Ar Gedour, hors certains articles spécifiques (histoire, culture qui nécessitent des positionnements de la part des rédacteurs concernés) ne donne pas dans la politique. Toutefois, nous relayons ici cet article qui pose une véritable problématique quand à la transmission du patrimoine, la vitalité économique de nos communes et la volonté de développement durable de la part de nos édiles. La question de cet article est à mettre en perspective avec la mort lente mais sûre de nos bourgs au profit des mégapoles, que ce soit par le déracinement des noms, l’abandon de la langue, le manque de soutien aux entreprises innovantes souvent par un manque de clairvoyance sur l’économie et les marchés du futur qui vont de pair avec la sauvegarde du patrimoine matériel et immatériel de Bretagne, segment sur lequel la Bretagne se doit d’être en pointe.
François Sénéchal, 75 ans, maire de Camaret, est-il fâché contre l’emploi des jeunes et veut-il vraiment la réussite de sa commune ?
Elu en 2014, le maire a soldé l’existence d’une entreprise qui promettait la création de 15 emplois pour sa petite ville. Sa fermeture rocambolesque avait précipité la faillite du dernier chantier de construction navale camaretois, provoquant quelques mois plus tard des conséquences dramatiques.
Dans le même registre économique, nous apprenons qu’il a pris une nouvelle décision difficile à comprendre. D’autant plus étonnante, qu’étant également vice-président en charge de la vie économique à la communauté des communes de Crozon, il doit, dans le même temps, essuyer quelques fermetures, mises en vente et dépôts de bilan de commerces locaux, sans que ne paraisse une quelconque réaction.
Dernier sujet en date, E-Mage-In 3D, jeune start-up du numérique en valorisation du patrimoine, installée à Camaret, dont les compétences, la croissance et les résultats, tout à fait remarquables, ont été mis en évidence, à plusieurs reprises, par la presse bretonne et nationale ces derniers mois.
Il faut savoir que cette entreprise a développé un certain nombre d’emplois en créant cette structure, alors même que le bassin économique local est quelque peu sinistré. L’entreprise E-Mage-In 3D a fait en 2013 le pari risqué de s’installer dans ce secteur, et peut se targuer d’être reconnue sur le marché international (y compris par un des leaders américains dans le domaine)… mais, manifestement, pas en presqu’île de Crozon.
En effet, dans le cadre d’un appel d’offre en vue de créer les aménagements scénographiques de la tour Vauban dans le cadre de sa restauration, la société E-Mage-IN 3D, implantée à quelques centaines de mètres du monument classé Unesco, n’a pas été sélectionnée par sa municipalité malgré un dossier technique plus abouti mais d’un écart de 8000 euros supérieur à l’offre nantaise concurrente (projet global proche de 110.000 euros).
Le principe de l’appel d’offre est clair, et le jeu a voulu que ne soit pas retenue la proposition de la société locale, qui développe des emplois locaux. Cependant, il est étonnant de voir le peu de cas qu’il est fait de l’investissement local pour de jeunes entrepreneurs amenés à développer les outils non seulement de demain, mais d’aujourd’hui, notamment pour valoriser le patrimoine culturel local et le transmettre aux générations futures.
Nos communes se meurent. Sur nos côtes, elles deviennent communes d’été pour résidents secondaires, axant les revenus sur le tourisme saisonnier. L’entreprise retenue pour cet appel d’offre est de Nantes (donc en Bretagne). Mais lorsque s’investissent durablement des jeunes passionnés qui se donnent sans compter pour le local, comment comprendre ce choix de rentabilité à court terme. Et encore… même à court terme, la question de rentabilité est discutable, puisque 8000 euros représentent environ 1% du budget global de l’opération Tour Vauban.
David Pliquet, directeur d’E-Mage-IN 3D, nous livre :
Cela correspond approximativement à 2 mois et demi d’achats divers dans les commerces locaux pour l’équipe de 6 personnes de E-Mage-IN 3D, parents de 10 jeunes enfants, dans un contexte où, comme partout, ce ne sont pas les anciens qui vont à l’école.
Alors même que sont actuellement mis en avant à de nombreux niveaux le « circuit court » et la « production locale », comment ne pas nous interroger sur de tels choix ?
En 2014, lors des élections municipales, François Sénéchal affirmait :
« Notre liste est très engagée dans l’associatif. Expérimentée dans la vie de la commune, elle associe jeunesse et sagesse, tradition et esprit d’entreprise, respect et concertation. Nous voulons développer le lien social, l’accès facile des concitoyens aux élus, dans la transparence des comptes et la maîtrise de la gestion communale. Nous avons à cœur de privilégier le bien vivre au quotidien et l’investissement à long terme. Nous devons préserver le patrimoine et la beauté de paysages en développant l’écotourisme. Notre rôle à la communauté de communes sera pleinement assumé pour défendre les intérêts de Camaret » (cf OF 24/01/2014)
La question de l’attribution du marché de la muséographie de la Tour Vauban à une entreprise nantaise au détriment d’une structure locale peut paraître une peccadille, sans doute. Mais dans la période actuelle, où l’on parle pourtant énormément de solidarité économique territoriale et de label « Produit en Bretagne », on peut se demander si ce n’est finalement pas qu’un discours de façade ou un renoncement de plus ?
Bien reçus au téléphone par Mme Tréhour, chargée de mission pour la tour Vauban, elle n’a cependant pas pu répondre à nos interrogations. Nous avons tenté de joindre le maire -par téléphone et par mail – mais nous sommes restés sans réponse au moment où nous publions cet article.