit la même espérance». Les sanctuaires sont appelés, disait le Pape, à alimenter la prière des pèlerins dans le silence de leur cœur. «Avec les paroles du cœur, en silence, avec des formules apprises dans l’enfance, avec ses gestes de piété, chacun doit pouvoir être aidé à exprimer sa prière personnelle. Ils sont nombreux ceux qui viennent pour demander une grâce ou pour remercier d’avoir été exaucés, pour avoir reçu force et paix alors qu’ils étaient mis à l’épreuve. Cette prière rend les sanctuaires féconds, parce que la piété du peuple est toujours alimentée et croît dans la connaissance de l’amour de Dieu.»

Et pour cela, le souverain pontife précisait qu’«un climat d’amitié est une graine féconde que nos sanctuaires peuvent jeter sur le chemin des pèlerins, leur permettant de retrouver confiance en l’Église, qui peut parfois (elle-même) se montrer déçue de l’indifférence reçue.»

Ces paroles résonnent aux oreilles de ceux qui voient en cette chapelle dressée sur les dunes du Porzay un sanctuaire à ne pas délaisser qui a encore ce que bien des paroisses n’ont plus, qui voient là un trésor à fructifier et à un lieu à développer. Et si cette chapelle vit déjà au long de l’année, on se prend à rêver qu’un jour un prêtre sera nommé à demeure pour célébrer les sacrements de l’Eglise, évangéliser depuis cet édifice millénaire et qui travaillera à son rayonnement ad majorem Dei gloriam avec ces bénévoles qui se donnent sans compter pour que vive Sainte Anne-la-Palud.

Le grand pardon de Sainte Anne-la-Palud, c’est jusqu’à demain mardi, avec grand-messe à 10h30 présidée par le Père Sébastien Guiziou, vicaire général du Diocèse de Quimper & Léon et vêpres à 15h.

A propos des sanctuaires (ce que dit le code de Droit canonique)

Can. 1230 – Par  sanctuaire on entend une église ou un autre lieu sacré où les fidèles  se rendent nombreux en pèlerinage pour un motif particulier de piété avec l’approbation de l’Ordinaire du lieu.

Can. 1234 – § 1. Dans les sanctuaires seront plus abondamment offerts aux fidèles les moyens de salut en annonçant avec zèle la parole de Dieu, en favorisant convenablement la vie liturgique surtout pour la célébration de l’Eucharistie et de la pénitence, ainsi qu’en entretenant les pratiques éprouvées de piété populaire.

Un article co-signé Erwan Kermorvant & Eflamm Caouissin

Photos Ar Gedour / Mr Kerivel (DR)

Illustration R. Le Honzec / Ar Gedour (DR)

 

À propos du rédacteur Erwan Kermorvant

Erwan Kermorvant est père de famille. D'une plume acérée, il publie occasionnellement des articles sur Ar Gedour sur divers thèmes. Il assure aussi la veille rédactionnelle du blog et assure la mission de Community Manager du site.

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Un commentaire

  1. Très belle lecture, un beau texte à partager, depuis 29 ans je représente Sainte Anne dans les pardons et même à Sainte Anne Des bois, dans le diocèse de Vannes. Sainte Anne La Palud est un lieu ouvert à tous où tout le monde se sent bien, j’espère que cela durera encore longtemps et que les générations à venir continuront à entretenir ce Saint lieu.
    Eflamm, merci pour ce beau texte.

    JJ

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