«Dessiner la Bretagne avec leurs pieds»… Les pèlerins du Tro Breiz, longue marche sur les traces des saints fondateurs de la région, passeront désormais par Rennes et Nantes, dans une Bretagne qu’ils veulent à cinq départements.
Relancé en 1994 par un noyau de passionnés quelque peu visionnaires et… missionnaires, le Tro Breiz, grand pèlerinage historique breton, comportait jusqu’à présent sept étapes. À raison d’une semaine de marche par an, les participants reliaient en sept ans les sept évêchés d’avant la Révolution. Ils rendaient successivement hommage, dans les cathédrales, aux saints fondateurs de la Bretagne : Corentin à Quimper, Pol Aurélien à Saint-Pol-de-Léon, Tugdual à Tréguier, Brieuc et Malo dans les villes qui portent leurs noms, Samson à Dol et Patern à Vannes. L’itinéraire était calqué sur celui qu’empruntèrent de nombreux Bretons, du Xe au XVe siècle, dans un grand élan de dévotion populaire (durant l’année 1374, selon une étude, de 30.000 à 35.000 pèlerins auraient déposé des offrandes en l’église Saint-Patern, à Vannes).
« Le Tro Breiz de l’unité »
Mais après trois boucles complètes effectuées sur ce principe, les organisateurs du Tro Breiz décident d’épouser les contours de la Bretagne historique. Rennes et Nantes, bien que les saints qui y officièrent, Melaine et Clair, ne soient pas d’origine bretonne, seront désormais inclus dans le parcours, qui s’accomplira en huit ou neuf ans, cela reste à décider. « C’est le Tro Breiz de l’unité ! » annonce Philippe Abjean, le refondateur du pèlerinage. L’association qu’il préside, les Chemins du Tro Breiz, s’est rapprochée de Breizh 5/5, qui milite pour une Bretagne à cinq départements, et sera présente tout au long de la manifestation.
Dimension spirituelle
S’il se réjouit du caractère militant ajouté au pèlerinage, Philippe Abjean n’oublie pas d’en souligner la dimension historique, patrimoniale, humaine et spirituelle. « On peut venir simplement pour randonner mais la plupart des marcheurs, qu’ils le reconnaissent ou non, sont en quête de quelque chose », estime-t-il. Réfléchir sur soi-même, sur le sens de la vie ou s’accorder simplement un bon break, chacun fait comme il veut. Mais le brassage, le dialogue, les petites souffrances et les bons moments partagés retiennent sur les chemins même ceux qui, par principe, se refusent à entrer dans un lieu de culte. Marie-Josèphe Vallier, bras droit du président, s’émerveille des liens, souvent durables, qui se sont noués entre des participants qui, dans la vie de tous les jours, ne se seraient pas rencontrés.
Rendez-vous le 30 juillet
La première étape du « Tro Breiz des neuf cathédrales » se déroulera du 30 juillet au 4 août prochains, de Tréguier à Saint-Brieuc. Le transport des bagages, la restauration et un hébergement sous tentes ou dans des gymnases sont proposés aux pèlerins. Ces derniers sont libres de prendre leurs propres dispositions, et d’assister ou non aux offices, à la veillée spirituelle et à la fête bretonne qui marquent chaque étape. Une soixantaine de bénévoles préparent, encadrent et accompagnent le périple. Un balisage fixe, d’abord sur le tronçon Saint-Pol-de-Léon – Tréguier, et l’ouverture d’abris du pèlerin devraient permettre prochainement un accès individuel permanent au Tro Breiz.
Renseignements et inscriptions, dans la limite de 1.500 participants : www.trobreiz.com
Si l’intention d’un Tro Breizh est très compréhensible et louable sur le plan du symbole politique, il est dommage et discutable de diluer le vénérable pèlerinage des sept saints de Bretagne en y incluant Rennes et Nantes qui sont des pièces rapportées quelque peu artificiellement. La réunification administrative de la Bretagne ne doit pas se faire aux dépens de nos traditions. Effectivement sur le plan historique et spirituel, Saint Clair et saint Melaine font un peu parachutés (même s’il est vrai que saint Patern était aussi un armoricain gallo-romain.) Devra-t-on réécrire le cantique des sept saint : « Breizhiz, rentamp enour d’an nav eskob santel » en lieu et place « d’ar seizh eskob santel » ?
En effet, remanier les traditions pour coller à l’esprit du temps relève de quelque chose de malsain, voire diabolique. Si nos anciens faisaient le tour des sept saints, ça n’était pas pour rien, ça avait un sens, c’était conforme à un plan de Dieu : sans quoi, ça ne serait jamais devenu un pèlerinage !
Non seulement, ça impliquait la conscience d’une origine commune avec nos cousins d’outre-manche et la prise en compte de fruits spirituels spécifiques liés à la bretonnité, à la langue bretonne. Dans l’esprit des anciens Bretons, Breizh-Izel ne s’opposait pas à Breizh-Uhel mais à Breizh-Veur, tout en acceptant une origine commune induite par le terme commun de « Breizh », dont les deux parties étaient reliées par la « Mor Breizh ». Au delà, c’était « Bro-C’hall » (dont le terme « gallo » n’est qu’un dérivé), le pays des étrangers, là où on parlait « galleg » (dont le terme « gallaoueg » n’est qu’un dérivé).
Les limites de Breizh-Izel ont évolué avec une extension maximale jusqu’à Dol et à la porte de Nantes et de Rennes mais sans jamais que ces villes en fassent partie.
En incorporant Rennes et Nantes, l’association Tro Breiz tombe dans le relativisme et le grand carnaval travestissant en niant l’importance de se cantonner aux septs saints fondateurs. Les francs-maçons ne s’y prendraient pas autrement. […]