Nous avions déjà parlé du nouvel album d’Alan Stivell, AMZER. Nous nous demandions ce qu’il pourrait nous proposer, puisqu’il a le don parfois de nous déconcerter, explorant des sentiers nouveaux, expérimentant de nouvelles pistes musicales.
Son dernier opus est clairement une réussite. Via sa harpe égrenant les secondes d’un temps qui s’écoule lentement comme une source éternelle à travers les méandres des siècles, Alan propose un album qui s’enracine dans la tradition et n’est pas sans rappeler à la fois Trema’n Iniz, ou certains titres d’1 Douar et Explore) mais se projette aussi dans un avenir prometteur bien paisible qu’il souhaite offrir au monde.
Son sound-design (qui se retrouve aux avant-postes de Skilda ou de Denez Prigent) laisse sans voix à la première écoute, mais c’est justement ce qui fait l’originalité de l’album et de suite incite à une deuxième écoute permettant de plonger dans l’univers qu’il nous offre. Les musiciens sont ici les peintres de paysages dont ils posent peu à peu les couleurs du temps, des bourrasques d’hiver aux feuilles d’automne qui s’envolent vers une mort dorée, des jeunes pousses sous le soleil de printemps aux cristaux de glace qui s’installent puis s’effacent, comme dans le titre Kala-Goañv (Calendes d’Hiver) et Kerzu (Décembre) : on y est saisi par une musique qui donne vie au givre se déposant doucement sur la terre d’Armorique et où l’horloge transie continue lentement sa course à travers le temps. La glace se forme au son des haïkus britto-japonais, des machines et des instruments plus traditionnels. On perçoit aisément le Menez Are au brouillard épais des soirs d’hiver, tandis qu’Alan évolue sur le thème « Peh trouz war an Douar » (Quel bruit sur la terre, cantique breton de Noël), comme un clin d’oeil au répertoire de son enfance. Mais le printemps est proche et fleurissent alors les chants des oiseaux et les fleurs qui éclosent qu’illustre à merveille la harpe aux cordes enchantées.
Un album à découvrir absolument à partir du 2 octobre et à écouter lors des longues nuits d’hiver alors que s’échapperont de nos cheminées les flammes revigorantes.
Eflamm Caouissin
Vous transcrivez exactement ce que j’ai ressenti et votre texte est vraiment bien écrit ! Certainement ce que j’ai lu de plus sérieux sur cet album d’ Alan Stivell. Merci pour ce texte.