Saint RENAN ou RONAN, Évêque.
Né en Irlande, de parents convertis par saint Patrick, il fit des progrès si marqués dans la science et dans la sagesse, qu’il fut élevé à l’épiscopat. Il dirigeait avec succès son troupeau dans le chemin du ciel, quand, fuyant les honneurs qu’on lui rendait dans sa patrie, il chercha une retraite dans l’Armorique. Il prit terre au pays de Léon, se fixa à deux lieues du rivage, dans une profonde solitude, où il se construisit une petite chaumière qu’a remplacée la ville de Saint-Renan.
Il y aurait coulé, dans l’union avec Dieu, le reste de ses jours, si la santé qu’il rendit à quelques malades, auxquels son dénuement l’empêchait de donner autre chose, n’avait attiré dans sa retraite une foule d’infirmes. Pour échapper aux louanges qui semblaient le poursuivre, il vint jusqu’au bord de la vaste forêt de Nevet.
Épuisé de fatigue et de besoin, il fut charitablement accueilli par un paysan qui, touché de ses instructions, ne voulut pas le laisser s’établir loin de lui. Ils entrèrent dans le bois ; Renan y bâtit, à l’aide de son pieux disciple, un ermitage, a l’endroit maintenant nommé Locronan, et il y mena une vie angélique.
Sa réputation de sainteté parvint jusqu’à Gradlon, qui, comte de Cornouaille, habitait son palais de Quimper, à trois lieues de distance. Le comte vint le voir, et l’homme de Dieu l’exhorta à vaincre ses passions et à mériter un trône dans le ciel, en se montrant juste et bienfaisant.
Bientôt, la patience de l’ermite fut mise à une étrange épreuve. La femme du villageois, son ami, vint lui reprocher de détourner cet homme du travail. Loin d’être désarmée par la douceur du sage, elle publia qu’il était un enchanteur et qu’il voulait initier son mari à son art infernal. Elle alla jusqu’à cacher dans un coffre sa propre fille, âgée de quatre ans, et dit que l’habitant de la forêt était le loup qui dévorait le bétail des voisins, et qu’il avait même mangé sa fille unique. Voyant plusieurs personnes trop simples émues de ses plaintes, elle court à leur tête à l’ermitage du saint, réclame sa fille en poussant des cris affreux, et, avec le même cortège, elle va jusqu’aux pieds de Gradlon, demander justice contre le monstre qui s’est nourri de son enfant et qui a corrompu son époux jusqu’à le rendre magicien comme lui.
Le prince fait venir Renan, et dit : Qu’on lance sur lui mes deux dogues furieux. S’il est innocent, sa vertu le sauvera. Le juste fait sur les animaux féroces le signe de la croix, en disant : Que le Seigneur vous arrête ! Aussitôt adoucis, ils caressèrent Renan, qui obtint facilement alors le temps de se justifier. Il le fit pour la gloire de Dieu, et avertit que la calomniatrice avait renfermé sa fille dans un coffre, ajoutant que l’enfant y était morte. La chose fut vérifiée. La mère criminelle allait subir la mort, tant on était indigné contre elle. Le héros chrétien la sauva et mit le comble à sa générosité, en ressuscitant, devant tout le monde, la victime de la fraude de son ennemie.
Pour se dérober à l’admiration des hommes, Saint Renan alla passer le reste de sa vie dans la forêt de Loudéac ou dans celle de Lanouée. Il mourut le 1er Juin, vers 395.
Bienheureuse ERMENGARDE d’Anjou, Duchesse de Bretagne.
Fille de Foulques, comte d’Angers, et d’Hildegarde de Beaugenci, elle fut élevée dans la capitale de son père et donna de bonne heure de grandes marques d’une dévotion tendre et éclairée.
En 1093, elle épousa Alain IV, duc de. Bretagne, qui, quatre ans après, allant à la première croisade, lui confia la régence de ses états et l’éducation de ses enfants. L’Armorique fut heureuse et la jeune famille formée à la science et à la vertu. La pieuse mère fit doter par Conan, son fils aîné, âgé de six ans, l’église qu’elle fondait sur une tour de Rennes.
Le 6 Janvier 1102, une grande assemblée de prélats, tenue à Nantes, fut honorée de la présence du duc et de la duchesse, qui donnèrent la forêt de Puzarlez à Marmoutier, abbaye déjà confirmée par eux dans ses possessions présentes et futures au comté nantais.
Ermengarde, ayant obtenu de saint Nicolas la guérison de l’héritier de la couronne ducale, le mena avec son cadet, Geoffroi le Roux, et Robert de Vitré, accomplir un vœu commun, à l’abbaye qui porte le nom du saint.
En 1108, elle procura à l’abbaye de Redon la répression de quelques violations des privilèges de ce Monastère.
En 1112, atteint d’une maladie dangereuse, Alain céda le duché à Conan et se retira au couvent de Redon. Ermengarde lui fit créer une honorable retraite et se mit à Font-Evraud, sous la conduite de Robert d’Arbrissel. Libre à la mort du zélé fondateur, elle revint en Bretagne où on l’appelait pour rétablir la paix. L’abbé de Redon ayant osé envahir Belle-Île, fut interdit, excommunié un an. Conan combattait pour lui ; mais il rendit cette terre à Sainte-Croix de Quimperlé, à la prière de la duchesse. Elle le détermina à protéger la communauté que Raoul de la Fustaie avait établie dans la forêt de Rennes, et lui donner le prieuré de Loc-Maria de Quimper.
En 1127, l’église de Redon, profanée par des factieux qui y soutinrent un siège contre l’armée du duc, fut solennellement réconciliée en présence de la cour ducale.
Après la cérémonie, un concile provincial, tenu à Nantes, abolit divers abus, surtout le droit de bris, qui livrait à la rapacité des hommes ce qu’avait épargné un naufrage. Cédant aux instances de sa mère, Conan y renonça, et pria les évêques d’anathématiser ceux qui voudraient en user.
Le 15 Mars 1128, le prince et Ermengarde assistaient à la restitution, faite à l’abbaye de Roncerai d’Angers, de l’église de saint Cyr, usurpée par des prêtres mariés qui en avaient fait leur héritage.
En 1129, Conan accompagna sa mère à Font-Evraud et fit une ample donation à cet établissement.
Ensuite la princesse reçut le voile de saint Bernard, abbé de Clairvaux, et se consacra à Dieu dans le nouvel institut des Cisterciens.
En 1131, Foulques, frère aîné d’Ermengarde, devenu roi de Jérusalem, attira sa sœur en Palestine. Elle commença une église et un couvent à Sichem, sur le puits de Jacob. Les ravages du vice-roi de Damas interrompirent ces travaux.
La duchesse était de retour, le 28 Juin 1135, lorsque son fils Conan fit la première fondation de Buzai, en donnant à Clairvaux l’île de Caberon. Des guerres obligèrent le duc à reprendre une partie de sa donation ; mais bientôt sa mère le décida même à l’augmenter considérablement. Elle l’avait déjà fait accroître la donation de l’église bâtie sur une tour de la ville de Rennes.
Elle se trouvait encore à Nantes, le 5 Novembre de la même année, et elle porta sans doute son fils à rendre à l’évêque de cette ville plusieurs églises dont il avait disposé sans la participation du prélat.
Conan III était mécontent de Mathilde, son épouse ; mais, sur les remontrances de sa mère, il garda des ménagements. Ce ne fut qu’après la mort d’Ermengarde qu’éclatèrent ses ressentiments.
On dit à Redon que la duchesse douairière s’y retira sur la fin de sa vie, avec des femmes qui avait aussi renoncé au monde. Elle y mourut, le 1er Juin 1148.