Nos sociétés, notre civilisation européenne, jadis si brillantes en élites, ont, en ce début du 21è siècle, un grand déficit d’hommes, de femmes de références. Par contre, on butte à tous les pas sur la médiocrité reconnue comme une valeur sûre, matrice de tous les ludions qui entendent penser et agir pour notre «plus grand bien». Faux prophètes à qui l’Evangile de l’Apocalypse de Saint Jean a depuis longtemps réglé le sort…
La Bretagne, hélas, n’échappe pas à cette engeance néfaste. Notre question pour hasardeuse et provocante qu’elle soit, se justifie. Certes, en tous domaines, des élites, la Bretagne en a toujours eu, en a, et en aura encore ; c’est du moins à espérer… Alors, pourquoi cette question ? Parce qu’il y a précisément aujourd’hui un problème, par défaut, d’élites bretonnes. Encore faut-il s’entendre sur ce qu’est vraiment une élite.
Voyons ce qu’en dit le dictionnaire :
« Une élite, c’est ce qu’il y a de meilleur, de plus distingué. C’est encore une personne qui a été élue. »
Cette définition sous-entend qu’une élite, puisqu’elle est censée être ce qu’il y a de meilleur, de plus distingué dans la société, y a été préparée. En effet, il tombe sous le bon sens qu’une élite ne surgit pas « comme ça », comme un escargot ou un champignon qui sortent après la pluie. Ce qui sous-entend encore qu’elle se forme très tôt…dès l’enfance. On dit « qu’un enfant est imprimé à 4 ans ». Sur le plan chrétien, ne dit-on pas que c’est sur les genoux de la mère que l’enfant apprend à prier, à découvrir Dieu, à croire. Ce qui n’exclut en rien le rôle tout aussi important du père. Autrefois, l’école, l’apprentissage, sans parler de tous les autres « corps » avaient pour mission de former des élites, mais certainement pas des égos surdimensionnés, qui ne « brillent » que par les modes, la bien-pensance, et l’adoubement des médias.
Ce qui contredit les adeptes d’une éducation laxiste qui veut que l’enfant, l’adolescent choisisse «plus tard», c’est le fameux «on verra ça quand il aura 18 ans !» L’ennui, c’est qu’il est alors trop tard sur bien des points. On ne le sait que trop : nos sociétés qui se vautrent dans les caniveaux de l’immoralité convertie en lois, en « valeurs de la République », menant à la négation du divin, s’entendent à briser net les vocations d’élites. Certes, on peut toujours changer, s’améliorer, prendre une autre voie, car c’est encore « par l’effort qu’on mérite et qu’on obtient », mais le prétendant à être une élite le sera d’autant mieux que cette qualité qui lui sera reconnue sera le fruit d’une longue et patiente préparation, et mieux, d’une éducation. Jadis, on préparait très tôt les enfants à devenir professionnellement des personnes responsables, que ce soit dans le métier des armes, la fonction publique, l’artisanat, le métier de la terre ou de la mer, voire une vocation religieuse, sans parler de la fonction suprême dans les monarchies. On voulait des « gens de qualité ».
Or, de nos jours, où le nivellement par le bas est au programme des gouvernements qui se succèdent, l’élitisme authentique, qui sous-entend une sélection jugée « discriminatoire » n’a pas bonne presse. Nous savons combien l’Education Nationale, qui est surtout une éducation apatride, est une usine à fabriquer des contre-élites. La notion d’élite est associée à certaines formes de régimes autoritaires, ou encore à une époque, style « Ancien Régime » et supposés « privilèges » de classe. Pour certains idéologues, l’élite est le produit d’une discrimination : on retire donc les mérites de l’effort. L’élite est coupable d’avoir aspiré à être le « meilleur de la société » ; elle est coupable d’avoir voulu se distinguer. Curieusement, le sport admet encore la notion d’élite, à condition, dans bien des disciplines, de faire bon marché de tout sens moral, de l’honneur, d’être pour certains des « mercenaires » du sport, ce qui est tout le contraire de l’élite vraie.
Toute personne est appelée à devenir une élite ; cette qualité n’est absolument pas réservée à une « classe sociale », comme par exemple la noblesse, la bourgeoisie d’affaire, le monde politique, de même dans la hiérarchie sacerdotale. Certes, le jeu plus ou moins honnête, trouble du « piston » et des influences peut fausser cette ascension, mais les intéressés se mettent d’une certaine manière «hors-jeu» même si la société leur accorde quelque crédit.
Nous avons tous connu, ou nous connaissons des personnes qui excellent dans leur discipline, sont des « maîtres ». Bref, elles sont des élites, car elles ont tendu à être les meilleures dans la voie qu’elles avaient choisies.
ON NE S’AUTO-PROCLAME PAS ELITE…
Quant aux médias, nous savons qu’ils affectionnent tout particulièrement les fausses élites : bateleurs d’estrades, histrions, pense-petit, «artistes» dérisoires, politiciens incompétents, dinosaures inamovibles de la politique. L’Eglise même, et c’est assurément le plus affligeant, ne se trouve que trop en déficit d’élites. Le chrétien, le catholique conscient des enjeux spirituels et civilisationnels présents pour notre monde, et tout particulièrement notre Europe, enrage des défaillances incompréhensibles de certains de ses pasteurs. Dans ces constats, l’Esprit Saint semble avoir pris congé de bien des esprits que l’on croyait pourtant formés et solides.
Mais est-ce vraiment suffisant d’être le meilleur dans sa discipline, dans son métier, et de s’en tenir là ?
A vrai dire, non ! Une élite, non pas parfaite car cela n’existe pas, mais qui cumulerait, non pas des « valeurs », notion vague et abstraite, mais des vertus qui parachèvent l’élite, est aujourd’hui une espèce rare. C’est à qui s’autoproclamera « élite », et comme le qualificatif est devenu un « gros mot », le prétendant se dira ou se fera reconnaître comme « expert » de ceci ou cela, avec d’autant plus d’insistance qu’il est ignare dans le domaine qu’il prétend connaître. A titre d’exemple, il suffit de constater que notre époque n’a jamais été aussi prodigue en philosophes auto-proclamés. A cette aune, notre société devrait être empreinte d’une profonde… sagesse. On dira même d’une personne, non pas qu’elle est une élite, mais « humaniste », mot-valise adaptable à « chaque cas ».
LES VERTUS CHRETIENNES, VRAIES SOURCES D’ELITES
Puisque nous avons parlé de vertus, nous nous placerons uniquement sur le plan chrétien en faisant référence aux vertus chrétiennes : les trois théologales : la Foi, l’Espérance et le Charité, mais aussi les Sept dons de l’Esprit-Saint qui peuvent être regardés comme des vertus qui forment un homme, une femme complets.
Nous ne disons pas que ces personnes n’existent pas, mais le moins que l’on puisse dire est qu’elles ne se manifestent guère dans la vie publique, et surtout dans la vie politique.
Bien sûr, Saint Paul disait « Que le bien ne fait pas de bruit, et que le bruit ne fait pas de bien », mais, en ces temps où tous est incertain parce qu’il n’y a plus en rien de certitudes, où tout est remis en question, nous avons soif de rencontrer des élites. Pas seulement des élites dans les arts, la musique, la littérature, la technologie, la science ou autres professions, et qui ne sont que ça, et rien de plus. Non ! Une élite qui par une certaine transcendance morale, culturelle, spirituelle soit comme un point de repère, une balise, un phare, une lumière pour la personne qui la rencontre, que cette élite ait ce « plus » qui fera d’elle cette « autre personne qu’on attendait »
LES AVERTISSEMENTS DE DOM ALEXIS PRESSE
Plaçons-nous sur le plan breton, de la Bretagne, puisque c’est la question posée.
Le moine breton cistercien, Dom Alexis Presse, restaurateur de l’abbaye de Boquen (Botgwenn en breton), avait, à son grand regret, dans les années d’après la dernière guerre, constaté chez les Bretons cette chute d’élites, et que ce phénomène, bien qu’il ne voulait pas non plus désespérer, ne pouvait qu’aller en s’aggravant :
« Nous Celtes, avons cette prérogative précieuse de la ténacité, de la persévérance dans les poursuite du but, c’est ce qui explique tant de réussites, même et bien souvent inespérées. Je dirai inconcevables à ne se placer qu’en point de vue humain habituel ordinaire. Quel malheur de constater à côté d’une qualité si précieuse, si éminente et si efficiente, une tendance presque générale à l’individualisme, à la dispersion, à la division. En chacun, des ressources admirables, formidables même d’énergie, de ténacité, impossible à regrouper, d’unifier toutes ces potentialités, toutes ces forces pour un but commun. On formerait pourtant un faisceau de puissance auquel rien ne pourrait résister ; à cela, pas le moindre doute : mais qui formera ces élites bretonnes et chrétiennes dont nous aurons demain tant besoin ? Qui formera et maintiendra ce faisceau ? Monsieur Perrot avait réussi, lui, à former ce magnifique faisceau de forces bretonnes. Et c’est parce que les adversaires avaient constaté la puissance de ce faisceau et pressenti ses futures possibilités qu’ils l’ont sauvagement supprimé… »
« Immanquablement le dynamisme et l’efficience de l’élément breton diminueront et finiront par disparaître. C’est chose profondément triste. Quant à nous, ne nous laissons pas berner par les chimères perfides. Si elles séduisent ou encore ensorcellent beaucoup de nos compatriotes naïfs, que cela ne nous fasse pas dévier de notre ligne » (Dom Alexis Presse – archives inédites Ar Gedour)
Ces extraits de deux lettres écrites le 12 avril 1955 avril et le 25 avril 1959 à Herry Caouissin, dans laquelle il s’inquiétait avec raison et angoisse du devenir de l’abbaye qu’il avait restaurée et fondée, constate précisément ce déficit d’élites, tout particulièrement bretonnes, aussi bien dans la vie civile que religieuse. Il s’insurge contre les causes de ce déficit annoncé : le laïcisme jacobin et les prétentions des gouvernements issus de la guerre à remettre en place les hommes, les institutions, les lois qui vont à l’encontre de la « Loi divine », du « Bien commun », et qui par le passé ont donnés les preuves de leurs incompétences et de leurs nuisances. Il dénonce ces hommes, majoritairement antichrétiens, francs-maçons qui n’ont de cesse de travailler à la destruction de ces élites et à s’assurer qu’il n’y en ait plus à l’avenir, d’où en tout, la nécessité d’un nivellement par le bas. Mais il s’insurge aussi contre les Bretons qui ne facilitent que trop par leur esprit de division les basse-œuvres de leurs ennemis.
Et Dom Alexis Presse de se réfèrer encore à l’abbé Perrot :
« Il voulait de toutes ses forces s’opposer à la pénétration de l’antichristianisme et du matérialisme en Bretagne, par le maintien de la Tradition et de l’esprit celtique foncièrement chrétien. Que dans certaines sphères on ne l’ait pas compris et qu’on ne l’admette pas, peu importe. Il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Mais cela ne change rien à la réalité des choses, et nous, nous savons à quoi nous en tenir »
Car, le Recteur de Scrignac avait dès ses années de séminariste compris que le poison de la laïcité, concocté dans les officines maçonniques, par nature antichrétiennes, avait pour but de détruire, dès l’enfance, toute possibilité d’émergence d’une élite, car suivant leur devise, il était impératif de «dissoudre et coaguler» dans le fatras du cosmopolitisme. Or l’idéal de l’abbé Perrot, comme celui de Dom Alexis Presse, de Dom Godu, et de bien d’autres personnalités religieuses et civiles, était de faire naître, renaître des élites ; mais des élites chrétiennes…et authentiquement bretonnes, et ce dès l’enfance, dès l’école, dès le séminaire. C’est la raison pour laquelle le combat de l’abbé Perrot se situera beaucoup sur le plan de l’école chrétienne et du catéchisme. Une école où la Foi est vraiment enseignée, mais aussi l’amour de la Bretagne, sa langue, sa culture, son Histoire.
Dom Alexis Presse et l’abbé Perrot : deux grandes figures d’une Eglise de Bretagne, qui se voulait bretonne, et qui savaient parfaitement qu’il était vain de se battre pour sa foi, sa culture, ses traditions propres et sa langue, d’envisager même un avenir, si le souci de former des élites n’était pas pris en compte.
Pour nous donner une limite, un horizon, ne remontons qu’à la seconde moitié du 19ème siècle jusqu’à la fin des années 1970, début 1980 : la Bretagne a eu une authentique élite en tous domaines. S’il fallait des preuves, il suffirait de se pencher sur l’incroyable explosion de talents les plus divers qu’a connu la Bretagne entre la fin du 19ème siècle et 1944.
Ces talents se sont exprimés autant dans les milieux artistiques avec l’association des « Seiz Breur » ou «An Droellen» que dans le monde littéraire, artisanal, en politique et en économie que dans le clergé. C’est si vrai, qu’aujourd’hui encore les œuvres de cette élite font référence, et sur certains domaines n’ont pas encore réussie à être égalées.
C’est à dessein, que nous ne citons pas de noms, excepté les trois prénommés, car les citer impliquerait de faire des parallèles actuels dans lesquels certaines personnes de par leurs fonctions et de par leur notoriété pourraient fort bien se reconnaître. Laissons donc aux intéressés le soin de s’interroger, surtout lorsqu’elles se posent en vestales de la culture, de la foi, de la politique, et distribuent en toutes occasions, leur « morale » de trocs-et-puces.
L’élite se formait donc dès l’école, qu’elle fut privée ou public, où elle se formait sur les bancs du catéchisme et de l’église. C’était l’époque où le beau, le vrai, le sens de l’honneur et de la parole donnée étaient la base de toute bonne éducation, où la morale osait tenir sa place, et que l’amour de la Patrie n’était pas une maladie honteuse. C’était le temps où l’homme (la femme) aspirait à être un(e) « Honnête homme/femme » comme on disait, à être de « bonne race » (étant entendu que ce qualificatif n’avait aucune connotation racialiste). On disait encore « être bien-né », et cela n’était pas une question de « classe », mais du désir profond d’être le ou la meilleur(e) dans sa voie, dans sa vie.
C’était encore le temps où « sur mon honneur, devant Dieu et devant les hommes » celui ou celle qui prononçait ces paroles s’engageait, car la promesse ne pouvait souffrir la moindre trahison… sauf à déshonorer l’intéressé. Il est vrai que de nos jours, que ce soit en politique ou en tout autre domaine, « les promesses n’engagent que ceux qui y croient ». Il n’est donc pas étonnant qu’aucune élite ne puisse naître avec un tel bagage mental…
L’écrivain Michel de Saint-Pierre, dans son livre « Les Nouveaux Aristocrates », faisait dire à l’un de ses personnages, noble authentique, que
« La vraie noblesse était d’abord, non pas celle du nom, mais du cœur, de l’esprit, de l’âme. La vraie noblesse ne s’affichait pas »
En effet, elle n’avait pas besoin de l’être, car justement, la véritable aristocratie était dans les qualités évoquées, qualités qui faisaient les élites, quel qu’en fut le « milieu ». Cette réplique de l’écrivain s’adressait à un personnage falot de son roman, nouveau riche, s’imaginant par sa fortune être une élite, alors qu’il n’était qu’une « élite de l’argent et de la politique », se croyant ainsi autoriser à jouer les aristocrates. Or, aujourd’hui, ce type de personnage, médias aidant, n’encombre que trop la vie.
Si de nos jours, il y a de multiples talents qui dans leur spécialité sont des références, ce sont presque toujours des talents amputés de la dimension spirituelle. Tout se pense, se conçoit, se réalise, s’arrête à la dimension matérialiste, quand ce n’est pas à la dimension du consommateur, ce fameux monde consumériste. Si en Bretagne il y a eu dans la période pré-citée, sans oublier celles antérieures, tant de chefs-d’œuvre produits par une ou des élites, c’est que cette dimension spirituelle était la norme. Lorsque l’on étudie cette époque, ce qui frappe, c’est la puissance de la dimension spirituelle des personnes et de leurs œuvres, c’est ce qui a donné leur force, leur éclat, car elles étaient le produit de la vérité, de la beauté. Cette élite n’a pas fait dans l’éphémère, mais dans la durée. Or aujourd’hui, on fait dans « l’instant », dans le « tout-jetable », et notre société a réussi à fabriquer « l’homme jetable », comme un vulgaire kleenex. Alors pourquoi aspirer à des élites ?
Le monde associatif en Bretagne est riche d’initiatives et de bénévolat. C’est une très bonne chose, sauf que pour une grande majorité de ces associations, il leur manque cette dimension élitiste : on est trop souvent dans l’instant qui se traduit par l’éphémère, ou encore l’émotif qui dicte les comportements, les actions, les objectifs. Ni pour l’œuvre entreprise, ni pour les hommes, on est dans la durée, d’où leur fragilité. Et qui n’adopte pas ces comportements, se retrouve vite marginalisé. Il n’est pas bon de tendre à se distinguer de la masse…
L’élite dans notre Eglise
C’est dans l’Eglise qu’on aspire à trouver cette élite, or il nous tarde de la rencontrer. Jadis, les séminaires « fabriquaient » cette élite religieuse, qui pouvait aller du dévoué et humble recteur de campagne à l’évêque, au moine, à la religieuse. L’histoire religieuse de la Bretagne, son Histoire même, est riche d’exemples d’hommes et de femmes qui aspirèrent à être de cette élite, non pas pour eux-mêmes, ce qui aurait été du plus vulgaire orgueil, mais d’être au service des autres, à être une élite « dans le Christ » pour servir au mieux. Et c’est alors leur vie en Christ, leurs compétences, leur charisme, leur « aura » qui les feront reconnaître comme telle. L’épître de Saint Paul, du dixième dimanche après la Pentecôte nous parle de ces dons qui font une élite :
« Certes, les grâces sont diverses, mais l’Esprit est toujours le même. Les serviteurs ont des fonctions différentes, mais le Seigneur est toujours le même. Il y a divers genres d’activités, mais en chacune, c’est toujours le même Dieu qui agit.
A chacun, en effet, il est donné de manifester l’Esprit en vue du bien commun. Mais à l’un, l’Esprit donne la Sagesse pour parler. A l’autre, ce même Esprit donne la Science pour enseigner. A un troisième, est donné la Foi, et c’est dans le même Esprit. Au encore, le pouvoir de guérir, toujours dans cet unique Esprit. A celui-ci, le don des miracles ; à celui-là, la prophétie ; à cet autre le discernement des grâces extraordinaire. Tantôt le don de parler les langues ; tantôt celui de les interpréter. Mais dans tout cela, agit l’unique et même Esprit, qui distribue à chacun ses dons particuliers, comme il lui plaît »
Evidemment, ce que nous dit Saint Paul est la conception même de l’élite chrétienne à laquelle chacun est appelé à devenir, une conception que rejette notre société mortifère, qui précisément n’aime plus les élites, surtout si elles sont chrétiennes, car pour ce qui est des fausses élites, façon Pharisiens et faux prophètes, il y a là inflation…
Il est assurément assez dur de le constater, et bien que cela ne soit pas propre à la Bretagne : nous avons bien un déficit d’élites bretonnes. On ne peut prétendre assurer l’avenir d’un pays, de sa culture, de ses traditions, de sa Foi, de son économie, si dans tous ces domaines il y a défaut d’élites.
Au lendemain de la première Guerre mondiale, constatant les bouleversements de la société bretonne, les progrès de la francisation et de la laïcisation, l’abbé Perrot avertissait déjà :
« Si dans les vingt années qui viennent, nous ne parvenons pas à faire naître une élite bretonne qui intègre Foi et culture, il sera alors vain d’espérer dans l’avenir d’une Bretagne encore chrétienne, catholique et bretonne, car le Breton est comme la Foi, ils sont un tout, qui ne s’ampute pas »(YV Perrot – archives inédites Ar Gedour)
C’était en … 1920…
Alors, interrogeons-nous : la Bretagne a-t-elle encore une authentique élite bretonne… et chrétienne ? Prépare-t-elle, et en tous domaines, l’émergence de cette élite qui assurerait la pérennité de la Terre Celtique ?…Ou préfère telle fabriquer un « Homo Britto festivus » qui s’agite dans l’éphémère, et à qui elle remettra son avenir ?
Il serait aussi bon et salutaire, que les Bretons cessent de se poser toujours en victimes de l’Etat français, et face quelque peu leur «mea culpa» sur leurs propres défaillances dont profite justement cet Etat jacobin, et commencent à réfléchir sérieusement sur ce problème. Dom Alexis Presse, l’abbé Perrot, et bien d’autres avec eux, n’ont pas hésité, en leur temps, à œuvrer pour l’émergence de cette élite bretonne et catholique, c’est d’ailleurs ce qui a permis, après les épreuves de la guerre, le renouveau culturel breton des années 1960-1970. Mais, cette élite s’est éteinte, et en ce qui concerne la nouvelle, si tant soit peu elle existe, elle tarde désormais à se faire connaître. Une élite qui ne se compromet en rien avec les chimères idéologiques du monde.
C’est sans doute aussi ce constat de déficit d’élites bretonnes qui fit dire à l’écrivain dramaturge Tanguy Malmanche, que
« La Bretagne était intéressante, mais pas les Bretons »
Jugement sévère, quelque peu injuste, mais expression d’un homme désabusé devant l’insouciance de ses compatriotes ayant déserté tout idéal, et se comportant en peuple moutonnier n’écoutant plus que ses mauvais bergers. Un peuple qui n’a de cesse de se lamenter sur ses propres malheurs et d’en rendre les autres responsables.
Un adage dit « qu’un peuple a le destin qu’il mérite », mais il a d’abord les élites qu’il mérite, ou qu’il se donne, et celles-ci peuvent le mener vers le meilleur… ou le pire…
Et si on posait la question autrement : « Comment former l’élite bretonne de demain ? (puisque celle d’aujourd’hui fait défaut) » ?
De quels outils disposons-nous actuellement pour former les cœurs, les intelligences qui permettront à la Bretagne d’avancer et de prospérer parce qu’enracinée dans la Foi et la Vérité ?
C’est un peu la raison qui est derrière la publication de cet article. Nous semons, de manière à faire germer certaines choses et que les lecteurs se disent eux-mêmes : « et si… »
Et si vous vous posez très justement cette question, nous espérons vivement que ce sera aussi le cas de nombre de nos lecteurs.