La question se pose aujourd’hui avec les funérailles de Fañch Morvannou comme hier avec ceux de biens des bretonnants qui souhaitaient avant lui avoir des obsèques religieuses en langue bretonne.
Nous ne savons pas à ce jour – même si nous l’espérons – si celles de Fañch correspondront exactement à ce qu’il voulait, mais ce qui est certain, c’est que parfois, les familles se trouvent confrontées à ce problème : avoir au minimum quelques cantiques bretons si ce n’est pas un office bilingue ou totalement en breton relève parfois du parcours du combattant.
Tu veux des funérailles en langue bretonne ? Fais en sorte qu’elle vive le reste du temps dans l’église qui te verra partir…
Yann-Fañch Kemener a eu un office essentiellement en breton avec la messe grégorienne des défunts, les témoignages et poèmes étant en français, avec un juste équilibre. Il a eu cela car il avait anticipé et exprimé ses souhaits aux personnes concernées, et qu’il était entouré de personnes qui ont tout fait pour qu’il puisse avoir ce qu’il désirait.
Nous pourrions citer d’autres exemples. Si quelqu’un comme Fañch Morvannou s’est impliqué dans la vie de l’Eglise en Bretagne, à l’instar de bien d’autres qui peu à peu quittent le monde terrestre, et doit avoir des funérailles enracinées, les bretonnants se demandent toutefois à chaque disparition de monuments culturels bretons, notamment sur les réseaux sociaux, si la messe d’obsèques sera en adéquation avec l’engagement du défunt. Mais des questions se dévoilent alors :
1 – Prépare-t-on ses funérailles ou évitons-nous un sujet qui nous effraie ?
2 – Les équipes de funérailles sont-elles prêtes à entendre la demande ?
3 – Quelle part les personnes qui réclament un office en breton prennent-elles dans la vie de l’Eglise tout au long de l’existence ?
4- Ces personnes ont-elles prié pour avoir des vocations de prêtres dans leurs familles ou leur entourage, des prêtres qui auraient pu alors célébrer e brezhoneg les sacrements et sacramentaux ?
S’il existe aujourd’hui si peu de clercs à même de célébrer en breton, c’est dû à plusieurs facteurs, et notamment le fait que la langue bretonne soit considérée comme accessoire, mais c’est aussi, nous ne pouvons le nier, dû au fait que le milieu breton a trop souvent renié ses racines chrétiennes. Et lorsque vient l’heure du glas, on se rappelle de l’église de sa paroisse. Mais, disons le en bref : tu veux des funérailles en langue bretonne ? Fais en sorte qu’elle vive le reste du temps dans l’église qui te verra partir…
Une possibilité en l’absence de célébrant brittophone
On pense souvent à tort qu’en l’absence d’un célébrant parlant breton, il n’est pas possible d’assurer des obsèques religieuses en breton. Alors on règle l’affaire : autant ne rien mettre ! Et pourtant, quel empêchement y aurait-il à ce que les cantiques bretons (souvent d’ailleurs plus chantés que les vers en français) soient au programme si les familles le souhaitent ?
On peut aussi facilement mettre la première lecture en breton (avec traduction sur le livret), le psaume ou encore la prière universelle en breton. Kan Iliz propose d’ailleurs un modèle (cliquez ici).
Proposer des cantiques en breton
Il arrive que des familles nous informent que dans certaines paroisses, les équipes funérailles ne proposent pas de cantiques bretons. Souvent, les familles en deuil se laissent guider. Nous invitons nos lecteurs qui en font partie à proposer systématiquement un chant breton, quitte à ce que les familles déclinent la proposition. Kan Iliz liste un panel de cantiques adaptés (cliquez ici) et par ailleurs, Yann-Fañch Kemener avait publié son album « Ar Baradoz » justement pour aider à reprendre ces cantiques dans nos paroisses.
Les funérailles sont un formidable moment d’évangélisation. Certes, cela se fait dans un moment de détresse mais c’est à nous chrétiens de faire preuve d’une solide espérance et d’être missionnaires. Mgr Moutel, évêque de St Brieuc & Tréguier a récemment publié des orientations en ce sens. La langue bretonne est vecteur de cette espérance que sa musique transcende. Sans conteste, c’est lors des obsèques que les cantiques bretons peuvent être le plus mis à l’honneur. Nombre de défunts ont eu le breton comme première langue ou y ont été baignés dès leur plus jeune âge ; ils méritent que leur première langue ait une place de choix pour leur dernier voyage.
On entend encore dans nombre d’enterrement le O Rouanéz karet en Arvor. Pourquoi ne pas faire davantage ?
Cantiques bretons, chants apaisants
Par expérience, les cantiques bretons entonnés lors des obsèques, que ce soit à l’église ou au cimetière, ont un véritable pouvoir apaisant pour les vivants qui demeurent après la perte d’un être cher.
Les cantiques bretons sont le prolongement naturel de la messe grégorienne des défunts, chant qui apaise et qui aide à dignement porter le deuil. Prenons quelques exemples : Jézuz, pé ker bras é, ‘pe zay er marù spontus, mem bro e vo én néañv, O Mamm ér baradoéz, me ho kwélo un dé… mais bien plus encore, que vous pouvez découvrir sur notre article “Les Hymnes bretons de la Fête des Morts et des Funérailles” ou sur le site Kan Iliz.
Proposons les textes profonds et les superbes mélodies de nos cantiques dédiés lors des funérailles. Prenez le temps de les traduire sur les feuillets ou lorsque vous invitez à chanter. Les gens s’en rappelleront… et de plus vous ferez vivre ces airs qui ont accompagné tant de nos aïeux.
J’ai assisté, le 26 décembre 2018, aux funérailles de François de Laubrière, fervent catholique, mais qui, depuis plusieurs décennies, avait jeté un pont en direction de nos frères orthodoxes; la cérémonie, qui dura deux bonnes heures, outre l’absoute au cimetière, fut célébrée, non point, comme d’habitude, en FLB, mais en FLBS (français-latin-breton-slavon); j’y ai retrouvé, avec ravissement, les mélodies entendues en 2005 sur les hauteurs du lac
Kapchagaï (Kazakhstan).