Vous saviez, vous, que Saint Gilles était né à Athènes, en Grèce, au VIII° siècle dans une riche famille de patriciens ?
Moi, non !
Ce sont les 250 enfants de l’école bilingue de Saint Gilles d’Hennebont qui me l’ont appris !
Avec l’aide de leur enseignantes, directrice en tête, ils ont monté un excellent spectacle son et lumières qui a été donné le vendredi 16 juin 2017 à la petite nuit – bien tardive en pareille époque – à proximité de leur école dans le quartier d’Hennebont qui porte le nom du saint ermite athénien.
Il y avait du monde, tant sur scène, avec les petits, depuis la maternelle jusqu’au grands de CM 2, que parmi les spectateurs. Pensez donc, avec papa et maman, les papys et les mamies, sans compter quelques tontons et tatas auxquels s’ajoutaient les voisins et amateurs, ça faisait du monde ! Le parking a été vite plein comme les bancs proposés aux spectateurs… Mais avait été tendu, tout devant, sur le sol, une bâche en plastique noire sur laquelle petits et grands sont venus s’asseoir sans craindre le microcosme du peuple de l’herbe.
Les rédactrices du scénario ont, avec bonheur mêlés l’évocation de la grande guerre de 14 – 18 dans une famille locale avec la vie du grand saint dont le quartier porte le nom.
La déclaration de guerre et l’ordre de mobilisation en pleine moisson, le départ du fils que sa mère recommande à Saint Gilles.
Les enfants ont illustré la vie du saint racontée dans le livre que lit le grand père : La jeunesse d’Aegidios, riche et oisive dans l’Athènes du VIII° siècle, sa rencontre avec un infirme qui l’incite à quitter, sous leur moqueries, ses camarades de fête pour braver l’inconnu et partir à l’aventure, au-delà des mers, répondant ainsi courageusement à sa vocation.
Pendant ce temps, la vie continue au village vidé de ses hommes ; les femmes les ont remplacés tant aux champs qu’aux forges, tout près, où le façonnage des obus a remplacé le fer blanc des boites de conserve.
Les scènes de la vie quotidienne sont ponctuées d’expressions bretonnes populaires exprimant les injures, jurons et autres quolibets pour le plus grand bonheur des spectatrices âgées retrouvant ainsi des mots qu’elles n’avaient pas entendu depuis bien des lustres et les éclats de rire qui vont avec, comme une évocation de leur enfance lointaine, maintenant disparue.
Les pérégrinations de saint Gilles le conduiront jusqu’aux côtes de Provence où il s’établit sur les bords du Gard au nord de la Camargue. C’est alors que le roi et l’évêque, à cheval, oui, sur de vrais chevaux, à la tête d’une meute de chasseurs et de chiens, au son des aboiements et du cor de chasse, s’en prennent à la biche apprivoisée du Saint. Mais c’est lui qui reçoit la flèche destinée à l’animal. Si, si ! Si vous ne me croyez pas, allez vérifier sur le vitrail de Max Ingrand (1908-1969) dans la basilique Notre dame de Paradis à Hennebont, sur le bas-côté encore ouvert à la circulation publique :
Alors pour se faire pardonner le roi donnera à Saint Gilles un large territoire où il bâtira une abbaye, laquelle accueillera bientôt une communauté monastique florissante.
Bon, mais que vient faire Saint Gilles, un très grand saint, certes, mais totalement étranger à la Bretagne – il n’est pas statufié dans la Vallée des Saints et ne figure pas dans le « livre des saints bretons » de Bernard Rio (éditions Ouest-France, Rennes 2016, 427 pages, 32 €) ?
Il y est pourtant largement honoré : en Ille et Vilaine, dans la périphérie de Rennes et surtout, dans les Côtes d’Armor : à St Gilles du Mené près de Loudéac, St Gilles les Bois sur la rive droite du Trieux, St Gilles Pligeaux au sud de Guingamp et St Gilles Vieux Marché au nord du lac de Guerlédan… Et il existe aussi une école Sant Gili, plus près de chez nous, à Meriadec en Morbihan…
Les enfants nous l’ont expliqué : peu de temps avant sa mort, Saint Gilles a incité ses moines à partir porter l’évangile – la bonne nouvelle – jusqu’au plus lointaines contrées et c’est ainsi qu’un moine de l’abbaye de Saint Gilles, voire plusieurs, quittant les rives du Gard, sont venus jusqu’en Bretagne s’établir sur les bords du Blavet dans un ermitage que les voisins ont pris l’habitude de désigner sous le nom du Père abbé, honorant ainsi, par son vocable, sa mémoire. Ils ont dû passer par Pluneret et continuer ensuite sur Rennes et se disperser en centre Bretagne…
Et pendant ce temps-là, les cloches sont venues sonner, enfin, la fin de la guerre, le retour des hommes et de la joie de vivre : tout finit par des rires d’enfants et des danses comme on sait si bien le faire chez nous !
Savez-vous, les enfants, qu’à Rome, on vénère Saint Gilles sous le nom de Sant ’Egidio et qu’une église lui est consacrée rive droite du Tibre, dans le quartier du Transtevere.
C’est là qu’Andrea Ricardi, né en 1950, a fondé, en 1968, la communauté du même nom, initialement vouée au service des pauvres du quartier, et qui a, depuis, initié bon nombre de pourparlers en vue de la paix (Liban, Albanie, Mozambique, Algérie, Serbie, Guatemala, Burundi… etc) et obtenu ainsi la cessation des hostilités.
La communauté Sant ‘Egidio est à l’origine, depuis 1986, des rencontres inter-religieuses initiées à Assise en 1986 par le Saint Pape Jean-Paul II.
La communauté éducative de Saint Gilles à Hennebont ressort de l’enseignement catholique et scolarise environ 250 élèves en maternelle et primaire dans une ambiance Montessori pour l’apprentissage du français, du breton et de l’anglais.
Du bon travail et si les enfants m’ont appris sur Saint Gilles, ils ne sont pas prêts, pour ce qui les concerne, d’oublier, ni le saint patron de leur quartier ni la « Grande Guerre » qui ne sera pas, malheureusement, la « der des der »…
Le Père Fagot a raison encore une fois : c’est ainsi qu’on enseigne l’histoire et qu’on parvient à la faire sienne.
Bravo et merci !