Lors de cette édition 2016 du Festival de Cornouaille auront lieu deux défilés et une exposition de la collection vestimentaire « Giz ar Vro », nouvellement créée par deux jeunes créateurs que nous vous présentons ici, avec un petit flash-back historique.
1938 – Herry Caouissin, accompagné de son frère Ronan créent «l’Association Giz ar Vro » ( La Mode du Pays ), dans l’idée non pas de concurrencer les magnifiques costumes bretons, ni de proposer des versions modernisées de substitutions, mais de proposer des versions de costumes « celtisés » pour l’usage quotidien, impliquant simplicité, légéreté et…beauté, mais aussi pratique et peu coûteux. Etant entendu que les costumes traditionnels étaient davantage réservés pour les grands jours de fêtes (profanes ou religieuses). L’idée était simple, : s’inspirer de la richesse des motifs celtiques, mais aussi tenter de maintenir et faire revivre en Bretagne les costumes bretons dans la vie quotidienne, comme ils l’étaient en Allemagne, en Autriche, au Tyrol, dans les pays Scandinaves, en Hongrie.
« Le costume breton doit-il être abandonné ou rénové ? Il n’y a pas de milieu, c’est l’un ou l’autre. En ces années 1937 et 1938, qui nous rappellent l’époque de la reconstruction de la Bretagne (référence aux fêtes du Millénaire), une décision doit-être prise. Les discours, les harangues et les rapports en faveur du costume breton n’ont guère avancé la question. C‘est pourquoi un groupe de jeunes Bretons et Bretonnes s’est rassemblé, et a décidé qu’il fallait faire autre chose que de se lamenter sur l’abandon du costume national, si on ne veut pas qu’il disparaisse à jamais, il faut agir » ( Extrait de la circulaire de lancement ).
Une démarche Seiz Breur soutenue par les entreprises et les notables
L’Association s’intéressera à toutes les variantes des costumes pour les diverses occasions de la vie. Leur projet s’inscrivait parfaitement dans la démarche des « Seiz-Breur » et de « l’Atelier Breton d’Art Chrétien » (An Droellen) de l’architecte James Bouillé (1).
Immédiatement ils eurent les soutiens actifs de notabilités influentes et mécènes, mais aussi d’entreprises comme la Maison Le Minor de Pont-l’Abbé, les Tissages de Locronan de Marc Le Berre, le facteur de bombarde Dorig Le Voyer, les dessinateurs et peintres Michaud-Vernez et Xavier de Langlais, Madame De Bellaing, Madame Galbrun, Lady Mond, la Comtesse Vefa De Saint-Pierre. Cette «Grande-Dame», active militante était la mécène de bien des causes bretonnes. Elle couvrira de dons les écoles des cantons de Châteauneuf-du-Faou, Pleyben, Spezet, Gourin, Roudouallec, Le Faouët, dès lors où celles-ci s’engageaient à maintenir le breton dans l’enseignement et le catéchisme… et les costumes. Si tel n’était pas le cas, elle n’hésitera jamais, après avoir tancé les responsables, très souvent des religieuses, à supprimer ses aides financières. La sanction se révélait toujours efficace. Mais elle savait aussi récompenser généreusement par toutes sortes de cadeaux ces écoles, et surtout les convaincre.
Parallèlement, il s’ensuivit le projet de lancement d’une revue de mode, « Gwiskamantou Breiz » ( La Mode Bretonne ). Malheureusement, l’année 1938 est déjà annonciatrice d’une guerre regardée comme inéluctable, un seul numéro de la revue sortira, introuvable aujourd’hui. A noter que le quotidien nationaliste « La Bretagne » publiera régulièrement une page de mode bretonne, reprenant ainsi les idées lancées par « Giz ar Vro », mais, contrairement à « Giz ar Vro », aucune réalisation ne suivra. (Pour en savoir plus, « 1938, vers un renouveau du costume breton«
Le renouveau de « Giz ar Vro »
Près de 80 ans plus tard, deux créateurs lancent Giz ar Vro, ligne de vêtements inspirés des broderies traditionnelles. Matthias Ouvrard (brodeur) et Thomas Jan (couturier), tous les deux issus de cercles celtiques, ont uni leurs savoir-faire pour donner cette année 26 tenues qui s’enracinent dans le patrimoine ancien mais intègrent avec brio le vestiaire contemporain, ce qui ne saurait déplaire au public du Festival de Cornouaille.
Lorsque nous avons contacté les initiateurs de ce nouveau projet prometteur en leur faisant découvrir l’article que nous avions consacré à ce sujet, en évoquant l’historique de Giz ar Vro, ces derniers furent surpris de l’enracinement que prenait ainsi leur structure dans une histoire plus large. Ils nous confiaient en mai dernier :
C’est avec une immense surprise que nous avons découvert l’article que vous avez publié sur notre page. Nous sommes respectivement brodeur et couturier et passionnés de costumes bretons. Il y a quelques mois nous avons décidé de nous lancer dans un projet de collection de vêtements contemporains inspirés du costume traditionnel de Quimper. Nous avons longtemps cherché un nom pour cette collection et nous avons choisi la traduction bretonne de « La mode du Pays ». La découverte de ce fait culturel nous laisse sans voix, nous ne connaissions pas son existence. C’est incroyable. Nous avons les mêmes envies, nous voulons faire vivre une mode bretonne contemporaine et nous avons par le plus grand des hasard choisi le même nom. (Mathias Ouvrard & Thomas Jan, 10/05/2016 )
Nous ne pouvons que souhaiter longue vie à ce projet. Deux défilés, ouverts au public sur réservation obligatoire au stand de Kendalc’h (98 places seulement), auront lieu les mercredis 20 et vendredi 22 juillet à 20 h. Vous pourrez aussi découvrir leur collection :
- Du 16 juillet au 13 août, galerie Artem, 16, rue Sainte-Catherine – Quimper
- Du 20 au 24 juillet, de 10 à 18 h au Pôle Max-Jacob, 2, boulevard Dupleix – Quimper
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1 ) « An Droellen » Atelier Breton d’Art Chrétien. Lire notre précédent article sur ce sujet
En 1923, Jeanne Malivel et Creston s’intéressèrent à une modernisation pratique du costume breton, mais leur initiative resta dans les cartons de dessins et il n’y eu aucune réalisation. Herry Caouissin n’avait jamais entendu parler de cette tentative. En créant « Giz ar Vro », il fut surpris de recevoir une lettre agacée ( 28 juin 1938 ) de Creston n’appréciant guère que d’autres réalisaient ce qu’il n’avait finalement pas jugé urgent de concrétiser. Heureusement, les relations avec les frères Caouissin n’en seront pas par la suite affectées, et il les encouragera même, leur reconnaissant cette « paternité ».
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très intéressant ! Il y a des pays tel que le Tyrol, la Bavière, où les gens n’ont pas eu honte de leurs costumes; ils les portent le dimanche et dans les occasions. Dans un petit village, j’ai été très étonné, émerveillé, de trouver une boutique qui vendait rubans, étoffes, galons, pour tailler de nouvelles tenues . Je n’en aurais pas trouvé de telles en Bretagne , où les modes éphémères et qui n’embellissent pas les personnes semblent avoir envahi tout l’espace. « jeans » artificiellement déchirés, industriellement délavés, oripeaux qui pendouillent et mélanges discordants, n’est-ce pas « la culture de mort »? On abîme volontairement le fruit d’un travail; on présente comme « cool » ,ce qui n’est qu’un snobisme du médiocre.
Bravo aux esprits qui ne suivent pas le bêlant troupeau, et qui apprécient « la belle ouvrage »…