La Croix pectorale de Monseigneur Duparc

Amzer-lenn / Temps de lecture : 4 min

Denis Diderot l’expliquait parfaitement aux termes de son « paradoxe du comédien » soulignant l’importance du costume et dans celui-ci, le rôle du détail qui signe le personnage….

Le procureur près la Sénéchaussée d’Hennebont avait ainsi, à l’occasion du spectacle donné pour le demi millénaire de la basilique sur « François Michard, héritier et bâtisseur », hérité de la faluche d’étudiant en droit à Poitiers du père d’un de ses camarades de jeu, fier sujet de l’Ordre du Bitard (LST)

Le futur cardinal de Bérulle, directeur spirituel de Vincent de Paul, portait en sautoir dans le spectacle qui vient de se donner à l’église saint Louis de Lorient sur « l’apôtre des pauvres » une magnifique croix pectorale qui n’était pas un simple accessoire de théâtre.
Elle est ornée en son centre du chrisme, c’est-à-dire des deux lettres grecques X (ki) et P (rô) qui sont les deux premières lettres du nom : « Christ » qui signifie « oint » dont est qualifié Jésus de Nazareth. Le chrisme est lui-même encadré de deux autres lettres grecques : l’alpha et l’ôméga, première et dernière lettre de l’alphabet grec qui en compte 24, signifiant ainsi que Jésus-Christ est à la fois au début et à la fin de tout.

A Chaque extrémité des bras de la croix un petit médaillon festonné avec en haut Sainte Anne avec la petite Marie qui montre le ciel de son doigt levé, en bas, le roi de France Louis IX, Saint Louis, avec son sceptre fleurdelisé et la couronne d’épines, précieuse relique de la passion du Christ qu’il tient respectueusement de sa main couverte d’un linge. A gauche, Saint Yves avec son bonnet carré de juriste et à droite, un saint évêque mitré et crossé portant auréole, pallium, cette sorte de cache-col en laine blanche et un livre sacré. Il s’agit certainement d’un des sept saints évêques fondateurs de notre Bretagne mais que je n’ai pas pu identifier plus précisément.

Cette croix m’avait été confiée comme étant celle de Mgr Boussard, le pénultième prédécesseur de Mgr Centène, actuel évêque de Vannes.
Pierre Auguste Boussard est né à Plogonnec entre Quimper et Locronan dans le Finistère en 1917, ordonné prêtre en 1947, il a été évêque de Vannes de 1964 à 1991, il est mort à Quimperlé en 1997.

Mgr Duparc

Mais l’envers de cette croix comporte en son milieu les armoiries de Monseigneur Yves Marie Adolphe Duparc, né à Lorient en 1857, ordonné en 1880, curé archiprêtre de Saint Louis, Notre Dame de la Victoire (contre les anglais) à Lorient, il a été nommé évêque de Quimper-Léon en 1909 et y est décédé en fonction, en 1946.

Ses armoiries rassemblent, sous les hermines de Bretagne, en chef, à gauche (sinistre) sur fond d’azur, le mouton passant d’argent, onglé d’or qui est de Quimper et à droite (dextre), sur fond d’or, le lion morné de sable, c’est-à-dire noir, qui est de Léon, tenant une crosse de gueule, c’est-à-dire rouge, pour Saint Pol.

Contrairement à celui de Flandre, le lion du Léon n’a ni griffes, ni langue, ni dents, c’est pourquoi il est dit « morné », entendez « mort-né » ! Signe d’infamie, conséquence fâcheuse d’un revers de fortune local cumulée avec l’esprit vicieux d’un suzerain vainqueur voulant humilier à tout prix son pauvre vassal vaincu ….

La devise de Mgr Duparc est, en breton que je ne vous ferai pas l’injure de traduire : « Meulet ra vezo, Jézuz Krist ! » ce qui nous ramène au Bitard pictave (loué soit il).

On sait que la devise du double diocèse de Quimper et de Léon, qui doit, dans son administration, ménager la chèvre et le chou, le nord avec le sud est « dre nerz ha douster » … douceur et vigueur, tout un programme.

Demain, je remettrai cette belle croix pectorale à qui me l’a confiée tout en gardant précieux le souvenir de ceux qui l’ont portée avant moi, particulièrement Mgr Duparc pour qui elle a été confectionnée, vraisemblablement cadeau de ses anciens paroissiens de saint Louis de Lorient, la paroisse où vient de se donner le spectacle sur saint Vincent de Paul, l’apôtre des pauvres, où figure entre autres le futur cardinal de Bérulle.

À propos du rédacteur Yves Daniel

Avocat honoraire, il propose des billets allant du culturel au théologique. Le style envolé et sincère d'Yves Daniel donne une dynamique à ses écrits, de Saint Yves au Tro Breiz, en passant par des chroniques ponctuelles.

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Un commentaire

  1. merci pour tous ces détails de l’Histoire !

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