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[LITURGIE] Quand l’Interceltique interpelle quant à la liturgie

Amzer-lenn / Temps de lecture : 5 min

interceltiqueNous reviendrons prochainement sur différents points du Festival Interceltique 2015 et notamment sur la Nuit Interceltique. Toutefois, nous publions ici un article que vient de diffuser le site ProLiturgia, avec l’aimable autorisation de l’auteur. Certains de nos lecteurs seront peut-être interloqués par cette publication, mais ayant nous-même assisté à la dernière Nuit Interceltique, nous avons pu constater non seulement qu’il y avait une réelle recherche de « communion » dans le public, assemblée occasionnelle d’une « grand’messe » celtique, et que tout était fait dans ce spectacle pour porter cette « assemblée ». Que de nombreuses références aux saints missionnaires, aux saints fondateurs, aux églises et croix celtiques érigées par ce christianisme celtique, alors même que les Eglises locales ont du mal à tenir compte de cet héritage et de cette culture propre qui a tant donné. Nous y reviendrons. Dans un premier temps, voici donc la réflexion liturgique proposée par le site ProLiturgia  : 

 

« Il y a quelques jours, j’ai regardé à la télévision le “Festival interceltique” qui s’est déroulé à Lorient.
La première idée qui m’est venue à l’esprit a été celle-ci : “Pourquoi n’exige-t-on pas de nos prêtres – surtout nos évêques – qu’ils célèbrent la liturgie avec la préparation, la tenue, la compétence et l’aptitude qu’on retrouve chez les membres – souvent amateurs – des divers groupes folkloriques et bagadou ?”
Imagine-t-on que le Festival de Lorient aurait le succès qu’il connaît si les organisateurs et les artistes faisaient preuve de cette négligence et de cette impréparation qu’on trouve si souvent chez nombre de ministres de l’autel ? Pourquoi trouve-t-on normal que les danseurs “ne s’emmêlent pas les pinceaux” quand ils font des claquettes, que les sonneurs de biniou et de bombardes ne fassent pas de “couacs”, que tout le monde ait de la tenue, que les costumes soient impeccables, que les airs soient sus par coeur… tandis qu’à l’église, à la messe, tout puisse être fait “à la va comme je te pousse” et dans une sorte d’improvisation permanente ajoutée à une laideur désormais bien installée ?

 

A une époque à laquelle chacun prend grand soin de sa propre tenue vestimentaire (surtout lors d’un entretien d’embauche), de la décoration de son logement, à une époque à laquelle tant d’argent est dépensé pour “dorloter” sa voiture ou chouchouter son anima de compagnie, pour nettoyer, décorer et embellir les espaces publics et les vitrines des magasins, à une époque à laquelle tant est fait pour rendre l’espace de la vie quotidienne plus beau et plus harmonieux, comment se fait-il que le seul domaine où lequel règne quasi-systématiquement le laisser-aller, la laideur et le mauvais goût soit justement celui dans lequel la beauté et la dignité devraient régner sans partage, à savoir, la sainte Liturgie ? Pourquoi consacrons-nous tant d’effort et de temps à nous occuper de ce qui est accessoire tandis que nous négligeons l’Essentiel ?

Sans même s’en rendre compte, un clergé inculte et mal préparé à assumer ses fonctions ministérielles, en célébrant des “messes-qui-font-pauvre” et ces liturgies indigentes, ne participe-t-il pas à cet état d’esprit général qui fait de la relation à Dieu et du culte qui lui est dû le cadet de nos soucis ?

Une seconde idée m’est venue lorsque j’ai vu arriver devant le public du “Festival interceltique” uneinterceltique jeune fille qui a chanté a capella un air ancien sur des paroles en gaélique. Dans le public, je n’ai vu personne se lever ou siffler en criant : “On ne comprend pas ce qu’elle chante !” Au contraire : pendant ce chant, le silence qui s’est fait quasi spontanément témoignait de l’attention du public et de sa capacité à goûter un chant traditionnel qui pour l’immense majorité des auditeurs était totalement étranger, voir ésotérique.
Et je me suis demandé pourquoi ce qui “marche” à Lorient ne “marche” pas – ou plus – dans nos églises, au cours des messes. Pourquoi un chant en gaélique est-il accepté sans problème au nom de la tradition, alors qu’une messe en latin (Note d’Ar Gedour : ou en breton !) fait tant de remous dans une paroisse ?
Je crois avoir trouvé la réponse : à Lorient, l’ “esprit” du chant – c’est-à-dire ce qu’il a de profond en lui, son essence, son message – ne faisait qu’un avec l’ “âme” de la chanteuse. L’artiste était “dans le chant” : elle savait ce qu’elle faisait et croyait à ce qu’elle faisait. Et c’est cette fusion de l’œuvre et de son interprète qui permettait au public d’accueillir des paroles incompréhensibles portées par une mélodie ancestrale, et ainsi de “communier” au message que faisait passer la jeune chanteuse.
Une question d’ “âme” et d’ “esprit”, donc.
Trop souvent, au cours de nos messes, apparaît comme un fossé qui sépare l’ “esprit” de la liturgie de l’ “âme” du célébrant.
Quand l’ “esprit” de la liturgie est respecté mais que le ministre de l’autel célèbre “sans âme”, on obtient de belles cérémonies qui ne communiquent rien. Ou pas grand-chose. La messe pourra être très “belle”, mais elle n’édifiera pas, ou peu, et uniquement de manière plus ou moins sporadique. On est alors là dans un ritualisme sec : dans une belle coquille vide, en quelque sorte.
Quand le ministre de l’autel célèbre “de toute son âme” mais sans respecter l’ “esprit” de la liturgie, on obtient des messes où le sentimentalisme étouffe le Mystère, où la piété affective se substitue à la célébration de la foi. La célébration se transforme alors en une sorte de danse autour d’un veau d’or, autour de l’idole qu’on s’est donnée et qui peut être le célébrant lui-même ou bien l’assistance elle-même.
En fin de compte, ce qu’il faut pour qu’une célébration liturgique soit attirante et puisse porter ses fruits, c’est que transparaisse une profonde syntonie entre l’ “esprit” de la liturgie et l’ “âme” du prêtre.

Crédit Photo @ArGedour – 2015

À propos du rédacteur Eflamm Caouissin

Marié et père de 5 enfants, Eflamm Caouissin est impliqué dans la vie du diocèse de Vannes au niveau de la Pastorale du breton. Tout en approfondissant son bagage théologique par plusieurs années d’études, il s’est mis au service de l’Eglise en devenant aumônier. Il est le fondateur du site et de l'association Ar Gedour et assure la fonction bénévole de directeur de publication. Il anime aussi le site Kan Iliz (promotion du cantique breton). Après avoir co-écrit dans le roman Havana Café, il a publié en 2022 son premier roman "CANNTAIREACHD".

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