Le Tro Breiz 2019 s’est élancé en direction de Dol-de-Bretagne [MàJ du 17/08/2019]

Amzer-lenn / Temps de lecture : 14 min

Cet article sera mis à jour régulièrement durant le Tro Breiz et après. Un reportage signé Eflamm Caouissin & Yves Daniel.

Le Tro Breiz est parti depuis lundi, pour une étape ralliant Saint-Brieuc à Dol-de Bretagne en passant par Saint Malo.

La messe de départ de cette édition 2019 avait lieu à l’église Saint-Michel qui fait office de cathédrale de Saint-Brieuc le temps des travaux de la vraie cathédrale. L’édifice est sobre mais beau, et assez grand pour contenir les très nombreux pèlerins venus participer à la messe de 8h célébrée par Mgr Moutel, évêque du Diocèse de Saint-Brieuc & Tréguier, messe que vous pouvez retrouver ci-dessous grâce au Facebook Live effectué par Ar Gedour. Cet office était mémoire de St Guillaume Pinchon, co-patron du diocèse, comme un clin d’oeil à ce départ de St Brieuc.

Tandis que résonne le Da feiz hon tadoù kozh, les pèlerins se mettent en place sur le parvis. Les cloches sonnent à pleine volée. La marche débute au son des pas de 1600 trobreiziens (comme on les appelle). On entend une bombarde et une cornemuse… on y est et ça se passe sous un beau soleil (pour l’instant mais ça ne durera pas). Chacun retrouve des amis, ceux qu’on n’a pas vu depuis un an et qu’il nous tardait d’embrasser pour revivre encore ce que chaque année voit, sur les chemins parfois ardus de Bretagne. Yves Daniel est là, mais cette fois, le viator s’est métamorphosé en piou-piou, ces créatures jaunes qui attendent à chaque carrefour pour que les pèlerins traversent en toute sécurité. Il a déjà contribué à réaliser le livret spi du Tro Breiz, un parcours en compagnie de St Vincent Ferrier, de Pierre-Yves Le Priol et de Mgr Centène. Il y a même un jeu permettant au lecteur d’aller chercher une traduction d’une phrase en breton auprès des marcheurs brittophones. On croise l’abbé Julien Naturel et l’abbé Louis de Bronac, les aumôniers du Tro Breiz, ainsi que l’incontournable Père Dominique de Lafforest.

Le midi, pour la pause déjeuner à Hillion, je croise Pierre-Yves Le Priol et sa famille. On parle Foi de nos pères pendant que les autres digèrent, prient, causent ou dorment. Je laisse mon fils à son parrain et j’en profite pour faire des photos.  Les autres marchent, et se retrouvent dans un vent sacré suivi d’une drache à vous tremper jusqu’aux orteils. Mais c’était momentané, et les kilomètres se consomment jusqu’à Lamballe. Là, dans cette ville étape, nous attends le Saint Sacrement en l’église St Jean. Las, dans cette ville étape, alors qu’un millier de marcheurs débarquent, les cloches envolées nous appellent mais pas un accueil de la municipalité, pas un verre de l’amitié. Les bars et restos sont pour beaucoup fermés. C’est lundi et on ne va quand même pas déroger à la règle. Quand je pense que dans les petites bourgades, le passage du Tro Breiz est jour de fête. Je me rappelle les huîtres tièdes au barbecue, les galettes-saucisses ou encore ce resto qui, alors que la fermeture annuelle battait son plein, avait ouvert ses portes à tous les pèlerins.

Mais Lamballe, comme bien d’autres « grandes villes », n’a sans doute pas besoin de ces marcheurs qui tracent leur chemin à la suite des saints fondateurs. Ce n’est pas grave ! A Pluduno ce sera plus sympa demain !

En attendant, c’est veillée au stade de foot, là où toutes les tentes sont plantées et les tables installées pour le banquet. Le vent souffle fort, quelques gouttes se font sentir…

Nous nous retrouvons avec Julien et Karine, deux des amis membres de l’équipe des chevaliers du Picon Bière, notre fidèle bande du Tro Breiz et le Père Christophe. La confrérie n’est pas au complet car le manger est loin. Et il manque quand même sur le Tro Breiz Robert et Fred, mais on pense bien à eux… Et eux sans doute aussi !!!

Mardi 30 juillet : Lamballe – Pluduno

Aujourd’hui, 28 bornes à parcourir. Après une nuit de vent et de pluie…

La messe a lieu non pas à l’église St Jean qui nous a accueilli la veille, mais à la collégiale Notre-Dame de Grande Puissance, monument riche d’histoire et cher au coeur des lamballais. Pensez donc : ce haut-lieu a vu les fiançailles d’Henri de Penthièvre avec la duchesse Alix de Bretagne. Le duc Jean V en a fait une collégiale ducale… et j’en passe ! Mais je pense à Joël, le sacristain du Tro Breiz qui doit tout déménager de St Jean à la collégiale !

La messe est animée par la chorale paroissiale de Lamballe qui a souhaité soutenir cette cérémonie. Qu’ils en soient ici remerciés ! Et la fin de l’office a été traditionnellement ponctué par le Da feiz hon tadoù kozh, avant de tracer à 1800 (!) en direction de Pluduno. Ce bourg faisait partie de l’évêché de Saint-Brieuc et s’est construit sur la voie gauloise de Corseul à Carhaix. Il tirerait son nom d’un des missionnaires venus en Armorique dans la suite de Samson et ses amis : Tudno aurait rassemblé autour de lui ce qui deviendrait la peule de Tudno (Ploebs Tudno = Pluduno). En 1163, une petite église sert aux habitants et elle dépend des moines bénédictins de Saint-Jacut. Autant vous dire que ce bourg a dans son âme l’histoire de nos vieux pères.

La pause du midi se passe à l’étang de la Movinais. La pause passe, on redémarre et on chante. On entend les jeunes qui chantent des chants de l’Emmanuel. On arrive sur Pluduno où l’équipe municipale nous a préparé un pot d’accueil. « Ca fait du bien de se sentir reçus ! » nous dit Dédé

Le soir, c’est Monseigneur Centène qui interviendra, nous faisant un résumé de sa lettre pastorale sur Saint Vincent Ferrier, n’hésitant pas à faire des rapprochements avec l’actualité. Pendant ce temps, fest-noz avec J3M à la salle omnisport.

 

Mercredi 31 juillet : Pluduno- Ploubalay

Le Tro Breiz offre la joie des rencontres et des haltes spirituelles. Les averses de pluies ne nous ont pour le moment pas trop gênées tant il y a des pluies de grâce encore plus abondantes. Elles nous font d’ailleurs oublier les ampoules qui commencent à éclore et les échauffements des mollets qui se font sentir… On a quand même 10 kilomètres de moins qu’hier à assurer, mais ça tire un peu pour certains.

On longe le Guesbriand en direction de Ploubalay. A midi, on déjeune Gilles de Bretagne, frère du duc François 1er, au tragique destin… ca se passe au vieux château du Guildo. C’est magique !  Le spot est quand même bien choisi ! L’équipe du Tro Breiz sait nous faire découvrir des lieux d’exception. D’ailleurs, en passant par Trégon, on découvre saint Petrock. Gageons que vous n’avez jamais entendu parler de lui… Petrock serait un gallois, mort en Cornouaille et dont le corps aurait été transporté en 1177 dans l’abbaye de Saint-Méen, le disciple de saint Samson. Le Père Dominique conte tout cela avec passion. On en apprend des choses, au Tro Breiz !

Arrivée comme d’habitude vers 17h. Tandis que Jésus Eucharistie est exposé dans l’église paroissiale pour recevoir les pèlerins, la municipalité a bien préparé les choses, et on se sent accueillis, là encore. Fest-noz avec Kazdal pour les uns (il me semble qu’on les avait déjà eu sur une étape l’an passé… ), dodo pour les autres, … et veillée à l’église evel just !

Comme le confie Marie-Céline, « la journée fut très joyeuse, beaucoup de chants… puis la pluie s’invita au camp! »

Jeudi 1er août : Ploubalay – La Richardais

Aujourd’hui, 26 kilomètres vers La Richardais. Le  1er Août fut institué comme jour de fête nationale par le 1er Duc de Bretagne, fils du dernier Roi de Bretagne, Alain Barbetorte (surnommé Alan al Louarn), suite à l’éviction des hordes normandes hors de Bretagne depuis la bataille de Treant-Felger en 939. Bien des marcheurs ne le savent pas.

En attendant, c’est le démontage de tente, la messe (toujours aussi bien animée par une équipe dynamique) puis le départ. On passe par Tréméreuc et son église du XIIème siècle. Elle est dédiée à Saint Mérec. Le livret du pèlerin précise que c’est un missionnaire de l’époque de Jacut. Le rédacteur n’a sans doute pas lu Ar Gedour : il aurait appris que l’on ne sait pas grand chose de Saint Mérec, mais que la linguistique peut venir au secours de l’hagiographie. Le nom Mérec/Méreuc remonte, disions-nous dans notre article,  au vieux-breton *Meroc /Meiroc, qui lui-même suppose un latin Mariâcum < Maria-âcum. Il s’agit donc d’ une dédication à la Vierge Marie, équivalant au Llanfair du Pays de Galles. Lorsque l’appellation Intron-Varia / Nostre-Dame se fut imposée, Meroc cessa d’ être compris.

Un petit passage par la chapelle Saint-Buc, sauvée par Breiz Santel, et ce soir, c’est Veillée de Miséricorde en l’église Saint-Clément. Auparavant, le Père Dominique de Lafforest présente le Tro Breiz. Il évoquera sans doute Les chapelles chantantes, Ar Gedour… tout ce qu’il faut pour qu’un pèlerin du Tro Breiz continue son pèlerinage tout au long de l’année et participe à la sauvegarde de son âme comme à celle de notre magnifique patrimoine breton.

Vendredi 2 août : de La Richardais à Saint-Jouan-des-Guerets

… En passant par Saint Malo.

Le vent a fini de chasser les nuages et la journée s’annonce sous un beau soleil ; le temps est encore frais lorsque le flot des pèlerins, derrière les ouvreurs, s’annonce route de Dinard. Nous sommes déjà sur zone pour préciser l’entrée de la sente (du breton « hent » la route) qui, de la dangereuse grand’route, descend sur la rive gauche de la Rance.

Nous n’aurons pas le loisir d’admirer la théorie multicolore des trobreiziens piquetée des pavillons aux couleurs de la Bretagne et de ses pays : l’équipe sécurité N° 3 à laquelle j’appartiens doit aller sécuriser le square Commandant Menguy où passeront les pèlerins en route vers la cathédrale Saint Vincent de Saint Malo. L’endroit se situe à Saint Servan, entre la tour Solidor et la plage des Grands Sablons. Une fois le lieu bien identifié et vérifié par le panneautage « trobreiz » et l’enrubannage posé par le pré-ouvreur accompagné de son épouse, l’attente commence. La mer est haute et transparente, le soleil brille, la lumière matutinale enlumine les fleurs que les ouvriers municipaux arrosent consciencieusement.

Mgr Centène (Photo CB/ Ar Gedour – DR)

Et hop ! En moins d’une heure, tout le monde est passé, restent, avant les serre-files, quelques retardataires qu’il convient de remettre dans le droit chemin. Pour nous, en route vers notre prochain poste : au pied de la statue de l’amiral Bertrand-François Mahé, comte de la Bourdonnais (1699-1753), gouverneur des Mascareignes, qui orne, à l’orée des remparts de la cité venant de la gare maritime, le rond-point que doivent emprunter les pèlerins de retour vers Saint Servan où aura lieu la pose-déjeuner après la grand-messe dans la cathédrale Saint Vincent à laquelle nous ne pourrons malheureusement pas assister. Heureusement, d’autres y sont comme le rédac’chef ou d’autres collaborateurs d’Ar Gedour. L’équipe liturgique a choisi un chant d’entrée en breton, français, gallo et un clin d’oeil espagnol à l’équipe de missionnaires du Diocèse de Vannes. La messe en diffusée en direct sur Facebook grâce à Ar Gedour.

C’est tout en haut de la vieille cité d’Aleth où se situent les ruines de la cathédrale du saint fondateur Maclaw, entre l’estuaire de la Rance et la cité corsaire que le déjeuner a lieu, Outre la vue magnifique d’un côté comme de l’autre l’endroit est particulièrement émouvant : un mémorial rappelle la rude bataille qui s’y est déroulée en aout 1944 pour la libération de la ville.

L’après-midi, la route mène les trobreiziens rive droite de la Rance qu’ils remontent jusqu’à l’étape de Saint Jouan des Guerets, troublé par l’intervention des pompiers sur un incendie rendant impraticable à toute circulation la rue menant à l’église saint Jean Baptiste.

 

Samedi 3 août : de Saint-Jouan-des-Guérets à Dol

… Terme de notre périple annuel, déjà !

Excellente nuit à la belle étoile, la seconde depuis Saint Brieuc, le temps maussade et venteux des nuits précédentes m’ayant privé de ce plaisir. La journée s’annonce propice à la marche : les trobreiziens n’auront ni trop chaud ni trop froid et resteront au sec, ce qui ne manque pas d’influer sur leur moral auquel nous sommes particulièrement attentifs.

Après Saint Jouan, voici Saint Père, puis Saint Guinoux. Quelques carrefours à sécuriser, priez pour nous ! Tout s’est bien passé : nous déjeunons aux pieds du vieux colombier, le long du cimetière de Lillemer, autrefois « l’Isle Mer », mamelon au milieu des marais formé par le raz de marée de 709 qui submergea la forêt de Scissy.

Tandis que les pèlerins s’acheminent péniblement sous un ciel lourd et orageux le long des marais, vers Dol, nous y sommes déjà, savourant avec délices une bière bien fraiche à la terrasse du café de la place Châteaubriand, face aux halles où la procession tarde à se mettre en branle.

Souvent frustrante, la tâche des « chiens jaunes » – sans qui, comme chacun sait, l’aviation embarquée resterait clouée au sol – présente certains avantages…

Comme à la cathédrale Saint Vincent de Saint Malo, c’est le malouin Mgr Alexandre Joly, jeune évêque auxiliaire de Rennes, qui présidera la messe de clôture dans la belle cathédrale Saint Samson de Dol. Pour l’occasion, il arbore la croix pectorale de son prédécesseur, Mgr Urbain-René de Hercé (1726-1795) que lui a confié son dépositaire, l’évêque de Vannes.

Là encore, la messe est diffusée en direct via Ar Gedour. Malheureusement, un souci technique coupera la retransmission à la moitié de l’office. Un Da feiz hon tadoù koz solennel ponctue ce Tro Breiz, au son de l’orgue, de la bombarde et de la polyphonie de l’équipe Liturgie, après un mot de Philippe Abjean qui en aura interpellé plus d’un, appelés à la mission, comme nous le confieront quelques pèlerins après la messe.

L’orage a attendu la sortie des pèlerins pour éclater et répandre sur eux ses bienfaits.

Il n’y avait même pas de Picon au bistrot d’adieu, place de la Trésorerie ! Les chevaliers du Picon-Bière, l’amicale équipe qui aime à se retrouver chaque année autour du breuvage désaltérant après une marche harassante, seront contraints de se revoir l’an prochain.

Enfin, dernière mission avant de remballer : trouver le lieu d’hébergement pour restituer le matériel confié, pancartes, cônes et fanions ; une fois trouvé le lieu, savoir où le déposer ; vue la camionnette de Juliette, mais pas de Juliette… Qu’à cela ne tienne : dam’, j’ai déposé le tout par terre, à l’arrière du véhicule : il me reste encore plus de deux heures de route avant de retrouver mon lit !

L’année prochaine, en route pour Rennes…

A suivre…

Photos Eflamm Caouissin, Marie-Céline de la Peschardière, Julien & Karine Moisan, Yves Daniel, P. Christophe Boudereaux, P. Christian Le Meur  / Ar Gedour – DR

L’album photo de Jean-François Kermen (DR)

 

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