Donnons la fierté de notre Bretagne !

Amzer-lenn / Temps de lecture : 3 min

« Ne serait-il pas urgent de faire prendre conscience à nos compatriotes (bretons) de ces beautés qu’on ne leur a appris à voir ni à aimer ? Ils sont sur ce point d’une ignorance stupéfiante. Encore, si ce n’était qu’ignorance ! Mais comme bon gré mal gré notre Bretagne les marque indélébilement, surtout qu’ils ont appris sa langue, cela détermine chez eux un complexe d’infériorité aux conséquences désastreuses, du simple point de vue humain déjà, mais spécialement sur le terrain de la Foi.

[…]

Sur le plan de la Foi -où les ravages ne sont pas encore assez connus – il n’est pas question d’interpréter le « Brezoneg ha feiz, zo breur ha hoér é Breiz », dans le sens qu’il suffirait de travailler à la conservation et au développement de la langue bretonne pour maintenir et faire refleurir la Foi chez nous ! C’est un dicton ; ce n’est pas un principe. Mais le fait qu’il énonce se vérifie dans une portion de la Bretagne plus étendue qu’on ne se l’imagine souvent. Et dans ces paroisses, le maintien de la langue bretonne avec toute la mentalités et les traditions foncièrement chrétiennes dont elle est le rempart, est l’une des conditions les plus favorables au maintien de la foi. Si cela disparait, il faudra des décades et des décades pour tout refaire à neuf. 

Or parce qu’on en ignore la valeur, cela disparaît. Voyons ce qui se passe chez le Breton « déraciné ». Dans sa vie – sans qu’il en eut peut-être conscience, et c’est dommage – profane et religieux étaient parfaitement unifiés ; sa religion faisait corps avec toute sa vie. Et voici que, sous les coups des sarcasmes, il commence à rougir des traditions et des coutumes de sa petite patrie : il lui faudrait alors un pouvoir d’analyse ou un esprit de foi peu communs pour démêler ce qui n’est qu’habitude humaine et ce qui est exigence de sa Foi. Tout croule… 

Donnons donc la fierté de nos richesses locales, sans exclusivité, mais nettement. Et, si l’on peut tout apprendre à des écoliers qui quittent la classe à treize ou quatorze ans, n’oublions tout de même pas de leur donner connaissance de ce qui les touche de plus près. Dans une école, d’une localité au surplus proche de Sainte Anne d’Auray, les enfants ignoraient jusqu’au nom de Nikolazic. Est-ce normal ? 

Nous payons cher la liberté de nos écoles chrétiennes – et cependant elles demeurent sous la dépendance des programmes officiels. Sans vouloir parler ici des autres questions, qu’il soit du moins permis de souhaiter que nos jeunes compatriotes sachent un peu mieux ce qu’ils sont, et, lorsqu’ils savent déjà la langue bretonne, soient capables de la lire… Peut-être alors ne rougiraient-ils pas d’eux-mêmes, et seraient-ils par surcroît plus fidèles à leur Foi. » 

C’était dans le mensuel Bro Guened N°2 de décembre 1950. Que dire, si ce n’est que cela n’a certainement pas perdu de son actualité…

À propos du rédacteur Eflamm Caouissin

Marié et père de 5 enfants, Eflamm Caouissin est impliqué dans la vie du diocèse de Vannes au niveau de la Pastorale du breton. Tout en approfondissant son bagage théologique par plusieurs années d’études, il s’est mis au service de l’Eglise en devenant aumônier. Il est le fondateur du site et de l'association Ar Gedour et assure la fonction bénévole de directeur de publication. Il anime aussi le site Kan Iliz (promotion du cantique breton). Après avoir co-écrit dans le roman Havana Café, il a publié en 2022 son premier roman "CANNTAIREACHD". En 2024, il a également publié avec René Le Honzec la BD "L'histoire du Pèlerinage Militaire International".

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