Les Pardons ont toujours la cote en Bretagne !

Amzer-lenn / Temps de lecture : 3 min
@Ar Gedour
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Lu sur le Télégramme de ce jour :

Avec ses 1.200 pardons, qui attirent -l’été particulièrement- nombre de fidèles et de curieux, la Bretagne est la grande championne de la catégorie. Et sans rivale car, dans les autres pays celtiques, ils ont quasi disparu. Pourquoi cet attachement viscéral des Bretons à ces rites d’un autre temps ? Réponses de Bernard Rio (*).

D’où viennent les pardons ?
À l’origine, le pardon est un ensemble de rites consacrant un lieu fondé par un saint. Ces saints sont venus en Bretagne d’Écosse, du Pays de Galles ou d’Irlande entre le Ve et le VIIe siècle. Ces rites, probablement pré-chrétiens, se perpétuent autour des chapelles sur la base des quatre éléments qui fondent la vie : l’eau, avec des ablutions aux fontaines ; le feu, avec l’embrasement du bûcher, le « tantad » (« feu père ») ; l’air, avec la procession et le salut des bannières ; la terre, avec une triple circumambulation autour du sanctuaire dans le sens solaire. Mais le pardon est aussi l’endroit où l’on vient se faire pardonner ses fautes et rechercher des « indulgences ». Les saints invoqués dans les pardons appartiennent au peuple. La plupart ne sont pas des martyrs, contrairement aux premiers saints de Rome, mais des gens du peuple, magiciens ou guérisseurs.

Pourquoi ont-ils résisté en Bretagne ?
Ils ont totalement disparu outre-Manche en raison du protestantisme qui a « fait le ménage ». Seuls subsistent quelques « patterns », en Irlande, comme le pèlerinage à Saint-Patrick. Là, c’est le catholicisme qui a supprimé les pardons au début XXe siècle. La Bretagne fait exception. Elle a, à la fois échappé au protestantisme au XVIIe siècle et aux diverses tentatives de l’église catholique de bannir ces rites « païens ». Lors de la « grande réforme » protestante, le clergé breton a lâché du lest. La meilleure façon de retenir ses ouailles, particulièrement les paysans, était de conserver leurs rites et croyances. Des pardons ont néanmoins disparu dans les années 60 après le Concile de Vatican 2 qui a voulu revenir aux origines du christianisme. Mais la plupart ont résisté malgré un certain désengagement du clergé. Et ce, notamment, parce que ce fort atavisme breton est aussi ancré sur la conservation du patrimoine.

Des Bretons attachés à leurs chapelles ?
Dans les années 60, le clergé a été pris à contre-pied par la création de nombreuses associations, regroupées au sein de Breiz Santel, qui ont sauvé nombre de chapelles de la ruine. Il en reste 6.000 et les Bretons, non contents de restaurer les murs, ont aussi maintenu les pardons, voire leur ont donné une nouvelle vigueur.

Les pardons ne sont-ils pas surannés ou folkloriques ?
Dans notre monde de consommation, de moins en moins sacré et spirituel, où la quête effrénée des biens matériels est censée conduire au bonheur, le pardon joue plus que jamais son rôle, dans le vieux sens du mot religion, « qui relie ». Les gens ont besoin de se retrouver. Or, le pardon est l’un des seuls événements qui réunit tout un village, au-delà des convictions et des classes. Il est plus que jamais porteur de modernité, dans son temps, qu’il soit traditionnel ou devenu celui des surfeurs, à Notre-Dame de Tronoën ou des motards, à Porcaro (56), forme moderne du pardon des chevaux d’hier. Il s’agit d’une communauté qui se retrouve pour une veillée liturgique, des concerts de rock, une grand-messe, la bénédiction des motos. C’est même devenu un des plus grands pardons bretons, au même titre que celui de Sainte-Anne-d’Auray. Mais quel qu’il soit, un pardon doit son succès à son caractère hybride : s’il n’est que fête profane, ce ne sera qu’une kermesse ; s’il n’est que religieux, ce ne sera qu’une messe.

 

* Auteur de « Sur les chemins des pardons et pèlerinages en Bretagne » (Le Passeur).

À propos du rédacteur Erwan Kermorvant

Erwan Kermorvant est père de famille. D'une plume acérée, il publie occasionnellement des articles sur Ar Gedour sur divers thèmes. Il assure aussi la veille rédactionnelle du blog et assure la mission de Community Manager du site.

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Un commentaire

  1. La dernière phrase est une heureuse formule…

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