Le Télégramme de ce jour propose de découvrir le nouvel ouvrage de Thierry Jigourel :
Eh oui, le Finistère recèle encore des mystères, même pour les Finistériens. Thierry Jigourel, grand spécialiste de la Bretagne et des terres celtiques, a été chargé de les dévoiler au grand jour (*).
Villes englouties : mythe ou réalité ? Napoléon était-il breton ? Le « bag-noz », bateau fantôme… En vérité, cet érudit, à la bibliothèque bien garnie, confie s’être bien amusé et avoir découvert des anecdotes, voire des pages d’histoire passionnantes au cours de ses investigations dans les archives et sur le terrain.
Les « sonneurs noirs »
D’emblée, l’auteur trégorrois emmène le lecteur le plus réticent, blasé ou fin connaisseur dans ses filets en évoquant l’énigme des… sonneurs noirs. Tout le monde connaît les Sonerien Du, joyeux et solides farfadets des festoù-noz depuis 40 ans. Mais les sonneurs noirs dont il s’agit sont deux sonneurs qui faisaient danser la région de Pont-l’Abbé au XVIIe siècle. Tout habillés de noir – ils étaient si pauvres qu’ils ne pouvaient se payer des ornements de couleur – mettaient une ambiance d’« enfer » dans le pays, au grand dam des autorités ecclésiastiques. Quoi qu’il en soit, ils connurent une fin tragique, pendus haut et court à la place de deux truands. Les gendarmes les auraient « échangés », en les trouvant dans un fossé cuvant leur cidre de la veille, après avoir laissé fuir les condamnés à mort.
Seznec coupable ?
Le ton est donné. Thierry Jigourel ne laisse plus au lecteur le temps de souffler, évoquant des affaires criminelles et judiciaires hors normes : l’affaire Seznec, bien entendu – mais en donnant plus que d’ordinaire la parole à ceux qui sont convaincus de la culpabilité du bonhomme – mais aussi, plus étonnant encore, l’affaire Cadiou, ce patron d’une poudrerie, assassiné, à quelques mois de la guerre 14-18, à Landerneau – l’ombre de l’Allemagne ? – qui passionna alors toute la France. Sans oublier le cadavre trouvé sur une plage de Plouezoc’h en 2003 : la femme du fameux docteur Godart… qui s’avérera finalement être une femme âgée de 37 ans, trucidée dans les années 1.400 !
D’Ys à la raison d’État
Difficile, évidemment, de passer sous silence le Bugaled Breizh : « Une vérité sacrifiée à la raison d’État ? » ou l’attentat de Roc’h Trédudon, « oeuvre du FLB ». Mais l’auteur n’oublie pas, pour autant, les amoureux de légendes et de mythologie, évoquant d’une plume alerte Comore, le « Barbe Bleue » de Bretagne, la ville d’Ys, les pagans naufrageurs et pilleurs d’épaves, « mythe très romancé », les menhirs, l’arbre à pommes ou arbre à âmes de Plougastel-Daoulas, le sort d’une apprentie sorcière de Morlaix, la dame blanche de Rustefan ou, encore, les femmes-cygnes d’Ouessant… non sans égratigner la fable de la forêt de Brocéliande qui ne serait pas située autour de Paimpont mais plutôt du côté de Carhaix. Bref, 400 pages qui se lisent d’un trait ou en picorant, au gré de ses humeurs mais qui, dans tous les cas, contribuent à alimenter un imaginaire celte toujours bien présent et apte à galoper.
* « Les mystères du Finistère » (Éditions De Borée).