« L’Eglise est visible pour les hommes par beaucoup de biais, dans la Caritas, dans les projets de mission ; mais le lieu où l’éprouve le plus souvent comme une Eglise est la liturgie. Et c’est bien comme ça. Après tout, le sens de l’Eglise, c’est de nous tourner vers Dieu et de laisser Dieu entrer dans le monde. La liturgie est l’acte dans lequel nous croyons qu’Il entre et que nous Le touchons. Elle est l’acte dans lequel se produit le singulier : nous entrons en contact avec Lui et nous sommes éclairés par Lui. (…) Ce qui compte vraiment, c’est que la Parole et la réalité du sacrement soient vraiment au centre [de la liturgie] ; que Dieu ne se résume pas à des paroles ressassées et que la liturgie ne devienne pas une simple représentation d’elle-même.
Ce n’est pas nous qui faisons quelque chose ; ce n’est pas nous qui montrons notre créativité, c’est-à-dire ce que nous pouvons faire [dans et avec la liturgie]. La liturgie n’est justement pas un show, un spectacle : c’est l’Autre qui lui donne vie. Il faut que ce soit clair. C’est la raison pour laquelle le caractère donné de la forme religieuse est tellement important. Cette forme (…) ne peut pas être produite à chaque fois par la communauté. Comme je l’ai dit, il ne s’agit pas de se produire soi-même. Il s’agit de sortir de soi et d’aller au-delà de soi-même, de se donner à Lui et de se laisser toucher par Lui. Dans ce sens, ce n’est pas seulement l’expression, mais aussi le caractère communautaire de cette forme qui est important. Elle peut être différente selon les rites, mais elle doit toujours avoir ce qui nous précède depuis la totalité de la foi de l’Eglise, la totalité de la tradition, la totalité de sa vie, et pas seulement ce qui vient de la mode du moment.
Cette approche est pour nous une provocation à nous laisser arracher à nous-mêmes, à la pure situation de l’instant ; à nous adonner à la totalité de la foi, à la comprendre, à y prendre part et à donner à la messe une forme digne d’elle, celle qui la rendra belle et en fera une joie. [Mais toujours] au service de ce qui nous précède, et non comme quelque chose que nous aurions à inventer. »
Benoît XVI, Lumière du monde, éd. Bayard