Voilà deux instruments, pourtant bien différents d’aspect, mais dont les sons se marient avec bonheur. Et ce n’est pas le plus fluet qu’on entend le moins.
La musique traditionnelle bretonne a souvent recours au couple bombarde /orgue, surtout pour la musique d’église. Il faut bien reconnaître que c’est surtout dans les églises que l’on entend sonner l’orgue, tandis qu’en extérieur, c’est principalement avec le biniou que la bombarde se fait entendre, beaucoup plus commode pour défiler ou faire danser les couples à l’occasion des festou noz et autres gouelioù.
Ainsi, dimanche dernier, 14 janvier 2018, c’est à l’église paroissiale Notre Dame de l’Assomption du Faouët, fondation au XIV° siècle de la famille Bertrand de Trogoff et Péronnelle de Boutteville dont le gisant se dresse au transept sud et la tombe armoriée à l’extérieur du bâtiment, qu’orgue et bombarde se sont fait entendre pour des pièces traditionnelles du temps de Noël.
Eh oui ! il y a un orgue à l’église du Faouët, un Cavallié-Coll, s’il vous plait, – plus précisément d’Aristide Cavaillé-Coll (1811-1899), dernier rejeton d’une longue lignée de facteurs d’orgue du sud-ouest remontant au XVIII° siècle -, provenant tout droit d’une salle de spectacle parisienne où il assurait les entr’actes. Au Faouët, c’est d’abord sur la tribune au fond de la nef qu’il a été installé et, sans doute en raison de son poids, il a été déménagé dans le transept nord où il se trouve dorénavant.
C’est Alain-Noël Le Gall, l’organiste bénévole titulaire du magnifique orgue de l’église Saint-Germain l’Auxerrois de Pleyben, dû au talent du facteur anglais Thomas Dallam (1630 1765), qui nous l’a dit.
Le toucher d’Alain-Noël Le Gall n’a pas son pareil pour faire sonner les notes de son instrument d’où qu’il soit, même s’il a des préférences, tout comme son collègue de la basilique Notre-Dame-du-Bon-Secours de Guingamp, Jean-Cédric Salaün, venu tout exprès pour les écouter, lui et son compère talabarder.
Le talabarder, c’est Eflamm Caouissin, un enfant du pays, né avec une bombarde entre les lèvres et un biniou-koz sous le bras.
Instrument à anches double – il n’y a pas de « bec » fixe, comme dans la clarinette ou les saxos, mais deux anches qui vibrent à la fois – , la bombarde, sorte de hautbois, nécessite un travail adapté des lèvres et du souffle pour donner toute sa sonorité à l’instrument, et Eflamm sait y faire.
On sent qu’ils ont pris l’habitude, ces deux-là, de sonner ensemble et leur plaisir se ressent sur la qualité de la musique produite par leurs instruments respectifs dont aucun ne cherche à étouffer l’autre mais au contraire, dialoguent ensemble au fil des morceaux interprétés rappelant les grandes et belles cérémonies du temps mystérieux, particulièrement chez nous, en Bretagne, qu’est le temps de Noël où les animaux se mettent à parler et les grandes pierres à se lever de leurs emplacements habituels, il n’y a qu’à se trouver à la Vallée des Saints au moment même de la consécration de la messe de minuit pour s’en persuader… Si, si !
Nous avons été chaleureusement accueillis par le recteur en personne, An Aotrou Jean-Baptiste Nicolazo de Barmon ; d’aucun ont laissé entendre qu’il y avait plus de monde l’après-midi pour le concert, que le matin pour la messe dominicale, mais laissons dire…
C’est ainsi que j’ai pu saluer, entre autres, après Monsieur le Maire de Berné et Madame Jean-Pierre Le Fur, mon voisin, Bernard Rio, préfacier du récent livre « Merveilleux Noël de Bretagne » recueillis par Thibaud Dubois, illustré par Françoise Pichard, paru en octobre dernier aux éditions « Via Romana », de Versailles, 252 pages, 19 €, excellente compilation des plus beaux contes de Noël bretons que l’on pouvait feuilleter en attendant le début du concert et, bien sûr, se procurer sur place moyennant l’acquit prévu.
L’après-midi s’est achevée en bonne compagnie : les deux musiciens, de peur d’avoir un auditoire trop clairsemé, avaient convoqué chacun toute sa tribu, au Bon Abri, bar celtique, seul ouvert le dimanche après-midi, devant un verre de « bonnets rouges » pour ceux qui, comme moi, avaient un peu de route à faire pour rentrer au domicile.
S’il existe un orgue près de chez vous, vous avez des chances d’avoir l’occasion d’entendre le couple Le Gall/Caouissin, ne les manquez pas, vous le regretteriez ! Le cas échéant, n’hésitez pas à les faire venir, ils n’attendent que ça !…
L’orgue ne serait pas de facture d’Aristide Cavaillé-Coll, mais de son père, tel que je l’ai entendu dire par Alain-Noël Le Gall le jour du concert. Cordialement.
le père d’Aristide, Dominique-Haycinthe Cavaillé-Coll né en 1771 est décédé en 1862…. j’imagine qu’il avait pris une légitime retraite à l’heure où l’orgue, aujourd’hui au Faouët, a été fabriqué pour une salle de cinéma parisienne ! ….
ceci étant….
très beaux chant, profond qui révèle la sincérité de la piété… chant intime de nos pères