Saints bretons à découvrir

SALUT A TOI, CLOCHER DE MA TERRE NATALE

Amzer-lenn / Temps de lecture : 7 min
Tro Breiz st Pol
Départ Saint Pol-de-Léon – Photo Ar Gedour 2017

Parmi les trésors de nos cantiques bretons, nous avons le très beau « Salud  d’oc’h iliz ma farrouz » (Salut à vous église de ma paroisse)  qui chante toute la nostalgie qui nous étreint à la pensée, à la vue de l’église de notre paroisse. L’église qui a  vu la célébration de notre baptême, de notre première communion, de notre mariage, et plus tard, peut-être, qui verra celle de nos obsèques.

Lorsque nous sommes bien loin de l’église de notre enfance, c’est d’abord à son clocher qui, telle l’alouette s’élançant bien haut dans l’azur, monte vers le ciel, et qui se voit de loin comme l’ultime but à atteindre auquel nous songeons.

Nombreux sont les poètes, les écrivains, les peintres qui ont dans leur art magnifié ces symboles de la chrétienté, lesquels, de la plus humble chapelle à la plus prestigieuse cathédrale sont les marqueurs de nos campagnes. Mais ce sont évidemment ceux-là mêmes qui les ont édifiés, tailleurs de pierres entre autres, qui par l’habileté de leurs burins ont fait de ces pierres grossières tirées des carrières,  d’admirables  dentelles de granit, autant d’actes de foi s’élançant vers les cieux.

Les révolutionnaires de 1793 ne s’y sont pas trompés : dans leurs folies iconoclastes pour faire disparaître de nos paysages tout ce qui pouvait rappeler que c’est le christianisme qui les avait, par le dur  labeur des hommes, « sculptés » dans une nature sauvage, ils s’en sont d’abord pris aux clochers, car ceux-ci disaient de cette terre qu’elle était de Dieu, de Sa Mère, de nos saints, de nos saintes, de nos martyrs.

Le 27 juillet 1793, par un décret, la Convention ordonne que soit fondues 100.000 cloches : à charge au commune d’en conserver une seule pour le culte. En 1802, l’autorisation de refaire sonner les cloches … -dans des clochers vides – est donnée. Dès lors, les fonderies reçoivent de toutes les communes de France des commandes si importantes que cette industrie va connaître un essor considérable. En quelques années, toutes les églises qui ont échappé à la destruction révolutionnaire vont retrouver leurs cloches.

Malheureusement, la 1ère Guerre mondiale va être elle aussi, pour les mêmes raisons que sous la Révolution, une grande destructrice de clochers et de cloches, d’autant que les clochers étaient d’efficaces postes d’observations. Une raison supplémentaire pour détruire ceux qui avaient été réquisitionnés pour cet usage.

La 2ème Guerre mondiale sera tout aussi dévastatrice : outre la destruction d’églises, 148.000 cloches seront fondues par l’occupant en France. Mais, dans les autres pays ravagés par la guerre, les destructions seront de même ordre. Dans l’Allemagne écrasée par les bombes, les destructions seront inimaginables, faisant disparaître à jamais un riche patrimoine.

Ainsi, à la haine de Dieu dont le clocher et ses cloches témoignaient en permanence de Sa présence, les hommes y ajoutaient leurs  folies guerrières et le sacrilège en les … désacralisant, en les fondant pour en faire des instruments de mort et de profit.

Mais notre époque qui entend exclure Dieu de partout en considérant que la Croix est dangereuse pour la démocratie, la République et leurs valeurs s’entend très bien à éradiquer tout ce qui Le rappelle : c’est la continuité révolutionnaire et guerrière qui s’active sous une forme « douce » …

 

LE CLOCHER, SYMBOLE DE L’ENRACINEMENT DANS LA TERRE NOURRICIERE

Dans un temps pas si lointain, l’Angélus rappelait à tous que le travail aussi était une prière. Aujourd’hui, si cette pieuse pratique n’a pas encore entièrement disparue, elle est en danger.

Dans nos sociétés où tout semble avoir désormais vocation à être désacralisé, où l’on n’aime guère ce qui n’est pas dans la norme consumériste, le clocher, ses cloches qui marquent les fêtes religieuses dérangent, et chaque heure qu’égrène le son de bronze devient supplice pour celui qui a offert son existence au veau d’or.

Régulièrement, les «petites actualités» nous font part de ces personnes, souvent étrangères à la commune, qui pour le confort de leurs oreilles et de leurs nuits ne peuvent supporter les sonneries des cloches et en réclament le silence.

A leur égoïsme, s’ajoute l’indifférence à la beauté, au sacré, aux expressions de la foi dont elles sont les témoins sonores. Mais, parfois, derrière cette hostilité, se cache aussi une haine de la religion chrétienne, du Christ, de la Vierge Marie, des saints, et un profond mépris pour les traditions. D’ailleurs, ne sont-ce pas les mêmes personnes que dérangent le chant du coq, le hululement de la chouette, les cris du goéland, le tintinnabulement des clochettes des vaches ? Protesteront-elles contre les multiples bruits sonores et ravageurs pour les oreilles des multiples activités urbaines : les  vrombissements des motos, des avions, des TGV, oui !  mais les symphonies de la nature, de la foi, non ! …

Même les oiseaux avaient pris en affection le clocher, et ses combles pour y nidifier. La Maison du Seigneur était aussi leur maison, et personne ne leur contestait ce droit au logement, eux que les envolées des cloches ne dérangeaient nullement. Mais eux aussi ont fini par déranger, car ils souillaient de leurs déjections les murs, nos belles carrosseries et les toits :  l’accès leur a été interdit en grillageant les entrées. Ainsi, chouettes effraies, chevêches, choucas et faucons crécerelles, pigeons et chauves-souris sont devenus  des SDF de nos campagnes. Et avec eux, c’est toute une partie de la poésie et d’une louange divine de la création vers son Créateur qui a été chassée.

Nous avons retrouvé une ode, mise en musique, célébrant cette nostalgie du clocher, mais plus encore le symbole qui exalte la Gloire du Christ, le symbole qui nous invite, comme lui, à nous élever vers le Ciel.

 

 

ODE   AU   CLOCHER

Poésie de Fañch Abgrall / Chœur à  voix mixtes  – MUSIQUE DE JEAN Le Flem

 

Salut à toi, clocher de ma terre natale

Qui, toujours, émergeant avec ferveur,

Qui, toujours, déchirant la brume matinale,

Comme une aubade triomphale

Aura son refrain dans mon coeur

 

Salut à toi, clocher de ma prime jeunesse,

Dont la grande beauté s’avivait à mes yeux,

Au carillon joyeux d’une tendre liesse,

Frôlant d’éternelle caresse

Le clair soleil riant aux cieux !

 

Il me semblait alors que ta pointe effilée

Situait tout là-haut un quelconque infini,

Et la voûte du ciel, maintes fois écroulés,

A chaque regard redressé …

Me retrouvait fort ébahi !

 

Lorsque, dans tes recoins s’abritent les corneilles,

Tu tressailles, surpris de laur chant guttural,

Ne trouvant pas en lui les exquises merveilles,

Faisant à jamais sans pareilles,

Les voix de mon pays natal !

 

Ami, c’est toi, l’abeille qui bourdonne,

Le pigeon roucoulant dans l’ombre du taillis,

Le ruisselet frondeur dont chaque note donne

Douce et charmante « sôn bretonne »,

Sont plus dignes d’être compris !

 

C’est que depuis longtemps, tu perçois des louanges,

Monter avec l’encens dans l’hymne du Seigneur,

Tu voisines ainsi, ton chef avec les anges,

Et tes pieds trempant dans la fange,

T’ont révélé l’humain malheur !

 

Salut à toi, clocher de ma terre natale,

Compagnon averti de l’immuable sol,

Vers toi, contemporain d’époque colossale,

A l’âme forte et virginale,

Mes souvenirs prennent leur vol,

ode aux clochers

 

Note : Nous n’avons pas davantage de précision sur ces deux personnes. Peut-être, des lecteurs ont-ils quelques renseignements les concernant ?

À propos du rédacteur Yvon Abgrall

Publiant régulièrement des articles dans la presse bretonne, il propose pour Ar Gedour des articles documentés sur le thème "Feiz & Breizh" (foi et Bretagne), d'un intérêt culturel mais aussi ancrés dans les préoccupations actuelles.

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Un commentaire

  1. Curieusement, le cantique : »Iliz ma farroz », qui au départ était un cantique pour la fête de la dédicace des églises, est devenu un cantique pour les obsèques à connotation fortement nostalgique. Effectivement, quand on est devant l’éternité, on réclame d’autant plus ses racines… Il serait bon que ce mahnifique cantique retrouve sa fonction originelle (fête de la dédicace d’une église), ou retrouve son rôle de chant d’action de grâces pour la maison du Seigneur !

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