Cet article vous est proposé avec l’aimable autorisation de son auteur Bernez Rouz, Président de l’association Arkae d’Ergué-Gabéric.
C’est à Antoine Favé, vicaire d’Ergué-Gabéric que nous devons de connaître l’ancien cantique de Kerdévot. Il l’a publié en 1891 dans le bulletin de la société archéologique du Finistère sans malheureusement nous indiquer ses sources et nous n’avons pas trouvé l’original, ni les additions du 18e siècle qu’il signale. Antoine Favé n’a publié qu’une version en langue bretonne et seuls quelques versets ont été traduits dans le texte qui précède le cantique. Nous nous sommes donc attaché à rééditer dans son intégralité ce cantique de 1712 avec sa traduction.
1- Histoire et étude du cantique
L’ancien cantique de Kerdévot est exceptionnellement long. 56 couplets de quatre vers de 12 à 14 syllabes. Sans prétendre avoir lu tous les cantiques bretons, c’est le plus long qu’il m’ait été donné de voir. Par la même, il s’apparente plus à une complainte, à une « Gwerz » dont il possède la plupart des caractéristiques. Il est vrai que la frontière entre Gwerz et Cantique n’a jamais été clairement marquée : le Père Maunoir du 17e siècle pour mieux faire passer le message de l’église en langue bretonne a souvent utilisé des chansons profanes sur lesquelles il a composé des paroles édifiantes. C’est d’ailleurs dans la tradition directe du Père Maunoir que se situe le « Cantique spirituel à la gloire de Dieu et de Madame Marie de Kerdévot … ».
Le plus ancien recueil de cantiques bretons ne date seulement que de 1642. Il s’intitule « Cantiquou spirituel da beza canet et catechismou ha lechiou all gant an Christenien composet bet a nevez gant un tat eux à compagnunez lesvs ». Selon Gwennolé Le Menn (BSAF 1984 p. 281), cet ouvrage en moyen breton aurait été écrit par un jésuite contemporain du Père Maunoir. La langue est riche avec des rimes externes et internes dans la tradition des pièces religieuses de la période du moyen breton (1350-1658).
Le cantique de Kerdévot ne se rattache pas à cette tradition, la langue est sans recherche, l’orthographe a changé et la rime externe seule employée est pauvre dans l’ensemble. Le cantique de Kerdévot se rattache par contre à l’école du Père Maunoir. Celui-ci fit éditer ses « Cantiquou spirituel » en 1658, 1662, 1667, 1678, 1680, 1713, etc … Ces cantiques lui servent dans ses missions en Basse-Bretagne et la formule marche tellement bien qu’elles est reprises par de nombreux ecclésiastiques : Charles Le Bris en 1698 signe ses « Cantiquoù spirituel Var an oll exerciçoù … ». En 1710, dans le Vannetais Pierre Barisy, écrit ses « Cantiqueu Spirituel ar deverieu ar christen ».
Le cantique de Kerdévot se situe donc dans une lignée fortement établie à la charnière du 17e et du 18e siècle, dans une période de rechristianisation impulsée par les jésuites.
Contrairement à la tradition savante du moyen breton, au 18e siècle les ecclésiastiques cherchent avant tout à être efficaces et à faire passer leur message parmi le peuple. « Peut-on parler de littérature devant la production de ces clercs qui cherchaient avant tout la plus grande gloire de Dieu et qui, si on les en croit, n’écrivaient en breton que parce qu’il n’était pas possible d’éviter l’emploi de cette langue ? » s’interroge Fanch Roudaut dans l’histoire culturelle de la Bretagne. Le cantique de Kerdévot n’échappe pas à la règle : longueurs, répétitions, breton décadent, écrit Antoine Favé qui relève cependant parfois un souffle poétique et le qualifie d’intéressant.
Il n’est pas inutile cependant de relever un certain nombre de détails sur la forme. Le barde de Kerdévot a composé 56 couplets très réguliers, chaque strophe de 4 vers comprend deux rimes aa, bb, … Des rimes souvent convenables qui concernent la syllabe finale :
Strophe 41 : Chandelour / Tour
- Vein / Guein
Par contre à la strophe 33, seule la voyelle rime :
Ped / Briec
Castellin / Veusi
Mamm Jesus a lavaras d’ur munuzer yaouank Ober dezhañ ul labour hag a vije aet d’e vamm A vo deus ar c’haerañ a ouie da ober Hag a vije paeet mat gant Jesus he mab kaer. Benn voe echuet gantan he lakeas en ur vag Na dosteas da nikun ken ne oa war an aod A comparer avec les strophes 11, 12 et 13 du cantique originel. |
On retrouve ce manque de rigueur dans la métrique des vers : 13 ou 14 pieds avec des césures approximatives. En général cependant vers le vers de 13 pieds qui domine avec une cèsure 7/6 : c’est le cas de la première strophe. Celle-ci donne dans ses deux derniers vers l’exemple de breton décadent que signalait il y a un siècle Antoine Favé.
« Da dirigea va memor ha ma ententamant
Ma composin eur c’hantic dar Verc’hes puissant. »
C’est le type même du « Brezhoneg Beleg », le breton des prêtres du 18e siècle, truffé de mots français. Certaines strophes par contre sont de très bonne tenue :
Strophe 17 :
« Ker stank e varvent bemdeiz ken na vanke loened
Ha kirri d’o c’has d’ar vorc’h d’an douar biniget ».
Nous avons eu la chance de pouvoir enregistrer un fragment du cantique par une chanteuse traditionnelle d’Ergué-Gabéric. La version remaniée marque le souci d’une certaine pureté de la langue qu’on trouve en général chez les bretonnants nés avant la guerre 14-18. Les 10 vers chantés par Marjan Mao correspondent aux strophes 11,12 et 13. Il est significatif que le passage retenu soit celui du miracle du Retable, celui même qui faisait dire au Major Faty il y a un siècle, « Sa vue provoque toujours une telle admiration chez les paysans des environs de Quimper qu’ils lui attribuent une origine surnaturelle ».
1-5 | Considérations sur les malheurs du temps. |
6-9 | Eloge de Kerdévot. |
10-15 | Légende du retable Flamand. |
16-20 | Evocation de la peste d’Elliant. |
21-29 | Bienfaits de Notre-Dame de Kerdévot. |
30-32 | Le pélerinage des marins de Duguay-Trouin. |
33-50 | Miracles à Kerdévot. |
51-56 | Les grandes heures de Kerdévot. |
Le principal intérêt du cantique réside dans ses évocations historiques : Retable flamand, Peste d’Elliant, chute du clocher, pèlerinage des marins de Duguay-Trouin.
Dès l’introduction le barde de Kerdévot ne manque pas de saluer le roi Louis XIV afin que Dieu et sa mère intercède pour lui, pour le faire retrouver le chemin de la victoire. En 1712, nous sommes en pleine guerre de succession d’Espagne, une guerre interminable qui se conclut par les traités d’Utrech (1713) et de Rastatt (1714). Le cantique traite les ennemis du roi, d’adversaires de Jésus, allusion probable aux protestants que combattait Louis XIV, principalement Anglais et Hollandais.
Après l’évocation de la guerre, la disette s’impose, toujours présente dans les campagnes mêmes si les grandes famines du Moyen-Age sont révolues. Une disette accentuée en Bretagne par le blocus maritime des états ligués contre Louis XIV et qui a ruiné l’économie bretonne.
La peste, troisième compagnon d’infortune reste dans les mémoires, mais ne frappe plus. Il semble en effet que la dernière peste de Basse-Bretagne soit celle de St-Pol de Léon en 1658. Dans la région Quimpéroise la dernière peste connue date de 1640.
Le souvenir des trois fléaux (guerre, famine, peste) évoqué dans le cantique est encore présent dans la mémoire collective. Jules Gros dans son trésor du Breton parlé cite cette phrase : « An Teir gwalenn a gastiz : ar brezel, ar gernez hag ar vosenn » (les trois fléaux de punition : la guerre, la famine et la peste).
L’évocation des fléaux universels a pour but d’inciter le peuple à chercher le réconfort dans la religion, mais le chrétien est invité à s’adresser à la Mère de Dieu. Dieu est trop puissant, trop lointain, trop inaccessible, ce n’est pas le cas pour la Vierge. C’est pour cela que 92% des testaments étudiés par Alain Croix dans sa thèse monumentale sur le 16 et 17e siècle, invoquent l’intercession divine par l’intermédiaire de la Vierge Marie.
Notre Dame de Kerdévot possède en Ergué-Gabéric non pas une simple chapelle, mais une église (Iliz), un temple béni. Kerdévot est le principal monument, le plus dévot, le plus ancien, le plus beau qui soit dédié à la Vierge. Pour nuancer ce jugement dithyrambique le compositeur indique prudemment qu’il ne veut choquer personne (hep choki iliz santel ebet).
La présence du retable est d’emblée mis en évidence. Ce trésor inestimable venu à Kerdévot par on ne sait quel moyen, ni par l’intermédiaire de qui, excite la curiosité des passants. Le barde nous donne ici une des légendes du retable. C’est la Vierge qui l’a commandé à un jeune menuisier. Il a été transporté par mer jusqu’en Bretagne. Miraculeusement le bateau ne s’approcha du rivage qu’à la vue du recteur d’Ergué et du fabrique de Kerdévot.
Une version plus tardive de Jean-Marie Déguignet précise que le bateau s’était échoué dans la baie de Kerogan ou de Ledanou près de l’actuel port du Corniguel à Quimper. Déguignet rapporte en plus le détail de la charrette à boeufs et de l’utilisation de ces boeufs après le transport à Kerdévot.
Ils disparurent à tout jamais. Ne restent en témoignage que les auges que se disputent deux lieux-dits : Kerdévot avec le pré Yun Maria, la prairie de Marie, où se trouvaient deux auges, et Kerdilez où existe une garenne, Goarem an eoriou, la garenne des auges. La légende du retable nous confirme au moins deux choses : il est venu par mer et il a été placé sur l’autel principal, tel qu’il était au début du 20e siècle, et tel qu’il est maintenant après restauration.
L’épisode de la Peste d’Elliant est particulièrement intéressant parce qu’on touche là aux origines même de la chapelle. Le barde s’appuie essentiellement sur la tradition populaire véhiculée par les Gwerzioù. Les différentes versions qu’on en possède rapportent toutes effectivement qu’on manquait de charrettes et d’animaux pour transporter les morts au bourg. Le barde ne s’appesantit pas sur les situations cruelles, mais fait une large place à la procession des gens d’Elliant vers Kerdévot et au rôle de la Vierge pour arrêter la peste. La permanence de la présence elliantaise à Kerdévot se vérifie encore de nos jours.
Il n’en venait pas seulement d’Elliant, mais aussi de Quimper, de St-Evarzec, d’Ergué-Armel, de Briec, de Kerfeunteun, de Cuzon, nous dit plus loin le cantique, ce qui confirme la renommée de Kerdévot, pèlerinage anti-pesteux.
Antoine Favé : L’ancien cantique de Kerdévot (B.S.A.F. 1891)
Antoine Favé : Monographies paroissiales – Ergué-Gabéric 1678-1716 (B.S.A.F. tome XVIII, 1892) Gwénolé Le Menn : Le Père Julien Maunoir (1606-1683) et la langue bretonne (B.S.A.F. 1984) Fransez Kervella : An den etre an anken hag an ankou etre an neñv hag an ifern (Hor Yezh, N° 139-140-141, 1981) Philippe Henwood : Duguay-Trouin, l’homme de Rio (Armées d’aujourd’hui, septembre 1986) Bernez Rouz : Ar Vosenn e Breizh Izel (Hor Yezh) |
Mais en 1712 la peste n’est déjà qu’un souvenir ; le cantique nous donne la liste exhaustive des bienfaits de Notre-Dame de Kerdévot :
- Ressucite les noyés, les morts à la guerre (strophe 20).
- Guérit les aveugles (21, 40).
- Rend la raison aux fous (22, 45, 46, 47, 48).
- Retrouve les objets volés (22).
- Soigne les grabataires (23).
- Protège du feu (24).
- Guérit de la mélancolie (25).
- Aide aux accouchements (27, 49).
- Aide les mères en difficultés (30, 31, 32).
- Donne du lait (50).
- Empêche les noyades (33, 34, 35).
- Guérit les pleurésies, les dartes, les pustules, etc … (37, 50).
- Redonne la parole aux muets (39).
- Donne une aide juridique (44).
Voilà une panoplie impressionnante qui n’étonne pas, même après le passage du Père Maunoir. La religion populaire est une des caractéristiques de cette époque et nourrit bien le clergé. Pas étonnant que la fabrique de Kerdévot soit si riche, en 1830 elle pesait 1200 livres sur un budget de paroisse de 1800 livres.
Parmi ces miracles, deux évènements ont le mérite d’être vérifiables par l’histoire : le pèlerinage à Kerdévot des marins de Duguay-Trouin et la chute du clocher de la chapelle de Kerdévot en 1701.
René Duguay-Trouin. Obra de Chasselai. MuseumHistórico Nacional / Rio
D’abord aux strophes 30, 31 et 32, c’est la venue d’un soldat de Duguay-Trouin, Deschamp au Carême de 1712. Cet épisode évoque le périple de Duguay-Trouin qui quitta La Rochelle le 9 juin 1711 avec sept vaisseaux, quatre frégates, six petits bâtiments et six mille hommes de troupe. Le 12 septembre, il force l’entrée de la Baie de Rio de Janeiro. Le 21 septembre, il prend la ville qui appartenait aux espagnols et se fait remettre une rançon de 600 000 cruzeros. Le 13 novembre il quitte Rio, mais n’arrive que le 6 février 1712 à Brest, chargé d’or.
Le Quimpérois Deschamp et ses camarades sont donc venus en pèlerinage à Kerdévot immédiatement après, puisque si on en croit le cantique ils étaient à Kerdévot pour le Carême de 1712, soit le 10 février. A noter que l’escadre de Duguay-Trouin a mis trois mois et trois jours de La Rochelle à Rio, et moins de trois mois pour faire Rio-Brest. On comprend que les soldats qui n’étaient pas des marins souffrent de ces longues navigations. Quant à être en perdition comme l’indique le cantique, il est évident qu’en hiver ces marins durent essuyer les terribles tempêtes atlantiques.
Le second évènement, aux strophes 41, 42 et 43, est la chute du clocher en 1701 et nous permet de dater le cantique avec précision. Quoique moins précis que la relation du recteur Jean Baudour, ce témoignage permet d’attester la parfaite connaissance qu’a l’auteur des faits conservés par la mémoire populaire. Il ne cite pas de nom, mais la date précise de l’accident à la Chandeleur il y a onze ans.
Le tonnerre et le vent fou sont également inscrits dans le témoignage de Jean Baudour, cela nous laisse à penser que l’auteur a eu connaissance des registres paroissiaux ; il est fort à parier qu’il s’agisse d’un curé. Rien ne permet d’affirmer qu’il s’agisse de Jean Baudour, mort en 1716 à l’âge d’environ 80 ans.
Les dernières strophes nous apportent deux précisions sur le mobilier de la chapelle, la Vierge de Kerdévot est semble-t-il en place, présentant son fils au monde si on en croit le couplet 64 : « Quand vous arriverez dans sa maison son fils Jésus est dans ses bras … »
Deuxième précision importante au dernier couplet « Ograou ar werc’hez », les orgues de la Vierge. On sait qu’il y avait des orgues à Kerdévot pendant la Révolution, il semble donc qu’elles existaient déjà en 1712. Il est probable qu’elles ont été construites après la reconstruction du clocher et de la tour en 1704. La paroisse possédait déjà un orgue dans l’église du bourg : de 1680 à 1702, Maître Pierre Guyomarc’h tenait les orgues. A sa mort son fils Charles prit la succession.
L’ancien cantique de Kerdévot apparaît comme une pièce essentielle pour la connaissance de la chapelle. Par les évènements historiques qu’il relate, par la tradition populaire qu’on y trouve, et cela dépasse largement le strict intérêt qu’on peut porter aux textes de dévotion. Composé probablement par un ecclésiastique, encore vivant dans les mémoires en 1980, ce cantique n’est plus chanté. Il a été remplacé vers la fin du 19e siècle par un cantique plus à la mode, mais infiniment moins riche.
2- Texte et traduction du cantique
E gloar DOUE hac an ITRON VARIA KERDEVOT, pehini en deus ur chapel caër e parres Ergue-Vras, e quichen Quimper-Caurintin, e pehini e ra bemdez miraclou braz. | À la gloire de Dieu et de Notre-Dame de Kerdévot, qui possède une belle chapelle dans la paroisse du Grand-Ergué, près de Quimper-Corentin, et qui y fait de grands miracles tous les jours. |
|
|
|
|
1 Tad, Map ha Spered Santel, tri Ferson en un Doue M’ho suppli, a vir galon hag a greis va ene Da dirigea va memor ha ma ententamant Ma composin eur c’hantic dar Verc’hes puissant. |
1 Père, Fils et Esprit Saint, trois personnes en un Dieu Je vous supplie du fond du coeur et du fond de l’âme De diriger ma mémoire et mon entendement Afin que je compose un cantique à la Vierge puissante. |
2 Biscoas, Christenien, sioas ! n’hor boa brassoc’h ezom Da supplia Hor Salvez hac ar Verc’hes he vam, Da rei ar c’hraç d’hon Roue da veza victorus Var he oll ennemiet, adversourien Jesus. |
2 Jamais, Chrétiens, hélas ! nous n’avons eu plus grand besoin De supplier notre Seigneur et la Vierge sa mère, De donner la grâce à notre Roi pour être victorieux De tous ses ennemis, les adversaires de Jésus. |
3 Tristidiguez a velan, allas ! pell so er bed, Quernez hon eus bet ivez commançet da velet. Assista a reomp bemdes en enterramanchou Demeus a dud hor c’hanton, hag en ho servichou. |
3 Je ne vois que tristesse depuis longtemps, dans le monde, La disette, nous avons commencé aussi à la voir. Nous assistons chaque jour à des enterrements De gens de notre quartier, ainsi qu’à leurs « services et messes ». |
4 N’en deus nemed ar vocen n’hon eus quet c’hoas guelet En hon touez er vro-mâ, Doue ra vezo meulet : Pedomp an Dreinded Santel hag ar Verc’hes Vari Ma vezimp guitibunan preservet diouti. |
4 Il n’y a que la Peste que nous n’ayons pas encore vue Au milieu de nous : que Dieu en soit loué. Prions la Sainte Trinité et la Sainte Marie Que nous soyons tous préservés d’elle. |
5 Ar voyen d’en em assuri eus ar guir joausdet Ha da bossedi da jamaes eur peoc’h hir ha perfect Eo supplia ar Verc’hes da bidi evidomp. Pa na veritomp, siouas ! a selle Doue ouzomp. |
5 Le moyen de s’assurer une joie véritable Et de posséder à jamais une paix longue et parfaite Est de supplier la Vierge de prier pour nous Quand nous ne méritons pas, hélas, que Dieu nous regarde. |
6 Meur a blaç santel dezi er bed a so savet Eleac’h ma zeo enoret, caret hac invoquet Eleac’h ma accord Doue, dre e intercession Graçou bras d’ar bec’herien p’e fedont a galon. |
6 Beaucoup de lieux saints lui sont consacrés dans le monde Où elle est honorée, aimée et invoquée Où Dieu accorde par son intercession Des grâces importantes aux pêcheurs qui la prie de fond du coeur. |
7 Hep choqui e nep faeçon Ilis santel ebet Me souten, goude cals a dud gant lealdet, Emedi en hor c’hanton an Ilis devota E deus ar Verc’hes Vari hac ar principala. |
7 Sans choquer aucunement les autres églises saintes Je soutiens comme beaucoup de gens et avec loyauté Qu’elle est dans notre canton l’église la plus dévote Que possède la Vierge Marie et la plus importante. |
8 Coms a ran deoc’h, Christenien, eus an Templ biniguet Tost da Guemper-Caurintin, Kerdevot, guir hanvet, So batisset d’ar Verc’hes dre vir devotion, An Ilis ancienna e deveus er c’hanton. |
8 Je vous parle, Chrétiens, d’un temple bénit Près de Quimper-Corentin, Kerdévot la bien nommée Qui est bâtie pour la Vierge par pure dévotion, L’église la plus ancienne qu’elle a dans le canton. |
9 C’hui Ergueiz-Gaberic, a bossed ar c’haera Demeus an oll tensoriou a so var ar bed-mâ, Ar sourcen eus ar c’hraçou an Drindet adorabl, Elec’h ma arru bemde Miraclou surprenabl. |
9 Vous, habitants d’Ergué-Gabéric, possédez le plus beau De tous les trésors de ce monde La source des grâces de la Trinité qu’on adore, Où se passent chaque jour des miracles surprenants. |
10 Un histor a rapporter dign da veza discleriet Penaus ar Verc’hes Vari, evit ma vise goueet Er c’hantoniou divar dro, Santela plaç e voa Elec’h ma cleo ar pec’hour gant carantes ha joa. |
10 On raconte une histoire digne d’être racontée : Comment la Vierge Marie, pour que soit connue Dans la contrée avoisinante, la plus sainte des places Où le pêcheur peut l’entendre avec joie et amour. |
11 A lavaras expressamant d’ur munuser yaouanc Ober dezi un ouvraich a vise excellant, Un ouvraich ar perfeta e ouisie da ober, Hac e vise paet en Eon gant Jesus e Mab-Quer. |
11 Dit expressément à un jeune menuisier De lui façonner un ouvrage qui soit excellent Le plus parfait qu’il sache faire Et qu’il serait payé au ciel par Jésus, son fils bienaimé. |
12 Pa vise achu gantan, e ambarcse timat En ur chaloup var ar mor : chelaouet ar Miracl Ha Doue er c’honduje dan devota Ilis A oa dar Verc’hes Vari batisset e Breiz. |
12 Quand il serait terminer, s’embarquer aussitôt Dans une chaloupe en mer : écoutez le miracle Et Dieu le conduisit à l’église la plus dévote Qui était dédiées à la Vierge en Bretagne. |
13 Pa voa voar ar mor ha guelet gant an dut, Et teue ar Veleyen, Fabrijen a bartout, Maes ne dostaas ous nicun quen na voa arruet Person an Erge-Vras ha Fabric Kerdevot. |
13 Quand elle était en mer au vu des gens Des prêtres et des fabriciens accururent de partout, Mais elle ne s’approcha de personne tans que ne fut pas arrivé Le recteur du Grand-Ergué et le fabrique de Kerdévot. |
14 An ouvraich santel neuse dan douar a abordas, Ar Fabric a Kerdevot hep dale e c’hemeras, E Kerdevot e voa rentet gant ur pomp magnific Laqueet eo eoc’h an Auter da velet dar public. |
14 Le saint ouvrage alors aborda à terre, Le fabrique de Kerdévot s’en empara sans tarder, A Kerdévot on l’emmena en grande pompe. On le mit sur l’auteul en vue du public. |
15 Eürus bras a cavan, habitantet Ergue, Da veza, dre preferanç dan oll dud ar c’hontre, Enoret demeus un Ilis quer caër ha quer santel, Mammen an oll miraclou ha graçou eternel. |
15 Je vous trouve bien chanceux, habitants d’Ergué, D’être, plus que tous les gens de la contrée, Honorés d’une église si belle et si sainte, La source de tous les miracles et des grâces éternelles. |
16 Paressionis Elliant a ouffe lavaret Peger santel ar plaç-man dar Verc’hez binniguet : Na dleont quet ancouât ar rest eus ho buhe An obligation o deus da Vari, Mam Doue. |
16 Les paroissiens d’Elliant sauraient dire Combien ce lieu bénit à la Vierge est saint Ils ne doivent pas oublier le reste de leur vie L’obligation qu’ils ont envers Marie, la mère de Dieu. |
17 Attaquet oant gueichal gant eur c’hlenvet cruel, Ur pestilanç dangerus, commanç a reent vervel ; Ker stanc e varvent bemde quen na vanque loënet Ha quiri d’ho c’hass dar vorc’h dan douar binniguet. |
17 Ils furent attaqués autrefois par une maladie cruelle, Une pestilence dangereuse, ils commençèrent à mourir ; Ils moururent si nombreux qu’on manquait d’animaux Et de charrettes pour les transporter au bourg en terre bénite. |
18 Pa velzont an danger bras e oant oll da vervel, O devoue recours ouzoc’h, Guerc’hes Sacr ha Santel, En em voestla a resont gant cals devotion Da Kerdevot dar pardon gant ho Frocession. |
18 Quand ils virent qu’il étaient tous en danger de mort Ils eurent recours à vous Vierge sainte et sacrée, Ils firent le voeu d’aller avec beaucoup de dévotion Au pardon de Kerdévot avec leur procession. |
19 Er moment ma partijont eus parres Elliant Da vonet da Kerdevot, o doa soulageament, Rentet parz ha dispos, ha yac’h eus ho c’hlenvet, Guerc’hes Glorius Vari, ra viot binniguet. |
19 |
20 Ober a resont neuse eur voeu perpetuel Ma teusient ur veich pep bloas da Ergue, d’ho chapel D’ho trugarecât, Guerc’hes, demeus ho tonaeson Nobl ha partabl, Beleyen gant ho Frocession. |
20 Ils firent alors le voeur perpétuel De venir une fois l’an à Ergué en votre chapelle Pour votre remercier, Vierge, de votre don Nobles, roturiers et prêtres avec leur procession. |
21 Meur a den bet massacret, ha voar ar mor beuset, Dre ho calloud, ô Guerc’hes ! so bet ressucitet ; Cals a dud, dre accidant privet eus ar guelet, O deveus e Kerdevot ar sclerijen cavet. |
21 Beaucoup de personnes massacrées ou qui ont péri en mer Par votre pouvoir, o Vierge ! ont été ressuscitées ; Beaucoup de gens, privés par accident de la vue, Ont retrouvé la lumière à Kerdévot. |
22 Dan dud troublet a squiant, ha memes foll rentet, Kerdevot zo ordinal ur remed assuret, Hag an traou e ve laëret, pa vent gouestlet dezi, Na ell quet e nep faeçon all laër o dransporti. |
22 Pour les gens dérangés d’esprit et même rendus fous, Kerdévot est d’ordinaire un remède assuré, Et les choses volées, quand elles lui ont été dédiées, On ne peut en aucune façon les transporter. |
. . . | . . . |
55 D’ar yaou hanvet gouel Doue, entented Bretonnet. E casser ar Sacramant da Kerdevot benniguet. Bet an amzer a garo, e zer accustunet Da gaç he Mabic Jesus d’ar Verchez binniguet. |
55 Le jeudi appelé Fête-Dieu, comprenez Bretons On amène le sacrement à Kerdévot la bénie De tout temps, on a eu l’habitude D’amener l’enfant Jésus à la Vierge Bénie. |
56 Oferen-bret ha gousperou a ve ebars an de-ze, Benediction Doue pehini a ve goude. Orgraou a Verc’hez a son epad an oll amzer Da enori ha Mab JESUS a so var an Auter. |
56 Grand-messe et Vêpres il y a ce jour-là, La bénédiction de Dieu après. Les orgues de la Vierge jouent tout le temps Pour honorer son fils Jésus sur l’autel. |
Document ancien portant sur le passé d’Ergué-Gabéric (29). cet article est tiré de l’ouvrage collectif « Kerdevot, livre d’or du cinquième centenaire », Ergué-Gabéric, 1989. www.arkae.org