Nicolas Graignic propose aujourd’hui une nouvelle vidéo dans sa série « Istoérioù Breizh », avec un personnage atypique et mystérieux de l’histoire de Bretagne, Eon de l’Estoile. Ce clip intéressant vous fait découvrir quelqu’un que vous n’auriez sans doute pas connu par d’autres biais, personnage qui pourtant garnit un tableau de l’église Sainte-Onenne de Tréhorenteuc (Diocèse de Vannes).
Eon, d’après les historiens, était un gentilhomme issu d’une bonne famille (il se nommait Eudon et se faisait appeler Eon) des environs de Loudéac. Devenu moine, il s’est construit un ermitage dans la forêt de Brécilien, près du chateau du Rox, c’est de cet ermitage que « Les Rues Eon » tirent sans doute leur nom. Malheureusement notre ermite s’aperçut très vite que ce genre de vie n’était pas faite pour lui (certains disent qu’il avait perdu la raison). Il se mit alors à brigander et piller avec l’aide de compagnons enrôlés facilement dans les environs du fait de la grande misère qui régnait alors. Il s’installe alors avec sa troupe peu recommandable près de la fontaine de Barenton. De là, poussés par le diable, le groupe de malfrats s’en va piller les églises, monastères, châteaux et villages.
De retour à Barenton le groupe fait bombance,festins et orgies se répètent. On décrit alors Eon revêtu de riches vêtements sacerdotaux volés dans les églises, menant une vie de prince (l’image de lui la plus connue que vous pouvez d’ailleurs voir sur un vitrail de la chapelle de Trehorenteuc le montre ainsi).
Il se livre également à la magie, et entretient commerce avec les esprits maudits. Il opère des enchantements devant les yeux ébahis des gens simples des environs qui le prennent pour un grand sorcier. Il entretient auprès d’eux une illusion diabolique. Sa renommée de sorcier et de grand magicien se répand de plus en plus. On dit qu’il faisait apparaître nombre d’objets, des festins succulents…(on sait qu’il connaissait nombre de techniques d’illusionnisme). Les pratiques nocturnes et suspectes du Seigneur de l’Étoile à Barenton, troublent bien des esprits. Il remet en cause le dogme catholique. Il se prétend fils de Dieu et se donne pour mission de juger les vivants et les morts.Voilà donc Éon chef de secte. Le grand prêtre dit sa messe et sacre, pour sa secte, évêques et archevêques. Il donne à ses disciples des noms d’anges et d’apôtres. La secte s’étend de plus en plus et on trouve des Éonistes dans toute la Bretagne et même en Gascogne.L’hérésie d’Éon inquiète les autorités religieuses.
Mais hélas tout a une fin et, « trahi par le diable », dénoncé à l’évêque d’Aleth comme fanatique, Eon est arrêté en 1148 et conduit à Reims où le pape Eugène III tient concile. Devant le souverain pontife, le Breton brave les autorités religieuses. Il se réaffirme fils de Dieu, et tient à la main un bâton fourchu sur lequel sont tracées des figures cabalistiques.Éon s’en tire bien. On le déclare comme fou, et le pape lui fait grâce de la vie et des membres ; la noblesse de ses origines joue peut-être en sa faveur. Emprisonné, il ne tarde pas à mourir. En revanche, on traite avec moins d’égards ses disciples. Ne voulant se rétracter, une trentaine d’entre eux sont condamnés au bûcher. Et il s’ensuit une chasse aux Éoniens dans toute la Bretagne.
D’après : http://victor.rolland.free.fr/eon
En guise de conclusion, Nicolas Graignic évoque cette question de l’illusionnisme. Il est mentionné, cependant rapidement, qu’il était magicien, mais le doute reste : est-ce de la magie ou est-ce de l’illusionnisme dont se sert Eon de l’Estoile ?
Connu comme hérétique, ce personnage était très probablement non pas sorcier mais prestidigitateur, comme le précisent les travaux du professeur brestois Fañch Guillemin, illusionniste et historien de la magie. Dans son ouvrage « Magiciens d’Argoat et d’Armor – Editions Skol Vreizh), l’auteur dit ainsi que Eon faisait apparaître des mets et des boissons comme l’antique illusionniste grec Pasès -ou Pasetes- et des pièces d’or et des bijoux comme Pierre Brahma, un excellent magicien de notre temps.
Et effectivement, lorsqu’on lit par exemple l’Histoire de Bretagne d’Argentré, un illusionniste s’aperçoit aisément qu’Eon de l’Estoile connaissait et usait de certaines techniques d’illusionnisme pour asseoir sa position « messianique » auprès d’un public crédule, dans la ligne des techniques aussi utilisées notamment par les Egyptiens dans leurs temples. Les légendes ont pris le dessus au fil des siècles.