Qu’est-ce que veut alors nous dire la fête de l’Ascension du Seigneur? Elle ne veut pas nous dire que le Seigneur s’en est allé dans un lieu éloigné des hommes et du monde.
L’Ascension du Christ n’est pas un voyage dans l’espace, vers les astres les plus lointains; car, au fond, les astres sont eux aussi faits d’éléments physiques comme la terre.
L’Ascension du Christ signifie qu’Il n’appartient plus au monde de la corruption et de la mort qui conditionne notre vie. Elle signifie qu’Il appartient totalement à Dieu . Lui — le Fils éternel — a conduit notre condition humaine aux côtés de Dieu, il a apporté avec lui la chair et le sang sous une forme transfigurée.
L’homme trouve une place en Dieu; à travers le Christ l’être humain a été conduit jusqu’à l’intérieur de la vie même de Dieu. Et, étant donné que Dieu embrasse et soutient l’univers tout entier, l’Ascension du Seigneur signifie que le Christ ne s’est pas éloigné de nous, mais que maintenant, grâce à Sa présence auprès du Père, il est proche de chacun de nous, pour toujours.
Chacun de nous peut le tutoyer; chacun peut l’appeler. Le Seigneur se trouve toujours à portée de voix. Nous pouvons nous éloigner de Lui intérieurement. Nous pouvons Lui tourner le dos. Mais Il nous attend toujours, et Il est toujours proche de nous.
(Benoît XVI, 2005)
Alors la question est : s’il n’est pas monté au ciel (sous une forme corporelle différente, qui sera la nôtre à la fin des temps), qu’est devenu Son corps ? Oui, où est le corps de Jésus ?
Pour les juifs, la réponse ne fait aucun doute : Yeshu, comme tous les condamnés à mort, a fini par aller pourrir dans une fosse commune.
Est-ce la réponse de l’Église ?
Petite subtilité sémantique (en breton):
. ciel physique: an oabl
. ciel spirituel: an neñv ou an Neñv. Au pluriel (Cieux) : an Neñvoù
La langue bretonne, et elle n’est évidemment pas la seule langue à opérer ainsi, effectue dans son vocabulaire la distinction entre le monde décrit par la science et accessible aux sens (notamment la vue), et cette autre réalité, plus profonde, spirituelle, qui ne relève ni de la matière ni du psychisme.
@Raoul.
Mon conseil: si vous avez le contact avec des Juifs, c’est une chance, essayez de le maintenir. Vous pouvez vous rapprocher de milieux chrétiens (par exemple l’AJCF, présente en milieu catholique mais aussi protestant) qui s’intéressent aux rapports inter-religieux. Depuis le concile Vatican II (1964), de nombreuses associations ou initiatives permettent de se côtoyer, d’échanger.
Même si les points-de-vue diffèrent sur Jésus, la connaissance mutuelle à travers des relations personnelles est précieuse. Ne pas oublier que Chrétiens et Juifs partagent la Bible hébraïque (ou Ancien Testament), qui relate la très lente découverte de la condition humaine dans son rapport à la divinité (l’Eternel, en français courant).
Puisque nous sommes sur un blog breton, Mgr d’Ornellas, aujourd’hui archevêque de Rennes (et ancien évêque adjoint auprès de feu le Cardinal de Paris: Jean-Marie Aaron Lustiger), a co-écrit un livre qui peut intéresser de nombreux lecteurs d’Ar Gedour :
Juifs et Chrétiens, frères à l’évidence : la paix des religions (Odile Jacob, 2015) Pierre d’Ornellas et Jean-François Bensahel.
Les choses s’éclairciront à mesure que vous les approfondirez. C’est un chemin d’aventure et de maturité. Un hent a avañtur eo a c’hellit mont gantañ.
@ Kernevad
Je prends acte de votre commentaire, mais je note que vous ne répondez pas à ma question : si Jésus n’est pas monté au Ciel, où est son corps ?
Serait-ce que vous croyez, vous aussi, à l’instar des protestants, que le récit de l’Ascension n’est qu’ »une histoire pour dire que… » ? Oh, une chose très spirituelle, bien sûr — autrement dit, une fable.
Décidément, Bultmann a fait des petits…
Et, pour ce qui concerne les juifs, je me permets de vous donner à mon tour un conseil (mon âge, je crois, 74 ans, m’y autorise) : celui de lire le livre — dont personne en France, à ma connaissance, n’a jamais parlé — du Prof. Peter Schäfer, « Jesus in the Talmud » (Princeton University Press, 2007, 210 pages).
Le Prof. Peter Schafer, juif allemand, a longtemps dirigé le départements des Études juives de l’Université de Princeton, c’est un spécialiste universellement reconnu de la littérature talmudique. Après son séjour à Princeton, il a été, jusqu’à tout récemment, directeur du Musée juif de Berlin. C’est donc une autorité particulièrement respectée et écoutée dans son domaine.
Dans son livre « Jesus in the Talmud » il rapporte, de façon systématique, et en se fondant sur les meilleurs manuscrits de la tradition juive, y compris ceux de la Bibliothèque Vaticane, tout ce que les deux Talmuds (celui de Jérusalem et celui de Babylone) affirment de Jésus, de sa Mère, des Apôtres, etc.
Dans le chapitre 8, « Jesus’ Punishment in Hell » (La Punition de Jésus dans l’Enfer), il cite les textes expliquant pourquoi Jésus a été justement condamné à mort (sorcier, menteur, séducteur, bâtard, fils d’une débauchée, rebelle à l’enseignement des rabbins, etc.), et, notamment, un passage du traité Gittin, f. 56a, du Talmud de Babylone, où est rapportée une conversation entre un certain Onqelos et Jésus…
Onqelos est un personnage qui s’adonne à la nécromancie (au spiritisme, si vous préférez) et qui, un beau jour, cite devant lui l’âme de Jésus et lui demande — je cite en anglais : « What is your punishment [in hell] ? (Quelle est ta punition dans l’enfer ?). Et Jésus lui répond : « With boiling excrement ». Autrement dit, en bon français d’aujourd’hui : « Dans de la merde bouillante ». Voir p. 85 dudit livre.
Eh bien, on peut se demander si cette question d’Onqelos et si cette réponse de Jésus — que l’on voit rarement citées, vous en conviendrez, dans les colloques à l’eau de rose entre juifs et chrétiens, mais que le Prof. Schäfer a, lui, le courage de rappeler et de commenter — n’expliquent pas 2000 ans de relations entre juifs et chrétiens…
Question et réponse qui concentrent, pour ainsi dire, tout ce que le judaïsme talmudique ou rabbinique, bien différent de l’hébraïsme biblique (et même son contraire), a toujours souhaité, et sans aucune circonlocution, au christianisme : qu’il bouillisse dans la merde…
Et si le Talmud ne vous suffit pas, lisez Maïmonide…
Le même Peter Schäfer, quand il était directeur, je l’ai dit, du Musée juif de Berlin, a aussi publié, avec les meilleurs spécialistes juifs de la question, une édition scientifique des “Toledot Yeshu”, ou “Histoires de Yeshu” (Tübingen : Mohr Siebeck, 2011), ce livre abominable qui réunit, en quelques dizaines de pages, tout ce que les rabbins dès les 2ème et 3ème siècles ont écrit de plus répugnant sur Jésus et sa sainte Mère.
Il y a quelques années, un exemplaire manuscrit ancien des “Toledot” fut mis en vente à Jérusalem ; il était accompagné de la recommandation, par le copiste, de tout faire pour que ce livre ne tombe jamais entre les mains de chrétiens…
Dites-moi, cher Kernevad, pourquoi les personnes dont vous me parlez ne parlent jamais, elles, de ces textes ?
Est-ce qu’il n’y a pas quelque chose de louche là-dessous ?
Je précise, pour terminer, que le Prof. Schäfer n’a rien d’un fanatique. Il expose tout simplement la vérité du judaïsme, et ce que celui-ci affirme, depuis 2000 ans, de la nature détestable (pour ne pas dire “excrémentielle”) du christianisme. Une vérité bien exprimée dans une émission récente de la TV israélienne destinée à des enfants, où l’on pouvait voir une jeune présentatrice en bikini crucifier, avec un marteau et des clous, un singe en peluche qu’elle nommait Yeshu et qui clamait, de la façon la plus grotesque, son innocence…
C’est curieux, la réponse, assez sotte, de Kernevad à mon premier commentaire, a disparu, et il n’y a plus, pour l’instant, que mes deux commentaires, avant et après le sien, sous le titre “Pas de commentaire” (!), et qui sont désormais précédés, l’un et l’autre, de “Votre commentaire est en attente de validation” (ce qui veut sans doute dire “en attente d’effacement”), alors qu’ils ont été validés et publiés il y a, respectivement, quatre et deux jours… Quel micmac ! (Le Petit Larousse définit le mot “micmac”, une “intrigue secrète et obscure”… Il doit avoir raison.)
N’avais-je pas raison, moi aussi, de demander, dans ma réponse audit Kernevad : « Est-ce qu’il n’y a pas quelque chose de louche là-dessous ? » (J’entendais : dans ces frotti-frotta christiano-talmudiques, passablement nauséabonds (et pour cause) ; c’est pourquoi je les qualifiais, par antiphrase, de « colloques à l’eau de rose », une eau de rose bien nécessaire, en l’occurence.)
Voici ce qu’est devenue la réponse de Kernevad :
Ça doit être du néo-breton… En tout cas, ça ne peut pas être, je pense, la réponse de l’Église. De la vraie Église. A laquelle je ne demande d’ailleurs pas de me répondre en latin, ni en breton, mais, au moins, en bon français.
Ou c’est peut-être que l’ordinateur, étourdi par mes deux questions, est allé boire un coup de chouchen pour se remonter… Possible…
N’importe, moi pas comprendre.
Pour conclure : Serait-ce que le Kernevad (le “cornouailler”, ou la “cornouille”, en breton) s’est rendu compte qu’il avait fait un… pas de clerc ? Pas très courageux, le grand conseiller, en tout cas. Un peu vert, un peu jeunot. Manquant de maturité. Et parlez-nous, après ça, de l’abbé Perrot et de dom Alexis Presse ! Une autre race d’hommes, vous ne trouvez pas ?
Coucou, je reviens…
.1 au lieu de « Mon conseil », lire « Mont point de vue », ce qui correspond mieux à ma pensée. Par ailleurs, sur un forum internet, un post s’adresse à l’ensemble du lectorat, silencieux et inconnu, même s’il prend le format d’une réponse singulière, ou prend prétexte d’une question singulière.
.2 avant d’aller plus loin, il faut préciser quelque chose qui aujourd’hui est loin d’être compris, notamment par les générations qui sont nées très loin des repères de la Foi chrétienne.
. le Christianisme n’est pas l’invention bizarre de quelques esprits antiques, qui auraient construit un récit curieux. Il n’est pas le résultat d’une « secte qui aurait réussi », comme on le lit parfois sous des plumes d’apparence savante, mais ignorantes.
. le Christianisme est la conséquence d’un événement historique, passé quasiment inaperçu au regard de la grande chronique de l’Histoire impériale romaine: l’événement christique ou vie de Jésus/Yeshwa (naissance au plus tard en -4, à Bethléem, condamnation à mort…en +30, à Jérusalem). Tout ceci est documenté notamment dans les récits évangéliques, certainement les écrits les plus étudiés (y compris au plan de la critique historique) de toute la littérature mondiale.
Il faut souligner ici que la Foi chrétienne, celle des premiers témoins directs qui a fait tâche d’huile, précède les témoignages organisés d’abord dans un contexte et une culture de l’oralité (ce qui en assure la sécurité, lire à ce sujet Pierre Perrier) en langue araméenne, puis très vite – en quelques décennies – fixés à l’écrit en langue grecque. Les Evangiles sont donc une conséquence de la Foi vers ses débuts, ils sont des outils d’explicitation et de transmission. Dit autrement, historiquement, la Foi est préalable à nos Evangiles, elle est à l’origine de ces écrits. Et pas l’inverse. On l’oublie parfois.
.3 le post initial, qui a provoqué un début de réponse de ma part, abordait deux points relativement à l’Ascension :
.3.1 le point de vue des Juifs ou du Judaïsme
.3.2 le contenu de la Foi chrétienne – défendu en particulier par l’Eglise catholique à l’Occident, ou par les Eglises orthodoxes à l’Orient – avec cette question : où est le corps de Jésus ? [Que dit] l’Eglise ?
Voici donc un complément à mon premier post. Quant au deuxième point (3.2), la réponse se trouve explicitement dans la liturgie du jeudi de l’Ascension. Voir la première lecture Actes des Apôtres 1,11 :
« Après ces paroles, tandis que les Apôtres le regardaient, il s’éleva, et une nuée vint le soustraire à leurs yeux » (traduction liturgie catholique)
« A ces mots, sous leurs yeux, il s’éleva et une nuée vint le soustraire à leurs regards (traduction TOB / Traduction Oecuménique de la Bible)
« Hag o vezañ lavaret an traou-se, tra ma oant o sellout, e voe savet d’an nec’h, hag ur goabrenn en degemeras d’e guzhat d’o daoulagad. » (Lec’hvien, Ar Bibl troet e brezhoneg, Penkermin, 2018)
« War gement-se e oe dibradet en êr dirag o daoulagad hag et teuas eur goabrenn da guzad anezañ ouz o daoulagad » (Leor overenn, Eskopti Kemper ha Leon, Minihi Levenez, 1997)
Ceci n’est qu’un exemple, car l’ensemble des écrits néo-testamentaires convergent en ce sens. La Foi chrétienne est d’une extraordinaire cohérence. Elle est aussi d’une simplicité admirable, et si elle nous porte parfois aux portes du mystère (encore convient-il de déployer son intelligence au maximum avant de parler de mystère), c’est que la pleine réalité nous est encore partiellement voilée. Ici commence la confiance.
La Foi chrétienne offre à tout homme, quelle que soit sa culture d’appartenance, son continent d’enracinement, aujourd’hui comme naguère ou demain, un éclairage et une mise en perspective de la condition humaine, une feuille de route plus aboutie ou plus précise qu’aucune autre si l’on veut bien prendre la peine de la considérer attentivement.
Encore un mot à propos de la littérature juive (targoumim, midrashim) autour de la Torah : on pourra consulter l’excellent et récent « La Torah commentée pour notre temps » (sous la direction éditoriale du rabbin Pauline Bebe, Le Passeur, 2020, traduction d’un ouvrage américain édité en 1990)
Hag evit echuiñ : piv on-me ? Un den laik ha traken !