Redonnons du sens à nos calvaires

Amzer-lenn / Temps de lecture : 2 min

Quel breton ne passe pas quotidiennement devant une croix, un calvaire ou encore une chapelle ? Tels d’innombrables Salve d’un immense rosaire de granit, ces symboles de la piété bretonne font aujourd’hui partie de notre décor, du paysage typique de notre Bretagne. Mais dans notre monde survitaminé, dans notre modernité où chaque seconde doit être rattrapée et rentabilisée, qui prend le temps de s’arrêter devant ces croix ? Face à elles, qui prend le temps de se signer, de réciter une courte prière pour rendre grâce à Dieu pour tous ses dons, d’entonner ces magnifiques cantiques et antiennes que des dizaines de générations de bretons ont chanté auparavant ? Trop peu de personnes, malheureusement.

Et pourtant, dans la frénésie de nos quotidiens, toutes ces croix, tous ces calvaires sont autant d’invitations à remettre le Christ au milieu de nos vies, à nous recentrer sur l’Essentiel. Nos aïeux l’avaient bien compris d’ailleurs. Ce n’est pas pour rien qu’ils bâtissaient ces calvaires dans des endroits paisibles, calmes, où la richesse de la nature invitait très simplement à la prière. Le travail avait toute sa place dans leur vie, mais ils trouvaient ce réconfort dans la simple prière au pied de leurs calvaires, dans les Angelus qui résonnaient trois fois par jour, dans ces Pardons qui rythmaient leur vie et renforçaient les liens sociaux.

Dans notre monde aseptisé, c’est peut être l’une des priorités les plus urgentes : redonner du sens aux choses, pour rappeler leur véritable utilité, le but de leur existence. Pour nos calvaires, il n’était initialement ni artistique, ni architectural mais pour une réconciliation du spirituel et temporel : donner une occasion à chaque breton de se rappeler le but de toute vie terrestre, et vers Qui elle doit tendre. Face à cet appel à la Vie éternelle, à la Sainteté et l’amour de son prochain, quelle importance revêt au fond toutes les distractions de nos quotidiens ?

Ôter cette utilité aux calvaires, c’est prendre le risque de les réduire à une simple curiosité patrimoniale, à un joli tas de granit bien taillé qu’un impératif d’aménagement paysager fera facilement tomber dans l’oubli. Donc n’hésitons pas à reprendre cette belle habitude de nous signer devant nos calvaires, rendons-leur un but et leur sens initial : c’est, peut-être, la plus belle œuvre de restauration que nous pouvons leur offrir aujourd’hui.

 

Cet article est paru initialement dans Kroaz ar Vretoned d’octobre 2021

À propos du rédacteur Augustin Debacker

Augustin Debacker a été directeur de publication du mensuel Kroaz ar Vretoned de 2021 à 2023, version actualisée d’un hebdomadaire qui fut publié en breton entre 1898 et 1920.

Articles du même auteur

A la découverte des Taolennoù, les tableaux de missions

Amzer-lenn / Temps de lecture : 4 min Dans son ouvrage Mellezour an Eneour (Miroir …

L’intercession des Saints, dulie et humilité en Bretagne

Amzer-lenn / Temps de lecture : 4 minLa question de l’Intercession des Saints, c’est-à-dire la …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *