A l’approche de la Semaine Sainte, nous consacrons certains de nos billets à la liturgie à venir. Aujourd’hui, il sera question de la proclamation de l’Evangile de la Passion.
La lecture de la Passion de Notre Seigneur, que ce soit le jour des Rameaux ou le Vendredi Saint, correspond à certaines règles liturgiques qui sont données par le Cérémonial de la Sainte Messe à l’usage des paroisses. Il est bon que les animateurs et les équipes liturgiques locales puissent en (re)prendre connaissance :
2.8 Qui proclame la Passion ?
La question se pose aussi bien le jour des Rameaux que le Vendredi saint. En sa forme classique, le Rit romain fait lire la Passion par trois diacres, portant l’aube, le cordon, l’étole et le manipule, distincts des ministres de la Messe. [71] Ces diacres chantent, respectivement, les paroles de Notre-Seigneur, de l’évangéliste (le narrateur) et des autres individus (la synagogue). Ils le font, côte à côte, sur un livre unique que le cérémoniaire fait passer entre trois clercs qui se tiennent devant eux, ou, plus récemment, sur trois livres tenus sur trois pupitres, tandis que deux servants assistent, les mains jointes. C’est le passage du livre unique qui explique pourquoi, dans la forme classique, le narrateur est au centre, ayant Notre-Seigneur à sa droite et la synagogue à sa gauche. Les paroles de la foule sont chantées par la schola, qui pourrait ne comporter que des laïcs, en habit de ville, s’ils sont hors du chœur.
Dans sa Lettre circulaire sur la Préparation et la Célébration des Fêtes pascales, du 16 janvier 1988, la Congrégation pour le Culte divin conseille vivement de chanter ou proclamer la Passion « de la manière traditionnelle ». [72] Ainsi, les indications données plus haut suffiront pour les églises qui sont en mesure de fournir trois diacres prêts à chanter ; dans les autres lieux, quelque précaution est requise pour éviter que le désir de solenniser cette proclamation ne finisse par l’avilir.
Outre la schola qui représente la foule, à qui est-il permis de proclamer la Passion ? Le missel préfère qu’elle soit proclamée par le diacre ou, en son absence, par le prêtre, mais accepte qu’elle puisse être proclamée par des lecteurs, le rôle de Notre-Seigneur étant réservé au prêtre. [73] L’énonciation du missel que « les fonctions liturgiques qui ne sont pas propres au prêtre ou au diacre […] peuvent être confiés à des laïcs compétents, choisis par le curé ou le recteur de l’église » [74] est ici sans portée, car proclamer l’évangile est une fonction propre au diacre. Ainsi, il paraît que la tolérance du missel envers les lecteurs de la Passion se limite aux lecteurs institués. [75]
2.9 La manière de proclamer la Passion
Dans le schéma traditionnel, les trois diacres se placent côte à côte. Ce rapprochement semble encore plus nécessaire quand un ou deux des lecteurs sont des suppléants : on comprend plus facilement qu’ils ne font que mettre leur voix à la disposition du prêtre quand ils sont placés à ses côtés, plutôt que dispersés aux divers points du sanctuaire. Nécessairement, le prêtre sera au milieu, avec le diacre, ou le plus digne des lecteurs, comme narrateur à sa droite, et le lecteur représentant la synagogue à sa gauche. Si cette disposition implique l’usage de trois livres distincts, [76] elle n’exige pas forcément trois pupitres : deux servants peuvent tenir chacun un livre devant les deux ministres inférieurs placés de part et d’autre de l’ambon, où se tient le prêtre. Le microphone de l’ambon pourrait suffire à capter les trois voix si les lecteurs restent rapprochés – a fortiori si on chante – sinon il faudrait ajouter d’autres microphones sur pied.
Le déroulement est le même le jour des Rameaux que le Vendredi saint. Après l’épître, tous se lèvent pour le chant de Christus factus est, [77] et ceux qui vont lire la Passion reçoivent leur livre d’un servant, qui les prend sur la crédence, et se mettent en place ; les diacres de la Passion demandent préalablement la bénédiction du célébrant. [78] Les lecteurs et les servants se rejoignent au milieu du sanctuaire, saluent l’autel et se rendent ensemble au lieu de la proclamation – probablement à l’ambon, où deux servants se placeraient de part et d’autre pour tenir chacun le livre d’un des lecteurs, le livre de celui du milieu étant posé sur l’ambon. Les trois lecteurs de la Passion gardent les mains jointes devant la poitrine, ne les disjoignant que pour tourner la page.
La proclamation de la Passion se déroule sans encens ni cierges tenus par des servants, et commence directement après l’annonce du narrateur : Passio Domini nostri Iesu Christi secundum N., sans salutation ni signe de croix. [79] Il est vivement conseillé de la chanter ; quelle que soit la langue, ceci peut se faire soit sur le ton traditionnel, soit sur une autre mélodie. La tradition prescrit que les paroles de la synagogue soient chantées dans un ton plus aigu que celles du narrateur, celles de Notre-Seigneur dans un ton plus grave. La schola peut chanter les paroles de la foule en polyphonie, ou bien se contenter de les psalmodier ; à défaut de schola, elles peuvent être prononcées par le lecteur qui fait la part de la synagogue.
Après les paroles annonçant la mort du Seigneur – emisit spiritum ou exspiravit, selon l’année ; tradidit spiritum, le Vendredi saint – tous se mettent à genoux et l’on s’arrête un moment. [80] À la fin de la Passion, aucun livre n’est baisé. [81]