Saints bretons à découvrir

Mais pourquoi donc m’ont ils fait baptiser sous le prénom d’Yves ?

Amzer-lenn / Temps de lecture : 20 min

Je suis né le 14 mai 1946 à CHATEAUROUX, de père berrichon, mâtiné tourangeau et de mère également berrichonne mais à tendances parisiennes.  Il n’y a donc pas plus berrichon que moi : je suis le fils des grandes plaines de champagne et des bouchures du boischault

Mais pourquoi donc m’ont ils fait baptiser sous le prénom d’Yves qui n’est ni de famille ni de la province ?

A l’école communale de MEUNET sous VATAN, puis au collège LEON XIII à CHATEAUROUX, je n’avais pas beaucoup de camarades prénommés Yves, comme moi

De cette originalité, je me suis fait assez vite une distinction et n’ai eu de cesse, assez tôt, de connaître la vie de mon Saint Patron breton, Yves HELORY,  né au début de la 2° moitié du XIII° siècle et décédé au manoir de Kermartin, au MINIHY-TREGUIER, à l’aube du dimanche 19 mai 1303 à l’âge de 50 ans, contemporain de Saint Louis,  étudiant à Orléans, prêtre et juge dans son pays, canonisé 44 ans après sa mort à l’issue d’un procès clos par la bulle de CLEMENT VI, pape en AVIGNON

Il n’y a pas eu beaucoup de saints canonisés aussi rapidement après leur mort « en odeur de sainteté », ni même, en Bretagne, de saints qui ait, comme Yves, subit un procès en bonne et due forme, et Dieu sait qu’il y a des saints en Bretagne, hier, comme aujourd’hui, « sancto subito » ils l’ont été par la « vox populi », peu d’ailleurs figurent au calendrier romain, d’aucuns prétendent même qu’ils n’ont pas d’existence, pourtant tous continuent d’être honorés dans leurs chapelles et sollicités dans leur thaumaturgie

C’est ainsi que le 1° avril dernier, a été annoncé sur le site web du diocèse de SAINT BRIEUC – TREGUIER, la découverte d’un 8° saint « fondateur » :  l’ermite d’origine galloise NEOKET, fondateur du monastère de LANN-NETRA, avant d’être placé à la tête du diocèse de MANN-EBET,

(Excellent poisson d’avril pour bretonnant : n’eo ket n’existe pas, netra : rien et mann ebet, rien du tout !)

Yves n’a pas laissé d’écrit en dehors de son testament, il n’a fondé aucun ordre religieux, il n’est connu – ce qui est un comble pour un juriste – que par son procès en canonisation qui nous laisse le témoignage de ses vertus

D’ailleurs peu d’avocats ont été portés sur les autels en dehors de l’anglais Thomas MORE (1478-1535) et de l’italien Alphonse de LIGUORI (1696-1787) ; le cardinal GERLIER (1880-1965), archevêque de LYON, ancien avocat à la Cour d’Appel de PARIS, le sera t il ? Sans parler de nos contemporains, Rémy MONTAGNE (1917-1991) et Simone PACOT, auteure notamment de « l’évangélisation en profondeur » (Cerf 1997), toujours inscrite au tableau des avocats honoraires à la Cour d’Appel de PARIS

 

Yves est le 2° saint breton à être canonisé, un siècle après Saint Guillaume PINCHON (1184-1234), ancien évêque de SAINT BRIEUC ; il faudra attendre un demi millénaire, 1947, avec Saint Louis GRIGNON de MONTFORT (1673-1716) pour le 3°, puis le XXI° siècle et celle de 4 religieuses, la dernière en date étant sainte Jeanne JUGAN (1792-1879), fondatrice des petites soeurs des pauvres par BENOIT XVI ; on peut ajouter à cette liste de 7 personnes : Vincent FERRIER, dominicain d’origine espagnole, né à VALENCE en 1350, décédé à VANNES le 5 avril 1419, canonisé en 1455 par Alphonse BORGIA, cardinal archevêque de VALENCE, récemment élu au Saint Siège sous le nom de CALIXTE III

il faut dire que c’est JEAN-PAUL II, en 1983, qui, en supprimant carrément « l’avocat du diable » dans la procédure de canonisation, a permis que soit accélérée la cause des saints !

J’avais lu dans le livre relatant la vie de mon saint patron qui m’avait été remis à l’école en guise de prix de je ne sais plus quoi, que, sur la remarque d’un de ses familiers qui avait repéré sur le vêtement d’Yves je ne sais quel insecte parasite, le saint homme lui avait répliqué « laisse le à sa pitance »

Cette remarque avait plu au petit campagnard en butte aux moqueries de ses camarades de classe citadins

A l’issue de mes études de droit, ayant obtenu – avec peine, il faut le reconnaître – ma licence au bout de 5 années alors que 4 suffisaient alors généralement, j’ai prêté le serment d’avocat à l’audience solennelle de la Cour d’Appel de POITIERS du 16 décembre 1970 sous la présidence de Monsieur le Premier BUTHAULT, présenté par Monsieur le Bâtonnier Georges BAELDE comme étant inscrit au stage du barreau, parrainé par Monsieur le Professeur Eugène DESGRANGES de la faculté de Droit de POITIERS, mon professeur de Droit Administratif et Monsieur le Bâtonnier Edmond de la BROSSE, avocat à la Cour d’Appel de RIOM, vieil ami de la famille, auxquels il me plaît de rendre ici hommage

C’était à l’issue d’études longues et laborieuses, somme toute, ennuyeuses, la seule profession directement ouverte au jeune diplômé que j’étais sans autre barrage que l’acquisition d’un certificat d’aptitude professionnelle, sans doute moins ardu que celui de coiffeur ou de fraiseur tourneur, bref me voilà avocat, stagiaire, certes, mais avocat quand même, avec le costume qui va avec que mon père – qui me voyait plutôt magistrat – s’est fait un plaisir de m’offrir !

Si l’appellation d’avocat « général » est réservé au membre du parquet qui requiert devant la Cour d’Assise, il n’existe pas d’avocat de 2° puis de 1° classe, principal ou autre : bref il n’y a pas de grade comme dans l’armée ou chez les fonctionnaires en général, on est avocat un point c’est tout : c’est la fonction qui prime et non le grade et la robe n’en porte aucune trace distinctive

Je verrai plus tard que l’expérience s’acquiert au fil des années

Ce faisant, je m’alignais sur une tradition familiale pour ne pas dire génétique, me conformant à une lignée ancienne de juristes et hommes de loi, en commençant pas mon grand père maternel, Pierre HUARD de VERNEUIL (1878-1940), avocat au barreau de CHATEAUROUX, mais dont l’activité professionnelle se limitait à la participation au banquet annuel de l’Ordre, jusqu’à ce que, à la faveur d’une « belle guerre » qu’il avait terminé comme chef de bataillon au 90° RI et titulaire de la Légion d’Honneur, il intègre la magistrature en 1932 à l’issue de la crise économique de 1929 qui avait porté un sérieux coup à son train de vie ; son beau père, Albert MOULINEAU (1840-1913), fils de magistrat à CHATEAUROUX, avocat général à Amiens, avait préféré, quant à lui, donner sa démission plutôt que de requérir l’application des lois du « petit père Combes » contre les congrégations, il était le gendre de Jules Ultimar LE HELLOCO (1821-1898), d’ascendance bretonne, plus précisément, de la vallée de l’Oust, doyen des Juges de Paix de PARIS, lui-même gendre d’Alphonse FOUGERON (1790-1875) conseiller à la Cour d’Appel d’ORLEANS, voilà pour la branche maternelle

Du côté de mon père, Eugène DANIEL (1811-1881), son arrière grand père, fils de magistrat à BEAUVAIS, conseiller à la Cour d’Appel de PARIS ; c’est lui qui a, en 186O, instruit le procès de Jules Isaac MIRES, patron de presse et financier véreux dont la fille unique deviendra néanmoins la princesse Alphonse de POLIGNAC, mathématicien, fils du prince Jules, 1° ministre du roi CHARLES X à la veille des 3 glorieuses (27/29 juillet 1830)

MIRES, ayant pour avocat, M° Adolphe CREMIEUX, futur garde des Sceaux en 1870, sera condamné le 11 juillet 1861 à 5 ans de prison ferme par le Tribunal correctionnel de PARIS pour escroquerie et faux, il sera par la suite relaxé par la Cour d’Appel en avril 1862, puis réhabilité par la Cour d’appel de DOUAI. Ce sera une des premières affaires politico financières qui sera suivie par beaucoup d’autres jusqu’à aujourd’hui ; elle valu la croix de la Légion d’Honneur à mon aïeul

Eugène DANIEL était le gendre de François JALLON (1797-1862), Conseiller à la Cour de Cassation

Et Hyacinthe FOUGERE (1809-1883), arrière grand père maternel de mon père, également fils de magistrat à MONTARGIS, ancien avocat à CHAMBON sur VOUEYZE dans la Creuse, Président du Tribunal Civil de 1° instance d’ISSOUDUN, redoutable bonapartiste

C’est à la faveur de la révolution et plus particulièrement des lois LE CHAPELIER, député de RENNES, des 19 et 21 mars 1791, proclamant la liberté d’établissement et donc la suppression des corporations, que les DANIEL, bouchers à BEAUVAIS, les MOULINEAU, charrons à CHATEAUROUX et les FOUGERE, serruriers à ISSOUDUN, notamment, ont pu quitter leur statut d’origine pour accéder, grâce à des fonctions judiciaires, d’abord modestes et locales, à un statut bourgeois plus conforme à leur situation de fortune, acquise au fil des siècles, confortée par des unions matrimoniales judicieuses

Lourde hérédité donc, susceptible de justifier et mon prénom et mon état

La vocation se dessinera finalement au fur et à mesure de la découverte de cette profession sous la houlette de mon maître : Jean Marie LELOUP, alors professeur à la Faculté de Droit et avocat à la Cour d’Appel de POITIERS grâce auquel je serai nommé assistant des Universités – il n’y a pas meilleure façon d’apprendre une discipline que de l’enseigner – et qui me prendra dans son cabinet où je verrai que le droit est un outil au service de la justice, plus exactement que le droit n’est pas qu’une matière universitaire donnant lieu à de belles constructions intellectuelles mais qu’il est destiné à être appliqué concrètement pour le soulagement de la misère humaine et plus précisément la résolution du problème exposé par la personne qui vous le confie : le client

Soit le procès est pendant devant la juridiction saisie par l’adversaire et il s’agit de défendre, soit il s’agit de l’introduire, c’est à dire de poser, à temps et au bon juge, la bonne question qui permettra de résoudre le conflit qui mine le demandeur

« il n’y a que le veau qui gueule qui tète » m’enseignait sagement mon beau-père breton qui n’avait pourtant rien d’un maquignon mais était un observateur averti de la vie campagnarde

Si la situation est intolérable elle ne doit pas être tolérée : « depuis combien de temps dure-t elle ? »

« oooooh, depuiiiis……fatigué !», comme on dit en Afrique ; mais si elle dure ainsi, elle n’est pas si intolérable que cela, « comment voulez vous que moi, juge, j’analyse la situation plus sévèrement que vous-même, qui êtes le premier concerné, ne le faites ! »

Des accommodements ont été trouvés qui rendent alors superflu le recours tardif au juge qui, par définition, ne saurait se saisir lui-même

Le juge juge : il donne raison à l’un en donnant tort à l’autre, ce faisant il fait forcément un mécontent : celui qui perd, pour lequel la faute en revient inévitablement à son avocat qui est mauvais, ou encore carrément au juge, forcément vénal, que l’adversaire a acheté, soit les deux à la fois ; pour celui qui a gagné, c’est normal, son bon droit a été enfin reconnu, la thèse qu’il a exposée, retenue par le juge, il ferait beau voir que son procès lui coûtât quoi que ce soit

En matière pénale, c’est le parquet qui poursuit devant le tribunal de Police, Correctionnel ou devant la Cour d’assise selon que les faits reprochés au malheureux prévenu ou accusé sont qualifiés de contravention, délit ou crime : « mais comment pouvez vous défendre cet individu que vous qualifiez d’emblée de « malheureux » alors que vous savez pertinemment qu’il est coupable ? »

Hé oui, c’est la beauté de notre métier : défendre l’indéfendable, parler pour lui. Oh ! Il ne s’agit pas de nier l’évidence ni de justifier l’injustifiable, mais de tenter d’expliquer, simplement, avec les mots que n’a pas su formuler l’intéressé, le cas échéant, de qualifier autrement des faits par ailleurs constants et quand cela n’est pas possible, de suggérer au juge une peine plus adaptée que celle requise par le parquet dont la sévérité et la rigueur sont de nature !

Enfin, il nous appartient d’expliquer la sanction prononcée, d’assurer auprès du condamné notre rôle d’intermédiaire entre son juge et lui, continuer à lui tenir la main, lui apporter un peu d’humanité dans le cycle infernal qui le broie dès sa garde à vue, quand bien même il en soit l’initiateur, souvent inconscient et involontaire

Oh, vous savez, il y a plus de pauvres que de voyous poursuivis devant les juridictions pénales : les voyous ne se font pas prendre, ou rarement, tandis que les pauvres n’ont pas toujours le discernement suffisant pour déceler à temps la conduite délictuelle et ils ne sont pas suffisamment intelligents pour échapper aux recherches : ils finissent toujours par se faire rattraper

Mais oui, la soif de justice est inextinguible et la rendre est le premier des devoirs de charité

Justice, charité, ce sont là des vertus mises en oeuvre par Yves HELORY de KERMARTIN, Monsieur Saint Yves, licencié « in utroque jure », en droit civil et en droit canon, on pourrait dire aujourd’hui « en droit public et en droit privé »

Sanctus Yvo erat brito

advocatus, sed non latro

quod mirabile populo

En fait, si saint Yves n’était pas voleur, il était en réalité plus juge qu’avocat : s’il lui arrivait de prendre spontanément la défense de personnes, qu’il s’agisse d’un pauvre hère ou de son évêque, abusivement poursuivis en justice, ses fonctions d’official l’appelaient le plus souvent à trancher les litiges qui lui étaient soumis par les plaideurs

Son propre procès en canonisation nous apprends que la principale qualité de la justice rendue par Yves, n’était pas d’être équitable ni même juste, mais simplement « prompte » ; ce qui est intolérable, c’est le déni de justice : mieux vaut une mauvaise justice que pas de justice du tout

Il est vrai que, dans la mesure où la justice est boiteuse, si elle devait de surcroît être rapide, elle trébucherait à tous coups !

Néanmoins, rappelons nous que des mises en état qui durent plus que nécessaire ou des délibérés qui se prolongent heurtent la notion de justice telle qu’enseignée par Yves

Mais pourquoi le révère t on ?

Parce que l’exercice de la justice est d’essence religieuse et que l’on a tendance à l’oublier

Gens de justice et ecclésiastiques, nous portons le même costume professionnel, insigne de cléricature : la robe, avec le rabat et l’épitoge frangée ou non d’hermine, que nous revendiquons, pour nos clients, comme signe d’égalité devant la loi et le juge, comme une soutane qui ne serait pas jetée aux orties

Le rouge de la toge des magistrats de la Cour rappelle la couleur royale, mais sait on que le bleu ciel de la ceinture des juges – sauf pour l’ancien ressort du parlement de PARIS, celui aujourd’hui des Cours d’Appel de PARIS, VERSAILLES et ORLEANS – est la couleur de la Sainte Vierge à laquelle le roi LOUIS XIII consacrera la France, à l’issue de son voeu pour une descendance qu’il finira par obtenir en la personne de son successeur, le futur roi soleil ?

Nous sommes au croisement du sentiment religieux et d’une administration régalienne que l’Etat ne saurait externaliser, sous traiter, ni même confier à une instance supérieure sans perdre son âme

D’ailleurs, nous avons prêté le serment d’avocat, nous avons, en qualité d’auxiliaires de justice, juré d’exercer nos fonctions « avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité » tandis que les magistrats, eux, jurent de « bien et fidèlement remplir leurs fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations, et de se conduire en tout comme un digne et loyal magistrat »

 

Sans doute y a-t-il, même au sein de la république laïque, plus de religiosité à exercer les fonctions de magistrat  et conserver ainsi le secret des délibérations – surtout quand il siège à juge unique ce qui devient le cas général – que celles d’avocat

Monsieur Saint Yves, l’avocat des pauvres est là pour nous le rappeler

Il est souvent représenté entre le riche, couvert et arrogant et le pauvre, humble et tête nue, en robe, la barrette sur la tête, il tient en main le sac de jute cousu qui contient les pièces du procès : y a-t-il plus efficace ordonnance de clôture que de sceller ainsi le dossier, empêchant les parties d’en distraire les documents compromettants ou au contraire d’en ajouter d’autre subrepticement – « l’affaire est dans le sac »

Les pauvres ? Mais qui sont les pauvres aujourd’hui ? Pas simplement ceux qui n’ont pas d’argent, ou pas assez : tous, autant que nous sommes, nous ne sommes pas payés selon ce que nous méritons ; l’argent n’est pas le seul critère de la pauvreté

le RSA qui a remplacé le RMI, l’AAH, les pensions de retraite, tous ces salaires d’inactivité que nécessite notre économie moderne et globale, ajoutée à l’AJ, font que la pauvreté n’est plus tout à fait ce qu’elle était du temps d’Yves HELORY

Il nous faut aller chercher la pauvreté ailleurs, mais pourtant si près de nous : le pauvre reste l’immigré, le chômeur, le conjoint délaissé, le malade mental inadapté à la vie en société, le voisin de palier abandonné à sa solitude, le producteur de lait dont le travail ne suffit pas à le faire vivre

En fait le pauvre ne se fait pas connaître, il n’est ni syndiqué, ni représenté par un porte parole, il ne défile pas dans la rue

De temps en temps, de guerre lasse, il fait la grève de la faim ; on découvre son existence en même temps que son cadavre

L’avocat des pauvres n’est ni avocat d’affaire, ni avocat international, il est le seul porte voix de la personne en faveur de laquelle il est commis d’office par son bâtonnier, l’oublier c’est perdre son âme ou pire, la vendre contre de confortables honoraires

L’avocat d’aujourd’hui ne trahit pas le message d’Yves, l’avocat des pauvres

Mais je ne vous ai pas encore tout dit : je n’avais pas encore obtenu mes diplômes à POITIERS que je rencontrais – à Paris, comme il se doit – Béatrice RIOU du COSQUER, de vieille noblesse bretonne, s’il en fut , fille aînée de  René, 3° du nom, très grand et très puissant seigneur de Brangolo en INZINZAC-LOCHRIST en amont d’HENNEBONT où elle naquit sous les bombardement américains et où nous nous marierons le 24 JUILLET 1971 ; elle prend largement sa part dans mes succès universitaires puis professionnels

C’est ainsi que, berrichon d’origine, je suis devenu breton « par les femmes » ….

Vous ne serez pas étonné, qu’à notre tour, nous prénommions notre fils, né à POITIERS le 24 juillet 1974, Erwan, en bon breton qu’il se revendiquait lui-même, digne descendant de la lignée des DUGUESCLIN et des capitaines corsaires malouins ; il est décédé à Paris, 22 ans plus tard, le 7 avril 1996, d’une leucémie myéloïde, il avait passé avec succès les épreuves de technicien agricole au lycée de Bourges

 

TREGUIER

C’est au cours de notre voyage de noces que pour la première fois j’allais sur la tombe de mon saint patron

Mais c’est plusieurs années plus tard que j’y fus, en robe, à l’occasion du pardon célébré le dimanche le plus proche de l’anniversaire de son décès le 19 mai 1303 ; je me rappelle avoir été frappé par la ferveur des participants à ce qui n’aurait pu être qu’une simple manifestation folklorique, mais qui restait néanmoins le témoignage touchant d’une révérence non feinte à l’égard d’une figure illustre pour le monde judiciaire et breton à la fois

Les bannières, le son des binious, le cortège des ecclésiastiques précédant la chasse reliquaire du chef de Monsieur Saint Yves, c’est à dire son crâne, mais aussi les robes noires et rouges des avocats et magistrats, avec de part et d’autres des costumes professionnels d’autres pays : les perruques des barristers londoniens venus en bateau sur les rives du Jaudy, les robes agrémentées de passementeries des abogados italiens, celles bordées de fourrures d’autres fils de Saint Yves qui réunissait là les juristes de toutes les nations européennes

Par la suite, j’y ai conduit tout un groupe de confrères castelroussins, bâtonnière en tête

Nous en étions revenus avec pleins d’images dans la tête

Nous avions entrepris, Madame LAZES, Présidente du Tribunal de Grande Instance de LORIENT et moi d’y emmener cette année, pour la dernière fois de notre longue vie professionnelle, nos collègues et confrères ; nous nous y sommes retrouvés seuls

La statue d’Ernest Renan trône toujours devant le porche d’entrée de la cathédrale Saint Tugdual, un des 7 saints – il n’y en a pas d’autres – fondateurs de la Bretagne (avec Brieuc, Malo, Samson, Patern, Corentin et Pol)

La campagne s’urbanise inéluctablement entre le centre ville de TREGUIER et le sanctuaire du MINIHY et la procession a perdu de son caractère bucolique et printanier

Mais la ferveur des pardonneurs demeure intacte

SAINT YVES – BUBRY

Mais si le chef en est à TREGUIER, en Côte d’Armor, le bras est à SAINT YVES-BUBRY, en Morbihan et qu’est le chef, sans le bras où siège la force ?

Il faut donc aller à SAINT YVES-BUBRY où le pardon est célébré le dimanche qui suit le 19 mai

Ah certes, il n’y pas le décorum de Tréguier, mais la ferveur y est tout autant présente

Depuis notre installation en pays de LORIENT où, avocat honoraire au barreau de CHATEAUROUX, je me suis réinscrit au barreau le 1° janvier 2000 après un stage de magistrat au Tribunal de Grande Instance de RENNES qui ne s’est pas révélé suffisamment probant pour justifier mon intégration directe dans ce prestigieux corps,  j’y suis fidèle, en robe et barrette, décorations pendantes, pour honorer mon saint patron, à telle enseigne que, régulièrement, le capitaine de la paroisse m’invite à porter l’image de mon saint patron – sa statue – ou le beau reliquaire en argent en forme de bras qui enchâsse la relique de Saint Yves pour la procession vers le « tantad », le feu où sont brûlées toutes nos fautes et nos ressentiments de l’année écoulée

 

Au nord de BUBRY, il y a Bréhédigan et il s’y fait de belles choses

C’est là que tentent de se ressourcer, avec la complicité active du Juge de l’Application des Peines et la patience toute maternelle de monitrices avisées et responsables, les détenus en fin de peine, victimes de leur addiction à l’alcool, qui tentent de se reconstruire avant d’affronter de nouveau les tentations du monde libre auxquelles il leur est si difficile de résister

Ce sont les pauvres d’aujourd’hui, les préférés de Saint Yves et il n’est pas indifférent que le maire de BUBRY les ait accueillis au sein de sa commune, à Bréhédigan

Nann, n’eus ket e Breizh

Nann, n’eus ket unan

Nann, n’eus ket ur Sant’Iwan

 

 

À propos du rédacteur Yves Daniel

Avocat honoraire, il propose des billets allant du culturel au théologique. Le style envolé et sincère d'Yves Daniel donne une dynamique à ses écrits, de Saint Yves au Tro Breiz, en passant par des chroniques ponctuelles.

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