Saints bretons à découvrir

Mgr Madec : « un danger nous guette aujourd’hui ! »

Amzer-lenn / Temps de lecture : 9 min

homélie monseigneur madec,prezegenn aotrou eskob madegEn 2010 à l’occasion du Pardon de Sainte Anne à Lann Anna (Roudouallec – 56), Mgr Madec, qui nous a quitté le 5 février pour rejoindre le Père, avait prononcé une homélie d’une actualité saisissante.  Tiegezh Santez Anna, nous la fait redécouvrir. En breton ci-dessous, et en français ci-après. Mais voici un extrait en français pour motiver les non-brittophones à cliquer ci-dessous pour avoir la traduction :

 » Un danger nous guette aujourd’hui : celui de notre complicité avec l’opinion publique d’une société matérialisée. Or, ce n’est pas d’une approbation que le monde a besoin, mais d’une transformation ; le monde a besoin de la radicalité de l’Evangile. »

 

Prezegenn an Aotrou Eskob Jozeb Madeg da-geñver Pardon Santez Anna 2010

 

Fenoz ha warc’hoazh, e Santez-Anna-Wened, e teuio etre pemp mil warn-ugent ha tregont mil a bardonerion evit kehelañ santez Anna, Patronez Breizh. Ha setu ni, bodet ivez, en iliz Roudoualleg, evit diskouez hor c’harantez doujus da vamm-gozh Jezuz.

Tud ar Werc’hez Vari, Anna ha Yoakim, ne vezont ket meneget en Testamant Nevez, hogen o anvioù a anavezomp, a-drugarez da hengounioù o tont eus metoù yuzev-kristen an eil kantved. Adalek ar c’hwec’hvet kantved eo kresket kehelerezh santez Anna evel un adsked eus kehelerezh Mari,. Nevesoc’h eo hini sant Yaokim. Hogen, alies int bet kehelet a-gevret, evel ma reas, da skouer, sant Yann Damas er seizhvet kantved, en ur brezegenn a-zivout Ginivelezh ar Werc’hez Vari :

 

«Yoakim hag Anna, eürusat priedoù ha glan meurbet ! Anavezet oc’h bet a-drugarez d’ho frouezh, hervez lavarenn ar Skritur : O anavezout a reot diouzh o frouezh. Ho puhez a voe plijus da Zoue ha dellezek eus an hini hoc’h eus engehentet. A-drugarez d’ho puhez dinamm ha santel, hoc’h eus koñsevet perlezenn ar c‘hlanded, an hini a zlee bezañ gwerc’hez a-raok dezhi genel, gwerc’hez en ur c’henel, gwerc’hez goude ar c’hinivelezh ; an hini nemeti gwerc’hez a spered, a ene hag a gorf. Yoakim hag Anna, priedoù glan meurbet ! O virout ar c’hlanded, houmañ lezenn an natur, hoc’h eus dellezet ar pezh a zo dreist d’an natur ; koñsevet hoc’h eus, evit ar bed, an hini a vo, hep anaout nep pried, Mamm Doue. »

 

Emañ, evit gwir, komzoù sant Yann Damas kontrol krenn d’ar pezh a glever ingal, hiziv an deiz, er c’heleier. Uhelvennad ar glander bet kanmeulet gant sant Yann Damas ha gant meur a dad eus an Iliz a vez sellet outañ evel un dra diziraezadus pe, zoken, evel ma vefe enebet ouzh eurvad mab-den. Rak an arc’hant hag ar rev zo deuet da vezañ idolennoù hor c’hevredigezh. Ha dibaot eo ar re n’en em lezont ket da vezañ levezonet gant ar moederezh o ren. Bep bloaz, siwazh eo dre viliadoù ez aberzher, hag ent dezvek, bugale nann ganet war aoterioù arnevez an arc’hant hag ar rev. Dimp-ni eo, e koulz hag e digoulz, n’eo ket hepken da chom feal da uhelvennad ar glander o tont eus an Aviel hag eus ar c’houbladoù santel o c’hronnañ ganedigezh Jezuz, met ivez da zegas da soñj d’hor c’hempredidi, n’eus ket eus ar gwir frankiz, anezhi en em lezel da vezañ renet gant e vondougoù izelañ, met, er c’hontrol o mestroniañ.

 

« Deoc’h-c’hwi e vez roet da anaout kevrinoù Rouantelezh an neñvoù« , « evurus ho taoulagad dre ma welont, ho tivskouarn dre ma klevont » eme Jezuz. Harpet war gras ar C’Hrist e c’hellomp eta gervel ar re yaouank da adkavout an uhelvennad a voe hini Anna ha Yoakim ha kement a goubladoù kristen. Bez e c’heller bevañ er glander hag ez eus kalz tud yaouank, hiziv an deiz zoken, ouzh en c’hoantaat. Met eus ar re-se n’eus ket anv gant ar c’heleier.

 

Eugène Ionesco, tad c’hoariva an dispoellegezh, en deus diskleriet en un atersadenn, hag eñ o komz gant hardizhded un den o klask ar wirionez:

 « Emañ ar bed o vont da goll hag emañ an Iliz o vont da goll er bed…Nay ha dister eo ar veleion en em gav eürus da vezañ tud dister heñvel ouzh tud dister ar bed. En un iliz em eus klevet ar beleg o lavarout :  » Bezomp joaius, stardomp hon daouarn an eil re d’ar re all… Jezuz a ginnig deoc’h ivez e saludoù« . A-benn nebeut, evit ar gomunion, evit ar bara hag ar gwin, e vo staliet un daol ; kemeret e vo sandwichoù ha beaujolais. Seurt traoù a gavan droch a- grenn, netra da welet gant ar speredelezh. Buhez etre breudeur ne dalv ket distervez ha mignoniachoù. Hogen ret eo dimp kavout traoù ouzh hon dougen dreist d’an amzer : petra e vefe ar relijion hep ar sakrelezh ? Ne chom netra ganimp, netra divrall. Fichfich emañ an traoù p’hor bije ezhomm eus ur roc’h ».

 

Un arvar a zo dirazomp hiziv : hor c’henwallerezh gant kedveno ur gevredigezh renet gant an danvezelouriezh. Hogen ar bed n’eus ket da reiñ hon asant dezhañ, d’e dreuzfurmiñ ne lavaran ket ; ar bed en deus ezhomm eus an Aviel en e leunded.

Santez Anna d’hor bleniañ da chom start er feiz ! start e santelezh Doue hag e Iliz ! Amen.


Traduction en français ci-dessous.


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Homélie de Mgr Joseph Madec à l’occasion du Pardon de Sainte Anne 2010


Ce soir et demain, de 25 à 30 000 personnes vont venir en pèlerinage à Sainte-Anne-d’Auray, vénérer sainte Anne, Patronne de la Bretagne. Nous voici rassemblés, à notre tour, en cette église de Roudouallec, pour exprimer à la Grand-Mère de Jésus notre filial et respec­tueux attachement.


Les parents de la Vierge Marie, Anne et Joachim, ne sont pas cités dans le Nouveau Testament mais leurs noms nous sont connus par des traditions venant des milieux judéo-chrétiens du IIe siècle de notre ère. Le culte de sainte Anne a grandi dans le rayonnement de celui de Marie à partir du VIe siècle. Celui de saint Joachim est plus récent. Mais, souvent, on les a vénérés ensemble, comme le faisait, par exemple, saint Jean de Damas, au VIIIe siècle, dans une homélie sur la Nativité de la Vierge Marie :

 « Joachim et Anne, heureux votre couple, et parfaitement pur ! On vous a reconnus grâce à votre fruit selon cette parole du Seigneur : « Vous les reconnaîtrez à leurs fruits« . Vous avez eu une conduite agréable à Dieu et digne de celle que vous avez engendrée. A cause de votre vie chaste et sainte, vous avez produit le joyau de la virginité, celle qui devait être vierge avant l’enfantement, vierge en mettant au monde, vierge après la naissance, vierge d’esprit, d’âme et de corps. Joachim et Anne, couple très chaste ! En observant la chasteté, cette loi de la nature, vous avez mérité ce qui dépasse la nature : vous avez engendré pour ce monde celle qui sera, sans connaître d’époux, la Mère de Dieu ».


Certes, ces propos de saint Jean Damascène relèvent d’un tout autre esprit que ce que l’on entend de façon habituelle dans nos médias d’aujourd’hui. L’idéal de chasteté, chanté par saint Jean Damascène et par bien des Pères de l’Eglise, est aujourd’hui considéré comme impossible ou même comme contraire au bonheur de l’homme. Car l’argent et le sexe sont devenus les idoles de notre société. Et peu nombreux sont ceux qui ne se laissent pas influencer par la propagande du moment. Des milliers d’enfants non encore nés sont, hélas, sacrifiés chaque année, légalement, sur l’autel de ces modernes idoles que sont l’argent et le sexe. Il nous appartient, à temps et à contre temps, non seulement de rester fidèles à l’idéal de pureté qui nous vient de l’évangile et des couples saints qui ont entouré la naissance de Jésus, mais aussi de rappeler à nos contemporains que la vraie liberté ne consiste pas à se laisser entraîner par ses instincts les plus bas mais au contraire à les dominer.


« A vous il est donné de connaître les mystères du Royaume des cieux », « heureux vos yeux parce qu’ils voient, et vos oreilles parce qu’elles entendent » nous dit Jésus. Appuyés sur la grâce du Christ, nous pouvons inviter les jeunes générations à retrouver l’idéal vécu par Anne et Joachim et tant de couples chrétiens. La pureté est possible et beaucoup de jeunes en rêvent, même aujourd’hui. Mais ceux-là, les médias n’en parlent pas.

 

Le père du théâtre de l’absurde, Eugène Ionesco, a déclaré dans une interview où il parlait avec toute la passion d’un homme qui cherche : « Le monde se perd, l’Eglise se perd dans le monde… Les curés sont ingénus et médiocres, heureux de n’être que des hommes comme tous les hommes médiocres. Dans une église, j’ai entendu le prêtre dire : « Soyons gais, serrons-nous la main… Jésus vous souhaite un pareil bonjour ». Bientôt, pour la communion, pour le pain et le vin, on installera un bar ; on prendra des sandwiches et du beaujolais. Cela me semble d’une bêtise extraordinaire, d’un manque total de spiritualité. La fraternité n’est ni la médiocrité ni le copinage. Mais il nous faut de l’extra temporel ; qu’est-ce que la religion sans le sacré ? Il ne nous reste plus rien, plus rien de solide. Tout est mouvant alors que nous avons besoin d’un roc ».


Un danger nous guette aujourd’hui : celui de notre complicité avec l’opinion publique d’une société matérialisée. Or, ce n’est pas d’une approbation que le monde a besoin, mais d’une transformation ; le monde a besoin de la radicalité de l’Evangile.


Que sainte Anne nous apprenne à rester fermes dans la foi ! fermes dans la sainteté de Dieu et de son Eglise ! Amen.


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Source : Tiegezh Santez Anna – Photo : Site CEF

 

À propos du rédacteur Eflamm Caouissin

Marié et père de 5 enfants, Eflamm Caouissin est impliqué dans la vie du diocèse de Vannes au niveau de la Pastorale du breton. Tout en approfondissant son bagage théologique par plusieurs années d’études, il s’est mis au service de l’Eglise en devenant aumônier. Il est le fondateur du site et de l'association Ar Gedour et assure la fonction bénévole de directeur de publication. Il anime aussi le site Kan Iliz (promotion du cantique breton). Après avoir co-écrit dans le roman Havana Café, il a publié en 2022 son premier roman "CANNTAIREACHD".

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