La crise liturgique a essentiellement deux origines étroitement liées entre elles : un affaiblissement de la foi et une perte de la notion de rite, tout spécialement en Occident, dans les pays développés. Le site Proliturgia avait publié un billet que nous reprenons ici, car il soulève une question essentielle :
« Tout porte à croire que nous n’avancerons pas d’un pas et nous ne ferons aucun progrès tant que nos diocèses ne seront pas dirigés par des pasteurs qui auront compris et qui enseigneront par leurs comportements qu’en liturgie, le rite, tel qu’il est reçu de l’Eglise, constitue un important pivot autour duquel peut s’articuler la vie de foi. “La foi s’exprime dans le rite et le rite renforce et fortifie la foi”, nous rappelle l’Exhortation “Sacramentum Caritatis” de Benoît XVI.
Comment comprendre cette importance du rite ?
Disons que sans le rite liturgique ou, mieux, sans liturgie clairement ritualisée, le croyant finit par se transformer en intellectuel qui ne sait plus qu’emmagasiner des richesses qui deviennent inutiles pour une réelle une vie de foi ; sans les rites sacrés constitutifs de la liturgie (gestes, vêtements, chants sacrés, attitudes, encens, lumières… etc.) correctement accomplis, l’Occidental qui baigne dans un contexte de matérialisme, d’individualisme et d’égoïsme ne fait que s’agiter dans ses propres œuvres, dans ses propres paroles, dans ses propres mélodies… pour produire des cérémonies pseudo-liturgiques qui ne seront ni efficaces sur le plan spirituel, ni durable – et donc toujours à réinventer -.
Un jour, un moine hindou qui avait fait une conférence devant des gens très intéressés et attentifs avait avoué à un évêque venu l’écouter : “Ma mission est ratée en Occident. Ils m’écoutent, mais ils ne comprennent pas.”
Pourquoi les Occidentaux sont-ils incapables de comprendre un moine oriental ? Parce qu’ayant perdu la connaissance des rites liturgiques qui structurent l’expression de leur propre religion chrétienne, les Occidentaux ont perdu le sens inné du rite comme élément spirituel. Donc, venus écouter un moine hindou, ils ne savent plus que prendre un peu de ci, un peu de ça… pour faire un “cocktail spirituel” leur permettant de vivre leur foi dans une sorte de satisfaction sentimentale et intellectuelle collant à l’idée qu’ils se font de leur religion.
Comment cela peut-il se faire ? Simplement parce les gens qui écoutent le moine sont devenus non seulement “très” intelligents… mais surtout “monstrueusement” intelligents : ils ne perçoivent le rite liturgique que de façon “intellectualiste” mais pas d’une manière qui leur permettrait de le vivre “de l’intérieur”, pour ce qu’il est. Bien des fidèles pratiquants de nos paroisses ne savent regarder la liturgie qu’en raisonnant, mais n’ont plus cette capacité de saisir en profondeur le sens “violent” du rite. Ainsi, ceux qui étaient venus écouter le moine hindou comprenaient-ils ce qu’il disait, mais n’étaient plus capable de transposer son enseignement pour le vivre dans les rites liturgiques de leur propre religion chrétienne.
Sans rites et sans rythmes, le croyant d’Occident n’a plus de colonne vertébrale : il est devenu un invertébré, une sorte d’avachi spirituel. «
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Publié sur Ar Gedour avec l’aimable autorisation de ProLiturgia.