Chroniques bretonnes en pays vannetais (7) : Robert Le Masson, pour moins que rien

Amzer-lenn / Temps de lecture : 6 min

Les chroniques publiées de Glenn Gouthe sont initialement publiées sur sa page Facebook et reprises avec son autorisation sur Ar Gedour.

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Kronikennoù Breizh e Bro-Gwened 7 : Roperzh Ar Mason, evit ket ha netra

Ha pa skriver e brezhoneg hiniv-an-deiz, alies e soñjer en ur rezishkrivadur hepken, ar peurunvan. Na bout e c’hell aesaat an dre skrid evit ar re a zeska da skouer pe evit gellet lenn pep lennegezh e Breizh a-bezh, n’eo ket disi èl an holl reizhskrivadur er bed pe dost. Ar Wenedourion o doa komprenet an afer-se abaoe pell dre mand eo ar peurunvan diazezet àr ar skritur unvan anvet ivez ar skritur C’HLT. Ar reizhskrivadur zo un ostilh aes d’ober getañ mes a c’hell lakaat an implijerion àr un hent fall. Distagadur an deskerion ha n’o deus ket klevet distagadur ar vrezhonegerion ampart a c’hell bout levezonet hag ar brezhonegerion a-vihanik a c’hell bout trubuilhet get ur c’hod nevez da zirouestliñ. Maleürusamant eo lod ur yezh a ya àr ziskar. Mes un dra ispisial neoazh, ar peurunvan en deus gouarnet ur plas evit ar gwenedeg en ur lakaat dibarderioù ennañ ha roiñ ur liv gwenedekoc’h da aesaat e zegemer get an holl. Roperzh Ar Mason a oa e-mesk ar re getañ da ober al labour-se.

Ganet en Oriant e 1900, desket en deus ar brezhoneg diwezhat. Tremen a ra e vuhez er Morlu betek tapout ar grad a gabiten lestr hag e-pad an amzer-se en em spluj e-barzh yezh e vro. Kemer a ra perzh e-barzh kelaouennoù disheñvel « Dihunamb », « Gwalarn », « Arvor », « Kened », « Al Liamm »… Hag embann a ra enne barzhonegoù mes ivez pennadoù sevenadurel ha soñjoù pe c’hoazh pezhioù-c’hoari. Un oberenn lennegel diachu a laoska neuze goude e varv e 1952. Treuzkas a ra neoazh div oberenn veur.

An hini gentañ, « Chal ha Dichal » a zo ur levr barzhonegoù embannet e 1943, skrivet e gwenedeg kozh ha skeudennaouet get Zavier Langleiz. An temoù implijet a zo liammet get e soñjoù hag e garantezioù, ar relijion katolik, ar mor, ar pardonioù, Breizh… skrivet get ur yezh prederiet en ur implij ur c’heriaoueg heverk, klasket ha n’eo ket mui implijet kalz. Embann a ra ur c’heriaoueg etre al lodennoù skrivet e brezhoneg hag e galleg « Girieu nen dint ket anaùet get en ol ». Adkavout a reer ur barzhoneg é komz d’e vamm diàr-benn e yaouankiz e Kervoial, unan arall diàr-benn ar Sikarned, pe c’hoazh « En aber goué » a zeskriv e fromadennoù beaj e-barzh broioù tost pe pell.

 

An eil, « Evit ket ha netra » a zo ur romant rannet e div lodenn. « Karantez didalvez » hag « Emgann didalvez ». Damawenet get e eñvorennoù, kontiñ a ra istor Fant, he c’harantez evit Herri mes ivez evit Breizh hag e vez dizoloet geti a-hed ar romant. Skrivet e peurunvan gwenedeg, santout a reer kreñvder fromadenn ar skrivagnour evit e eñvorennoù bugaleaj e Damgan kement hag ar prantad treuzet get an Emsav en Dieubidigezh.

 

Erfin, siniñ a ra ur levrig « Le vannetais unifié » nepell àr-lerc’h votadeg ar peurunvan e-menn e tiskoue an tu d’ar Wenedourion da skriviñ get ur rezishkrivadur tostoc’h doc’h o distagadur. Ar reizhskrivadur a vez implijet hiniv-an-deiz get ar skrivagnerion a Vro-Gwened. Laoskel a ra neuze Roperzh Ar Mason un oberenn ha n’eo ket « evit ket ha netra ».

Chroniques bretonnes en pays vannetais 7 : Robert Le Masson, pour moins que rien

Lorsque l’on rédige aujourd’hui en breton, il vient souvent à l’esprit une orthographe unique, celle du « Peurunvan ». Bien qu’elle permette une facilité d’utilisation à l’écrit notamment pour l’apprentissage et d’intercompréhension entre les littératures de toute la Bretagne, elle n’est pas exempte de défauts comme à peu près tous les système orthographiques du monde. Et cela, les Vannetais l’avaient bien compris depuis longtemps, le peurunvan étant principalement basé sur l’écriture unifiée dite KLT. L’orthographe est un outil pratique mais pouvant avoir l’effet pervers d’influencer la prononciation d’apprenants n’ayant pas entendu la prononciation de locuteurs aguerris et dérouter ces derniers confronter à un nouveau code et donc à un nouveau décodage. Et c’est en partie malheureusement le cas lorsque la langue en question est en déclin. Mais élément pour le moins particulier, le peurunvan a laissé une place au dialecte vannetais en incorporant des formes particulières pour ainsi lui donner une couleur plus vannetaise et en faciliter l’adoption par tous. Et Robert Le Mason fut l’un des premiers à faire ce travail.

Né à Lorient en 1900, il apprit le breton sur le tard. Alors qu’il mène une carrière importante dans la Marine jusqu’à atteindre le grade de Capitaine de Vaisseau, il se prend de passion pour la langue de son pays. Il participe aux différentes revues « Dihunamb », « Gwalarn », « Arvor », « Kened », « Al Liamm »… Et y publie des poésies mais aussi des articles culturels et d’opinions ou encore des pièces de théâtre. C’est une œuvre littéraire inachevée qu’il laisse après sa mort en 1952. Il transmet cependant deux œuvres majeures.

La première, « Chal ha Dichal / Flux et Reflux », est un recueil de poèmes publié en 1943, rédigé en graphie vannetaise ancienne et illustré par Xavier de Langlais. Les thèmes développés sont le reflet de ses convictions et passions, la religion catholique, la mer, les Pardons, la Bretagne… le tout dans une langue recherchée, utilisant un vocabulaire spécifique, fouillé parfois peu ou plus usité. Il place d’ailleurs un glossaire entre la partie rédigée en breton et celle en français « Girieu nen dint ket anaùet get en ol / Mots qui ne sont pas connus par tous ». On y retrouve un poème parlant à sa mère de sa jeunesse à Kervoyal, un autre parlant des Gens de Quiberon, les « Sicarnes », ou bien encore « Le fjord sauvage » relatant ses impressions de voyages dans des contrées proches ou lointaines.

La deuxième, « Evit ket ha netra / Pour moins que rien », est un roman en deux parties : «Karantez didalvez / Amour inutile » et « Emgann didalvez / Bataille inutile » En partie inspiré de ses propres souvenirs, l’histoire suit Fant, son histoire d’amour pour Herri mais aussi pour la Bretagne qu’elle découvre au fil du roman. Ecrit un peurunvan vannetais, on ressent la force de l’émotion de l’auteur aussi bien pour ses souvenirs d’enfance à Damgan que la période traversée par le mouvement breton à la Libération.

Enfin, il signe un petit opuscule « Le vannetais unifié » peu de temps après l’adoption du peurunvan où il présente les possibilités pour les Vannetais de rédiger dans une orthographe plus proche de leur prononciation. Orthographe que les écrivains bretons vannetais utilisent volontiers aujourd’hui. Robert Le Masson laisse ainsi une œuvre loin d’être « pour moins que rien ».

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À propos du rédacteur Glenn Gouthe

Professeur certifié à temps plein en breton et éducation musicale en breton, doctorant au sein du Centre de Recherche Bretonne et Celtique, Glenn Gouthe propose ses chroniques sur sa page Facebook. Elles sont reprises sur Ar Gedour avec son aimable autorisation.

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