Un prêtre vous répond : « amour ou charité ? »

Cène du Seigneur (Rumengol - 29) / Photo EC (DR)
Amzer-lenn / Temps de lecture : 4 min

Une nouvelle rubrique voit le jour sur AR GEDOUR sous le titre « Un prêtre vous répond / Respont a ra ur beleg deoc’h » : il suffira à nos lecteurs de nous poser une question, et Tad Kristof, prêtre ayant nouvellement intégré l’équipe de rédacteurs, y répondra. Parfois, d’autres prêtres seront sollicités pour répondre à vos questions. Seul votre prénom (ou pseudonyme) apparaîtra sur la réponse, de manière à garder votre anonymat.

« De plus en plus on entend le terme amour remplacer celui de Charité. Que pensez-vous de ce glissement sémantique ? » – Pierre 

 

Pierre,

Il est dans la théologie, l’exégèse ou l’éthique, comme de toutes les dites sciences académiques un snobisme qui, pour sembler savant, use d’un artifice qui feint de l’être autant. Celui-là, je le dis, s’appelle sémantique et consiste, je crois, en l’emploi que voilà : faute de dire le vrai on expose le faux et pourvu que l’on plaît, on peut faire fi du vrai. Ainsi l’on peut parler en toute impunité pourvu que ce soit fait avec sincérité.

Pardonnez moi d’avoir joué le savant lettré, Pierre. Vous avez deviné que je joue celui qui joue des mots. Or il me semble que bien des platitudes se font sous ce couvert là.

Imaginez vous qu’on puisse titrer le passage de la  première lettre de St Paul aux Corinthiens (12,31.13,1-13) : Hymne à l’agapé, puisqu’il ne s’agit pas de l’eros ni de la philia ?

Que pour un exposé savant on puisse se référer au vocabulaire et subtiles réflexions de nos maîtres antiques me parait fort intéressant et instructif.  Mais les subtilités ne doivent pas devenir telles qu’elles contraindraient à ne plus reconnaitre les synonymies. Car c’est une originalité de la langue française que de pourvoir un champ sémantique fait de synonymes. Certes les mots ont bien souvent quelques nuances mais on peut en user alternativement afin d’éviter les répétitions. Les linguistes décortiqueront les textes mais il faudra tenir copte du fait que l’on passe d’une langue à une autre agapé de racine grec et caritas latine.

Caritas semble plus proche de notre vocabulaire puisque sa phonétique produisit le mot charité, agapé n’eut pas la même fortune.

Puisqu’il faut honorer une différence entre les deux mots que vous proposez, je me risquerais à les distinguer ainsi :
La charité semble désigner de façon active l’amour en des veines telles que le pardon sans limite (Matthieu 18, 21-22), la patience qui rend le bien pour le mal (Romains 12, 14-21). Dans son hymne à la charité (1 Corinthiens 13), Paul nous fait découvrir le sens et la grandeur de l’amour en acte où toutes les dimensions de la vie trouvent leur valeur dans la charité. Pour Paul la charité qui survivra à tout, même à l’espérance et à la foi ). La charité, décrite ainsi, est la mise en œuvre de l’amour de la manière la plus parfaite, car elle est une imitation du Christ qui Lui même, par son incarnation, fait voir et réalise ici bas l’amour divin.

Ainsi peut-on comprendre cette hymne très ancienne de l’Église d’Occident, utilisée lors du geste du lavement des pieds durant la liturgie de la Cène : «Où sont amour et charité, Dieu est présent». 

C’est donc pourquoi, il me semble inutile de crisper le débat en absolutisant la préférence pour l’un ou l’autre mot pourvu que la lettre des textes soit respecté et plus encore l’esprit de ceux-ci à la lumière de la révélation.  En guise de conclusion, Pierre, permettez moi de vous suggérer en la matière ce conseil : « Ah gars, Paix ! « 

JE POSE MA QUESTION A TAD KRISTOF : 

(vous n’êtes pas obligé de mettre votre nom : un prénom ou un pseudonyme peuvent suffire)

    Votre nom / Hoc'h anv (obligatoire / endalc'hus)

    Votre email / Ho postel (obligatoire / endalc'hus)

    Sujet / Danvez

    Votre message / Ho kemennad

    ATTENTION : les messages que vous envoyez à cette adresse sont consultés par le directeur de publication d’Ar Gedour et / ou le webmaster, avant d’être envoyés à Tad Kristof. Si vous souhaitez évoquer des questions plus personnelles avec un prêtre nous vous invitons à entrer en contact avec le recteur de votre paroisse.

    À propos du rédacteur Tad Kristof

    Tad Kristof a été ordonné prêtre en juin 2000. Il a exercé notamment en Afrique où il a créé "Tud a Vreizh" à Libreville. Passionné par la Bretagne, il contribuera à la dimension spirituelle d'Ar Gedour en répondant aux questions qui lui seront posées.

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