Mise à jour d’un article du 2/11/2015, suite à nos dernières recherches.
Depuis le 18ème siècle, il est d’usage d’attribuer le culte de St Salomon, en Bretagne, au roi Salomon, assassiné le 28 juin 874. Son meurtre l’aurait fait considérer comme un martyr, effaçant la mémoire du meurtre qui lui avait donné le pouvoir.
Avant Dom Lobineau, qui en 1717, supprima le 5ème siècle de l’Histoire de Bretagne, on connaissait un Saint Salomon de ce 5ème siècle, fils de Gerent (Gérontius, général dans l’armée romaine). Suivant l’historien Pierre Le Baud, l’épouse de Salomon aurait été Cécilia, fille du patrice Flauius Constantius, beau-frère de l’empereur Honorius. Cela n’est pas invraisemblable puisque Gérontius, qui s’était brouillé avec Constantin III, en 410, s’était accordé avec Flavius Constantius, précipitant ainsi la défaite de Constantin (Fleuriot, OB259). Les mariages sont souvent le prix d’alliances politiques. Celui-ci daterait donc de 410.
La vie de Saint Kebi fait connaître un autre Salomon, neveu du premier, fils de de son frère Erbin (EWGT). Il vécut en ermite dans l’île de Môn, en Galles.
Salaün ab Gerent, résidait dans le nord du pagus du Faou, dans la Deria, zone de la forêt de chênes de la rive sud de l’Elorn, que l’on appelait alors Elusorna. Suivant la Translatio Matthaei (récit du transfert des reliques de St Matthieu, OB 200) il y avait, à l’actuel Merzer Salaün, une basilica, qui peut être à l’origine de l’actuelle église. En ce lieu passe la voie romaine qui reliait Castrum Iulianum (Uorganium I Kerilien) à Corisopitum et Gesocribate.
Il semble qu’il fut assassiné à cause de son opposition au maintien de prisonniers en esclavage comme l’avait fait Patric quelques 25 ans plus tôt. La tradition place ce meurtre à La Martyre (q.v.), en breton Merther Salaün, que l’on traduit couramment par « Le martyre de Salomon », erreur caractérisée. En effet, Merther, du latin martyrium, signifie un sanctuaire possédant des reliques d’un saint, une basilique. Il n’est donc pas certain, mais seulement possible que Salaün ait trouvé la mort en ce lieu.
VARIANTES DU NOM
Salomo au nominatif, a donné en gallois Selyv, Selev, Sele (ByS 26, 76, AchS 28, 51, EWGT). En Cornwall on a Sela (écrit Zelah), en Armorique Sala, Sela.
De l’accusatif Salomonem (ou du génitif Salomonis) on a en Cornwall Selevan, en Galles Selvan. En Armorique on a le plus fidèle Sala(v)un (de Salomonem) et Plebs Salomonis a donné Plouzélambre. En Bro-Erec on a le composé Selazwenn, où gwenn a le sens de « saint ». Avec le suffixe -iac, on a Seleviac, qui a donné Silfiac.
PATRONAGES
Salomon ab Gerent est l’éponyme de Merzer-Salaün près de Ploudiri (29), de Lannsalaün en Paule (22), de Plessala (22), Bosselas en Crossac (44) c’est-à-dire Bod-Sela « résidence de Salomon », Céselas en St-Nicolas-de-Redon (44) c’est-à-dire Sez-Sela « Siège de Salomon », Menez-Sansala en Argol (29) c’est-à-dire Menez Sant Sala. St Seleven en Caudan, St Salomon en Plouyé (29) et en Guern (56), en plus de Silfiac (56, <Seleviac) et de Plouzélambre (22 : * Plebs Salomonis>*Plou-Selam, <Selamr) à côté duquel, à 3 km, il y a un Ros-Salaün en Plufur).
CULTE
Saint Salomon vivait dans le premier tiers du 5ème siècle. L’église romaine moderne, ayant oublié le 5ème siècle, ne connaît, paradoxalement, comme « saint » Salomon que le roi du 9ème siècle. Quant aux chercheurs, l’homonymie, jointe à la proximité de leur date de trépas (25 juin pour Salaün ab Gerent et 28 juin pour Salaün ab Riwallon), peut expliquer qu’ils se soient satisfaits de la sainteté contestable du second et laissé le premier frappé d’inexistence.
L’ancienneté du culte de Salaün ab Gerent est attestée par le fait qu’il a donné son nom à deux Ploues (Plouzélambre et Plessala) et à un Lann- (Lansalaün en Paule – 22). Il n’est pas certain qu’il ait réellement été assassiné, puisque cet élément peut avoir été imaginé par l’interprétation erronée du nom de Merzer-Salaün. Il est probable que des reliques de Saint Salomon participèrent au grand exode du 10ème siècle, ce qui lui a valu d’être patron d’une église à Pithiviers (45).
Il faut cependant retenir que la Translatio Matthei rapporte son assassinat.
CONFUSIONS HISTORIQUES
La mise au rebut du Salomon du 5ème siècle a eu des effets bizarres. Certains ont cru que Lannsalaün remémorait le Salaün ermite du Folgoët, imaginant ainsi que l’on créait encore des Lann au 14ème siècle (BSR99). D’autres, ayant lu que le Salomon du 9ème siècle avait péri « dans un petit monastère du Poher »(DCF 130), crurent que le Poher avait compris Merzer-Salaün en Ploudiri, alors qu’il était bien établi que c’est à Plélauff (Plelanw) que se trouve le lieu du meurtre du 9ème siècle (Le Lay, MSHAB 1924).
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