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Parole de la semaine – Solennité de Marie Mère de Dieu (1er janvier)

Amzer-lenn / Temps de lecture : 8 min

Évangile de Jésus Christ selon Saint Luc 2, 16-21

Bien avant que le 1er janvier ne devienne le premier jour de l’année, l’Eglise de Rome rendait hommage à Marie dans l’Octave de la Nativité. Ainsi la liturgie manifestait elle le lien indestructible qui existe entre le miracle de Noël et la bienheureuse Vierge Marie, ce qui n’occultait pas la circoncision de notre Seigneur et l’imposition de son nom. Tous ces actes sont liés à l’Incarnation, signe d’abaissement de Dieu pour le relèvement de l’homme. On peut donc comprendre Noël et tous les mystères qui s’y rattachent comme une véritable prophétie de Pâques.

La liturgie est à la fois adoration et enseignement. Le rapprochement de certaines fêtes ou solennités n’est donc pas insignifiant.

Assez tôt les premiers chrétiens se sont querellés sur la personne du Christ et cela dura plusieurs siècles pour que l’Eglise puisse préciser la doctrine du Christ à savoir comment Jésus pouvait être et vrai Dieu et vrai homme, autrement dit être véritablement notre médiateur et nous sauver, unissant en son unique personne la puissance éternelle et sainte de Dieu à la faiblesse humaine et cela sans altération de l’une ou de l’autre nature afin que la médiation fût réelle et efficace.

Notre propos n’étant pas de faire un cours de théologie mais une homélie, autrement dit de faire en sorte que la parole de Dieu vous sanctifie dans la Vérité, nous ferons abstraction des précisions importantes que les premiers conciles œcuméniques ont apportées à ces questions. Pour en rester à la coïncidence des fêtes, remarquons simplement que la mémoire célébrée le 31 décembre, veille la fête de ce jour, est celle de saint Sylvestre 1er, Pape de 315 à 335.

C’est sous le pontificat de ce Pape que l’empereur Constantin, par l’Edit de Milan en 313, arrêta la persécution contre les chrétiens. C’est ce Pape qui donna sa sanction au premier Concile de Nicée réuni en 325, condamnant l’hérésie d’Arius qui niait la divinité du Christ. Ce Concile rédigea une profession de foi – devenue le symbole de Nicée – dans laquelle le Fils est déclaré consubstantiel au Père. Ce qui n’empêcha pas les querelles de continuer sur la personne du Christ puisqu’il fallut un autre concile à Constantinople en 381 pour mettre fin à ces controverses. Enfin pour ce qui regarde plus directement ce que nous méditons aujourd’hui, la réunion du concile d’Ephèse en 431 qui condamna l’hérésie de Nestorius, patriarche de Constantinople qui, dans le souci de sauvegarder « la sainteté du Verbe de Dieu », laissait penser par ses propos et ses écrits qu’il y avait en Jésus deux personnes, l’une divine, l’autre humaine, ce qui obscurcissait en lui le rôle de médiateur.

Comme saint Cyrille d’Alexandrie l’écrivit à Nestorius, son principal adversaire, dans une lettre qui fut jointe aux actes du concile : « mais quand, sans juger indignes de lui, les limites de l’humanité, Jésus dit aux juifs : « maintenant vous cherchez à me tuer, moi un homme qui vous a dit la vérité » (Jean 10, 30) nous ne le reconnaissons pas moins comme le Dieu Verbe dans l’égalité et la ressemblance avec son père, même marquée par les limites de l’humanité […]. C’est donc à une seule personne qu’il faut attribuer toutes les paroles des Evangiles […] car il n’y a qu’un seul Jésus Christ selon les Ecritures. »

En sauvegardant l’unité de la personne du Christ, saint Cyrille conduisit le concile d’Ephèse à maintenir toute l’autorité des Evangiles, fermant ainsi la porte aux spéculations sur les paroles d’un Jésus dont les unes n’auraient pu être considérées que comme humaines et les autres divines.

Mais on alla plus loin en donnant à Marie le titre de Théotokos Mère de Dieu pour rendre inséparable le divin et l’humain en Christ. Ainsi la première des douze condamnations du concile d’Ephèse dit : « si quelqu’un ne confesse pas que l’Emmanuel est Dieu en Vérité et que pour cette raison la sainte Vierge est mère de Dieu (car elle a engendré charnellement le Verbe de Dieu) qu’il soit anathème ! »

Ainsi doit-il être clair qu’en doctrine catholique l’appellation Marie mère de Dieu a d’abord et avant tout une portée christologique, de même que tout ce qu’on lui attribue, titres, interventions, tant dans sa vie terrestre que dans le monde invisible où elle vit désormais avec son fils, tout cela n’a pour but que de nous rapprocher encore plus de Jésus.

Que le Verbe incréé de Dieu ait été déposé dans les entrailles de Marie par la puissance du Saint Esprit et s’y soit développé comme n’importe quel fœtus humain montre qu’il a assumé une humanité semblable à la nôtre, le péché en moins, puis que la première grâce qu’il fit à sa mère fut de la préserver de l’emprise du pêché originel dès sa conception.

Le corps que la Vierge donna à Jésus fut lui aussi exempt de cette malédiction, recouvrant ainsi toute liberté pour obéir ou désobéir à son père. D’où son obéissance méritoire, non pas pour lui qui n’en avait pas besoin mais pour nous qui ne pouvons rien espérer sans elle.

Marie n’ajoute rien à la sainteté du Verbe de Dieu, tout simplement parce que celle-ci est parfaite, mais en lui offrant un corps sans tâche, par la grâce spéciale liée à son rôle dans le mystère de l’Incarnation, elle lui permet de l’assumer totalement.

Dieu, parce qu’il est fidèle, veut par amour pour nous que nous comprenions le mieux possible toutes les grâces qu’il nous apporte. C’est pourquoi il respecte les règles de la création, même pour ce grand et unique mystère qu’est la naissance virginale. La paternité divine donne tout à Jésus parce que celle-ci est un tout indivisible, la maternité humaine de Marie conçue sans péchés donne à Jésus un corps digne de lui, apte à accomplir la belle et terrible mission que Dieu lui a assignée.

Alors Marie n’a beau être qu’humaine contrairement à son fils, elle va recevoir de lui une grâce particulière du fait de son intimité avec celui qu’elle a conçu. Et tout homme, à moins d’être un monstre, a une qualité d’intimité avec sa mère comme avec nulle autre personne. Il a tant reçu d’elle qu’il veut tout lui donner. Et comme Jésus était l’homme dans sa perfection même, on peut aisément imaginer qu’il ait donné à Marie tout ce qu’il pouvait lui donner.

Voilà pourquoi elle est parmi toutes les créatures humaines celle qui a atteint le plus haut degré de sanctification. Sans jamais recevoir le culte d’adoration, qui est réservé à Dieu seul, dans le mystère trinitaire elle a droit à la vénération la plus grande. Aussi devons-nous grandir dans l’amour de Marie pour grandir dans l’amour de son fils. Cette médiation mariale ne concède rien à la sensiblerie ou à la bigoterie, elle n’ôte rien au Christ. Elle suit simplement et humblement le mode des relations entre humains sauvés du péché, Jésus Christ et Marie.

Et pour nous montrer que cet exemple devait avoir une suite, Jésus a pris soin de confier Marie au disciple qu’il aimait, le seul qui avec les autres saintes femmes l’avait suivi jusqu’à la mort. Le disciple prit Marie chez lui. On connaît la suite, devant le tombeau vide il crut avant Pierre. (Jean 19, 26-27 et Jean 20, 1-10).

L’amour de Dieu et le respect de ces mystères sont toujours les meilleurs maitres en théologie.

Marie mère de Dieu, Marie mère adoptive de Jean, est ainsi la mère de toute l’Eglise et notre mère. A chaque communion où nous augmentons notre intimité avec le Christ ressuscité, n’oublions jamais de la prier pour qu’elle nous aide à recevoir en notre corps celui de son fils avec la même foi qu’elle a manifesté et qu’avec cette communion cette sainte intimité avec le Christ soit comme pour elle source d’un accroissement de foi et d’amour. Et demandons lui ensuite une fois la messe terminée – et toute messe devrait s’achever par un chant à Marie – de nous faire aimer tout l’Evangile avec respect et sentiment d’obéissance, car toutes ses paroles sont divines et par conséquent salutaires.

Quelle meilleure résolution pour commencer une année !

Extrait du livre « A l’écoute de la Bible, homélies Dimanches et fêtes – Année A », Artège 2013, que vous pouvez directement commander via ce lien

À propos du rédacteur Père Michel Viot

Prêtre catholique du Diocèse de Blois, ancien pasteur et évêque luthérien, ancien franc-maçon, il a été aumônier de prison, vicaire épiscopal du Diocèse de Blois puis aumônier militaire chargé des anciens combattants. Il est aujourd'hui au service du Diocèse de Paris. Rédacteur occasionnel pour le blog breton Ar Gedour, certains des articles de son blog sont aussi parfois repris avec son aimable autorisation.

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