A l’occasion du premier dimanche de mai, la paroisse de Locmalo a célébré dignement le pardon annuel du saint patron dont elle porte fièrement le nom depuis les origines de sa création.
Répondant à l’appel du secteur pastoral, plus de 200 fidèles s’étaient donc donné rendez-vous ce matin-là dans l’église du bourg, pour assister à la messe préparée et célébrée par le père Patience-Aimé Bondeko, recteur de Guémené, accompagné d’Yves de Brunhoff, diacre.
La messe fut célébrée devant une belle assemblée, composée de paroissiens du secteur, et de nombreux fidèles venus des communes alentour. Quoi de plus normal pour un pardon ! Mais d’autres étaient venus de plus loin encore, par solidarité avec le père Patience-Aimé, ou pour aider à restaurer le lustre de ce qui fut autrefois l’une des plus belles manifestations religieuses de notre secteur.
Furent particulièrement appréciés, au dire des participants : le choix des chants et cantiques bretons, l’accompagnement musical (assuré par deux sonneurs de bombarde), et la présence en nombre de pèlerins venus spécialement en costume pourleth. Parmi ces derniers, plusieurs n’ont pas hésité à donner de la voix durant toute la procession, tandis que d’autres aidaient à porter sur leurs épaules ou à la force de leurs bras la statue de saint Malo ainsi que les magnifiques bannières paroissiales, toutes de sortie pour l’occasion. Le groupe de jeunes gens de la catéchèse familiale se chargea des »petits saints » du père Jo Galerne. Le bel ensemble ainsi constitué, ajouté à la ferveur des fidèles, accentuait encore ce côté authentique qui sied si bien aux pardons de chez nous.
À l’issue de la messe, nos fidèles se sont donc rendus en grand nombre et en procession dans un décor champêtre jusqu’au feu de joie situé derrière l’église. Les chants à la sainte Vierge et le cantique du saint patron retentirent sous un soleil radieux, tout le long du parcours, et ce malgré les dénivelés d’un chemin fort peu carrossable. Autour du feu de joie on chanta encore en l’honneur de saint Malo ainsi que l’Angélus breton avant de clore la célébration religieuse.
Puis le père Patience-Aimé nous invita à tous nous retrouver devant la salle polyvalente pour partager un moment de convivialité bien mérité. Après l’apéritif il nous fut donné de déguster un excellent jambon à l’os, servi pour les uns dans la salle polyvalente, ou pour les autres sous le chapiteau dressé à cet effet.
Aux dires de tous, ce fut une belle réussite et un encouragement certain pour toute l’équipe de bénévoles. Et preuve en était, s’il en était besoin, qu’avec la détermination des uns et la bonne volonté des autres, la providence sait faire de grandes choses.
En guise de rappel, voici l’ordonnance des pardons d’autrefois pour la paroisse de Locmalo :
– Le pardon de saint Eugène à la chapelle du même nom : le dimanche avant l’Ascension.
– Le pardon de saint Malo, patron de la paroisse : le dimanche après le jeudi de l’ascension.
– Le pardon de sainte Hélène, dans la chapelle de la Vraie-Croix (Chapel er Groéz) : le troisième dimanche de septembre.
– Le pardon de sainte Christine à la chapelle du même nom : le deuxième dimanche d’août.
– Le pardon de Notre-Dame-de-Grâce, à la chapelle de Kerlénat : le premier dimanche de septembre.
– Le pardon de saint Symphorien, à Longueville : le troisième dimanche de septembre.
– Le pardon de Notre-Dame de la Salette, à la chapelle sainte-Christine : le quatrième dimanche de septembre.
Il y avait aussi le petit pardon de saint Diboén à la chapelle saint Eugène chaque lundi de Pentecôte, et le petit pardon de saint Malo le troisième dimanche de novembre, à l’église du bourg.
Voici le refrain et les trois premiers couplets du cantique de saint Malo (lequel en compte 46 en réalité !).
Diskan : O sant Maleu, karet get Doué,
Sekouret ni, hou pugalé,
Drest pep tra eidomb goulennet
Derhel de Zoué fidél perpet.
1. Cheleuet ol, krechénion,
Buhé sant Maleu hou patron
En èvreu kaer ag é vuhé,
Hou tougou bras de chervij Doué
2. A Huir-Gastel é ma saùet,
A duchentil mar des ér bed,
É dad, er hont a Huir-Gastel,
E oé un dén mat ha santel.
3. Dé sadorn Vask é oé gañnet,
Ér memb dé é oé badéet
Ur sant ar er fons en dalhas
Hag un eskob er badéas.
Pour mémoire, le pardon de saint Malo se déroulait autrefois de la manière suivante : célébré chaque année le dimanche après le jeudi de l’Ascension, il y avait grand’ messe le matin, et dans l’après-midi, vêpres puis procession au feu de joie.
Aux dires des anciens, l’affluence était exceptionnelle, et les réjouissances se poursuivaient tard dans chaque maison, où l’on avait pris soin, pour l’occasion, d’inviter la famille des environs. Repas et danses venaient compléter les festivités du jour. Il reste encore dans la mémoire collective quelques souvenirs mémorables de tout cela. Entre autres, ceux de la procession solennelle au feu de joie.
A l’issue des vêpres de l’après-midi, tous se faisaient un devoir, après avoir fait le tour du bourg en chantant le long cantique de saint Malo, d’accompagner la statue du saint jusqu’au lieu du traditionnel feu de joie. Il s’agit d’un endroit situé derrière le bourg et en haut de la colline la plus proche (Le Petit Locmalo). C’est là que se rendait la foule des pèlerins dont la plupart avait déjà pris part aux célébrations du matin. A l’époque, les hommes portaient le costume dit »mille boutons » alors que les femmes portaient le capot noir ou la coiffe en dentelle si caractéristique du pays pourleth. Les croix de procession, les bannières paroissiales et les drapeaux ajoutaient encore à la solennité de l’événement.
Si la monumentale Fontaine Malo (Fetan Vahlaou) n’était pas oubliée le jour du pardon, on s’y rendait surtout en procession à l’occasion du premier jour des rogations afin de garantir la croissance des récoltes à venir. Saint Malo était vénéré une seconde fois dans l’année à l’occasion du petit pardon, chaque troisième dimanche de novembre. Mais cette fois sans vêpres ni procession. C’était néanmoins l’occasion pour le clergé d’offrir un grand repas à ceux qui avaient aidé dans l’année à quêter le grain de ferme en ferme pour la paroisse.
Saint Malo fut longtemps sollicité pour toutes sortes de demandes. En autre requête, et sous forme de démarche privée, de jeunes mères de famille s’autorisaient à entrer dans le choeur, et après s’y être agenouillées un instant, elles confiaient leur enfant à la protection de saint Malo. Les enfants qui tardaient à marcher lui étaient plus spécialement présentés. Et pour ce faire on les laissait un moment sous la statue du saint, laquelle est située à gauche de l’autel.
Saint Malo ou saint Maclou (Sant Maleu ou Zant Mahlaou en breton), dit aussi Malo d’Aleth, encore appelé en latin Maclovius ou Machutus, est l’un des sept saints fondateurs légendaires de Bretagne continentale. Il serait né dans l’actuel comté de Glamorgan, au pays de Galles, et serait mort à Archingeay (Saintonge) un 15 novembre vers 620 ou 640 ou 649. Il aurait été le premier évêque d’Aleth (actuellement Saint-Servan, ancienne commune aujourd’hui annexée à Saint-Malo en Bretagne).
Il est fêté le 15 novembre (Calendrier des saints bretons). La ville de Saint-Malo est une étape du pèlerinage médiéval des sept saints de Bretagne appelé Tro Breizh (Tour de Bretagne). Disciple de saint Brendan à Llancarfan, il aurait accompagné son maître dans ses voyages en quête du Paradis terrestre. Ses Vies latines du IXème siècle recèlent ainsi les plus anciennes versions de ce récit de navigation merveilleuse, qui relève d’un genre littéraire (immram) à succès dans la littérature des pays celtiques.
Appelé par Dieu à traverser la Manche pour s’exiler, il aborda sur l’île de Cézembre après sept années de navigation. Après une expérience de syncellisme (vie érémitique) partagée avec saint Aaron à l’emplacement de Saint-Malo, en face de la cité d’Aleth (aujourd’hui Saint-Servan), présentée comme « désertée » par ses habitants, selon l’une de ses vies, Malo fut promu à la tête de l’évêché de la ville. Il organisa l’encadrement des populations autochtones par ses disciples et intervint miraculeusement dans le secteur de Corseul, ancien chef-lieu de la cité antique des Coriosolites. Cependant, des conflits fonciers le contraignirent à se réfugier auprès de l’évêque Léonce de Saintes. Rappelé à Aleth pour lever l’excommunication qu’il avait fulminé contre ses ouailles, il se retira ensuite à nouveau en Saintonge où il décèda pieusement. Ses reliques ont été rapatriées ultérieurement en Bretagne au prix de deux opérations successives commanditées par le clergé d’Aleth.
La diffusion du culte de ce saint au cours du Moyen Âge est la conséquence de la dispersion de ses reliques au Xème siècle, à la suite des invasions normandes (Paris, Montreuil, Bruges, Gembloux, Rouen, Pontoise, Conflans-Sainte-Honorine, où l’église principale de la fin du XIe siècle lui est dédiée, etc.). Lors de la querelle métropolitaine qui opposa, du Xe au XIIe siècles, Tours et Dol-de-Bretagne, Malo a été porté au nombre des « sept saints » fondateurs de la Bretagne. Il faut attendre 1144-1146 pour que l’évêque Jean de Châtillon (dit Jean de la Grille) transfère son siège cathédral d’Aleth à l’île de Saint-Malo.