[TRADITIONS] Gwener er Groéz, ou le Vendredi de la Croix en Bretagne morbihannaise

Amzer-lenn / Temps de lecture : 3 min

D/ Ged goèd santél un Doué skhuilet,  Keijet a-hoél ho tareù,  O kristenion amañ tolpet  Eid kleùed holl é boénieù.  Pen d é eidom-ni, péherion, Éma marù hiniù hon Doué, Ret e vo deom a-greiz kalon  Er harein ‘pad hor buhé. 

R/ Au précieux sang d’un Dieu versé, mêlez au moins vos larmes, ô chrétiens ici assemblés pour ouïr le récit de ses douleurs. Puisque c’est pour nous, pécheurs qu’est mort aujourd’hui notre Dieu, il nous faudra du fond du coeur l’aimer tout au long de notre vie.

Gwener er Groéz, le « Vendredi de la Croix », c’est-à-dire le Vendredi Saint, était un jour de grande pénitence. A Plouhinec, la matinée était chômée et l’on allait après l’office ramasser les coquillages nécessaires au repas. Ce jour-là, dans tous le pays, l’on avait coutume de laisser les boeufs se reposer car, en leur mettant le joug, on risquait de les faire dépérir.

« P’arriù Guéner er Groéz é vé degaset er seud d’en anhoé » (Quand arrive le Vendredi Saint, on conduit les bestiaux à la sieste).

Les jeunes gens, par groupes de trois ou quatre, allaient chanter la Passion en portant un grand panier où ils déposaient les oeufs qu’on leur offrait. A Lescoët-Gouarec, garçon et filles se réunissaient sur une hauteur pour réciter quatre longs cantiques devant la lune et les étoiles (dirag el oer hag er stired), cantiques humbles et pathétiques où l’on voyait Notre Dame égrener son chapelet au pied de la croix.

A Pont-Scorff aussi la Vierge de la complainte était bien humaine et bien pitoyable. Elle partait avec Saint Jean pour savoir où était son Fils. Trois jeunes gens qui venaient d’assister à la crucifixion du Sauveur, lui en faisaient le récit sur la route et par trois fois, en les écoutant, Marie tombait sur le sol, puis elle demandait son chemin ; « Vous irez, lui répondaient-il, par le sentier des petites landes, et vous entendrez frapper sur les clous » Marie ne pouvait pas marcher, ayant des larmes plein les yeux. Quand elle fut rendue à la croix, elle monta trois barres de l’échelle et implora les bourreaux : « laissez-moi embrasser mon Fils ! » et Jésus lui donna son mouchoir chargé des sept sacrements…

Des Passions analogues se chantaient à Riantec, à Lanvaudan, presque partout. Parfois, comme à Surzur, à Sauzon, à Erdeven, à Arzon, c’était la veille du Dimanche de la Passion que l’on entonnait les cantiques aux portes des maisons. Parfois aussi, c’était la veille de Pâques.

Retrouvez aussi l’un de nos collectages de la Passion chantée en pays vannetais. Cette Passion de Baud est très précieuse, car elle fut mise par écrit en 1944 pour une mission paroissiale. L’air est celui de l’hymne Vexilla Regis (à peu de choses près).  Cliquez ici pour accéder à l’article.

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Extrait de « En Bretagne Morbihannaise » – Buffet

Illustration tirée de « Eurioù Pasion an Aotrou Krist / Les Heures de la Passion de Messire Le Christ » de Yann-Vari Perrot, Herry Caouissin et Felix-Pol Jobbé-Duval. Vous pouvez acquérir cet ouvrage en cliquant sur ce lien.

À propos du rédacteur Eflamm Caouissin

Marié et père de 5 enfants, Eflamm Caouissin est impliqué dans la vie du diocèse de Vannes au niveau de la Pastorale du breton. Tout en approfondissant son bagage théologique par plusieurs années d’études, il s’est mis au service de l’Eglise en devenant aumônier. Il est le fondateur du site et de l'association Ar Gedour et assure la fonction bénévole de directeur de publication. Il anime aussi le site Kan Iliz (promotion du cantique breton). Après avoir co-écrit dans le roman Havana Café, il a publié en 2022 son premier roman "CANNTAIREACHD".

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