Pour sa 5ème édition, le pèlerinage Feiz e Breizh continue sa maturation et sa croissance. Cette année, nous étions presque 500 pèlerins à marcher vers sainte Anne (480 pèlerins inscrits).
Les pèlerins sont partis comme de coutume de cette chère église de Guénin où la messe de départ a été célébrée par l’abbé d’Anselme, recteur de Saint-Patern de Vannes, aumônier du pèlerinage y célèbre la messe de la Vierge avec les oraisons de la messe du pèlerins en nous exhortant à toujours suivre la voie de nos vieux pères en matière d’apostolat.
Cette église de Guénin nous exhorte à apporter la parole du Christ : le thème de cette année est : Bretagne, terre de mission, nous serons sous le patronage bienveillant de saint Louis-Marie Grignon de Montfort et du Bienheureux Julien Maunoir !
Cette église est dédiée au saint patron éponyme de la paroisse : saint Guénin -sant Gwennin en breton-10ème évêque de Vannes au VIIème siècle. Un saint évêque qui n’est donc pas de la première génération des saints fondateurs des Vème et VIème siècles, mais un continuateur de leur oeuvre évangélisatrice. On sait peu de choses de lui, sinon qu’il n’est pas né Outre-Manche, mais à Malestroit. Il fait donc partie des descendants des Bretons d’Outre-Manche qui ont fait souche en Bretagne continentale. Il est aussi honoré à Locquénin (commune de Plouhinec, Morbihan, qui possède deux paroisses) où il est titulaire de l’église ainsi qu’à la chapelle saint Guénin de Plouray (diocèse de Vannes)
La gracieuse petite église de Guénin, bâtie dans l’harmonieux style classique des XVIIème-XVIIIème siècle propre à de nombreuses églises et chapelles du centre du vannetais, fut bâtie en une seule année, prouesse technique à l’image de la foi ardente des paroissiens de l’époque et qui faisait leur fierté. Sur le mur sud, près du portail, on peut lire inscrit dans la pierre :
« 1773, CETTE EGLISE A ETE BATIE DU TEMPS DE M JEAN GUYOMARD TRESORIER. LA PREMIERE PIERRE FUT POSSEE LE 13 AVRIL ET ELLE FUT BATIE EN UN AN. PRIEZ DIEU POUR VOS PERES ».
Elle a été bénie le 13 mars 1774, soit un mois avant la date anniversaire du début des travaux !
Le bourg de Guénin se situe au pied de la colline sacrée du Mané Gwenn (Montagne Blanche en breton) qui culmine à 155 m d’altitude. Elle est ainsi nommée car en 1300, elle fut éclairée pendant plusieurs jours par une aurore boréale.
Cette colline, à l’instar d’autres collines sacrées en Bretagne était déjà un lieu de culte bien avant la christianisation de la Bretagne, quand saint Michel a remplacé le dieu Bélénos en des lieux où la terre se rapproche du ciel. On peut aussi citer le Menez Hom, le Mont saint Michel de Brasparts, le Menez Bre, le Mont Dol, le Mont Belair ou le Mont saint Michel. Au sommet du Mané Gwenn, on trouve d’ailleurs un rocher creusé, supposé autel de sacrifices païens…
Le Mané Gwenn a donc été dédié à saint Michel ainsi qu’à la Vierge Marie depuis fort longtemps, c’est pourquoi on y trouve deux chapelles : une dédiée à la Vierge (N.D du Mané Gwenn) au pied de la colline et une dédiée à saint Michel au sommet.
On trouvait jadis dans la chapelle Saint Michel comme dans la sacristie de l’église saint Guénin un mell benniget. L’utilisation de cette pierre ronde que l’on retrouve dans de nombreux lieux de Bretagne, mais aussi dans les Îles britanniques est sujette à controverse. En effet, mell benniget peut se traduire soit par « maillet béni » soit par « boule bénie » selon que le mot mell soit au masculin ou au féminin. Certains folkloristes en mal de sensationnel ont interprété l’usage du mell benniget comme un instrument barbare d’euthanasie pour fracasser les crânes des vieillards vivants trop longtemps. Cette interprétation est il est vrai due aux plaisanteries –certes de mauvais goût- que les Bretons eux-mêmes proféraient sur le fait de fracasser les crânes des agonisants à coups de mell benniget et que les proto-ethnologues du XIXème siècle prenaient pour argent comptant . De nos jours, on entend encore bien des contre-vérités à ce sujet.
En réalité, il s’agit d’un geste très ancien antérieur au christianisme qui visait à accompagner l’âme du mourant dans l’au-delà en lui imposant un objet sur le front, soit ce boulet de pierre, soit un maillet en bois, soit une quenouille, soit une hache préhistorique en pierre polie dont on trouvait beaucoup d’exemplaires en Bretagne.
Ce rite « de la bonne mort » n’était donc pas une euthanasie sauvage mais une préfiguration de l’extrême-onction qui est restée bien vivante en certains lieux jusqu’au début du XXème siècle avec la bienveillante complicité du clergé paroissial. Toutefois, la plupart des melleù benniget disparurent peu-à- peu par crainte de superstitions malsaines. Il ne reste de nos jours que celui de Locmeltro (cf ci-contre).
Les pèlerins se mettent en route vers sainte Anne.
En ce matin du 17 septembre, c’est sous la triple protection de saint Guénin, de saint Michel Archange , et de tous les saints bretons que les pèlerins reçoivent la bénédiction de Dieu en même temps que leurs bannières avant de se mettre en route vers sainte Anne, le grand sanctuaire de leur bonne patronne. Les pèlerins marchent en chapitre, à l’exemple du pèlerinage de Pentecôte de Paris-Chartres.
Le chapitre est un groupe de pèlerins, venus d’un même lieu ou d’un lieu plus lointain et placé sous le patronage d’un saint, qui a son autonomie propre. Pendant la marche, la méditation du Rosaire alterne avec des temps d’enseignements sur la foi en général ou sur la foi telle qu’elle est vécue en Bretagne, ainsi qu’avec des temps de discussions fraternelles, des cantiques et des chants profanes en français ou en breton. Cette année, le nombre de chapitres a augmenté : en plus des chapitres habituels :
Santig du pour Quimper, sainte Azenor pour Brest, Saint Louis-Marie Grignon de Montfort pour Rennes, N.D de l’espérance pour Saint Brieuc, saint Gunthiern pour Lorient, Nantes… nous avons aussi de nouveaux chapitres Saint Goustan, saint Bieuzy (chapitre SOS calvaires qui portera une croix monumentale en bois tout au long du pèlerinage, un chapitre pour les Bretons de la diaspora, un chapitre Chrétiens d’Orient…
Le nombre de pèlerins est en augmentation : les chapitres s’étoffent, de nouveaux chapitres se créent…
Une belle communauté se créé dans les chapitres par la récitation du Rosaire, les intercessions, les temps de pause, de dialogue fraternel, des amitiés se nouent, le tout ponctué par des chants en breton ou en français : Da feiz hon tadoù kozh, Bro gozh ma zadoù ; les lansquenets, Dans les prisons de Nantes… Des chants en breton ou en français selon l’humeur et la compétence de chacun. Ceux qui portent binioù et bombardes les font régulièrement sonner. Chanter en breton pose de moins en moins problème, même pour les néophytes du breton, cela se fait naturellement, en ayant un répertoire de chants en breton régulier qui porte chacun des pèlerins. Et les prières, les méditations se joignent aux intentions de chacun, et les pèlerins se soutiennent pendant la marche.
Beaucoup d’enfants y participent (moyenne d’âge 23 ans ! )
De nombreux prêtres accompagnent les pèlerins pour les confessions et l’accompagnement spirituel: prêtres du diocèse de Vannes, de la Fraternité saint Vincent Ferrier, de la Fraternité saint Pierre, de l’Institut du Christ-Roi souverain prêtre…
Vers l’heure de midi, arrêt à la Chapelle-Neuve pour le repas après l’Angelus latin-breton « Ni ho salud get karante ». Temps de partage entre pèlerins.
À la reprise de la marche, les montées se font plus raides, car on entre dans les Landes de Lanvaux, crête schisteuse et granitique s’étendant d’ouest en est sur 70 km, de la forêt de Camors au pays de Redon et culminant à 175 m de hauteur, pour une moyenne de 4 km de largeur. Ces Landes n’en portent plus maintenant que le nom, car elles ont été massivement plantées d’arbres – principalement des conifères – à partir du XIXème siècle, ce qui a fortement changé leur aspect. Ce massif forme la limite naturelle entre le littoral (l’Arvor en breton) et l’intérieur (l’Argoed) de toute la partie est du Morbihan. Ces landes furent pendant la Révolution un repaire et un bastion de la Chouannerie.
Après une pause à la chapelle de Locmaria (Chapelle-Neuve) c’est à l’extrémité ouest de ces Landes de Lanvaux que les pèlerins feront halte, à la maison N.D de Fatima tenues par les soeurs Coopératrices du Christ Roi.
L’arrivée pour le bivouac du soir à la maison N.D de Fatima
En fin d’après-midi, après être passés devant la chapelle saint Mériadec, autre évêque de Vannes ayant vécu au VIIème siècle (14ème évêque) les chapitres parviennent enfin après 26 km de marche à Bieuzy-Lanvaux, du nom de saint Bieuzy (Bihui en breton) disciple de saint Gildas de Rhuys. Il eut le crâne fendu d’un coup d’épée par un seigneur irascible qui refusait d’attendre la fin de sa messe dans son ermitage de Bieuzy-les-eaux pour que le saint guérisse ses chiens atteints de la rage. Celui-ci se mit alors en chemin, l’épée toujours plantée dans son crâne et fit halte à l’endroit qui porte aujourd’hui son nom à Lanvaux avant de mourir à l’abbaye de Rhuys dans les bras de son maître saint Gildas.
Non loin, se dressent quelques ruines de l’ancienne abbaye cistercienne de Lanvaux, fondée en 1138 conjointement par les moines de l’abbaye de Bégard (dans le Trégor) et le baron Alain de Lanvaux. Le premier abbé en fut Rouaud, qui sera élu cinq ans plus tard 42ème évêque de Vannes en 1143. Il resta malgré cela abbé de son monastère tout en étant évêque à la manière des saints fondateurs bretons. Il mourut à Vannes en 1177 en odeur de sainteté. Son titre de bienheureux est interne à l’ordre cistercien, car celui-ci était réticent quant aux canonisations de ses moines, même si après sa mort, il fut entouré d’une grande vénération populaire.
Les pèlerins arrivent donc à la maison N.D de Fatima pour installer le bivouac. Cette maison (anciennement N.D des Pins) était à l’origine un orphelinat fondé en 1885 par un banquier, M. Guilloteaux, pour les enfants des marins péris en mer. La chapelle, achevée en 1895, était primitivement dédiée à sainte Marcelle, du nom de la sainte patronne de sa fille, morte de chagrin après que son mari eût lui-même péri en mer. Cet orphelinat, qui a fonctionné jusqu’en 1957 a eu pendant plusieurs années comme aumônier l’abbé Pierre Le Goff, restaurateur du breton vannetais et co-auteur avec l’abbé Augustin Guillevic de la grammaire bretonne du vannetais qui a normalisé l’orthographe et la grammaire du dialecte.
En 1962, l’orphelinat désaffecté et toutes ses dépendances fut racheté par quelques pieux laïcs du pays et confié aux Coopérateurs Paroissiaux du Christ Roi, congrégation fondée en 1928 en Espagne par le P. Vallet afin des prêcher les exercices de saint Ignace. Il fut alors solennellement placé sous le patronage de N.D de Fatima.
Bénédiction du nouveau calvaire :
Cette année, nous avions une grâce particulière sur le bivouac : un calvaire tout neuf, sorti de l’atelier de S.O.S Calvaires était béni par Mgr Centène, évêque de Vannes, qui nous a rejoint pour l’occasion . Sur cette nouvelle croix était gravé : « Abba ; Père ». Comme la Mère supérieure nous l’a fait remarquer, cette croix est là pour soutenir tous les pères de famille qui viennent accomplir les exercices de saint Ignace.
Pendant la bénédiction de la croix, tout en chantant « D’ar groez santel Kristenion », les fidèles sont venus vénérer cette nouvelle croix.
La veillée
Puis résonne l’appel à la veillée : le vieux chant des bergers bretons qui se hélaient entre eux pour appeler leurs troupeaux : Ololê, eh oh !… Le nom de ce chant fut repris en 1940 par les frères Herri et Ronan Caouissin comme titre d’un journal illustré pour la jeunesse bretonne.
La veillée, avait comme thème : Salaün Ar Foll, le fou du bois, qui ne sut dire que deux mot dans sa vie d’ermite : Ave Maria !
De scènes humoristiques, en danses bretonnes accompagnées par le chant, les binioù et bombardes et les canons, nous avons rendu honneur à Salaün et la Vierge, tout en déployant la dramatique situation de la Bretagne lors de la guerre de Succession entre les partis de Blois et de Montfort avec comme point culminant, le combat des Trente remporté au tir à la corde par les chevaliers de Montfort, contrairement à l’histoire où se sont les partisans de Blois qui gagnèrent le tournoi, mais les Montfortistes qui gagnèrent la guerre. Le tout dans la plus grande tradition des veillées du scoutisme Bleimor, et des veillées bretonnes où l’on se plaisait à raconter la vie des saints entre deux galéjades.
Pour calmer les esprits, on chanta le Kousk, Breizh-izel, avant la prière finale dite par l’abbé d’Anselme, puis l’invitation aux jeunes de l’abbé Vannier à venir apprendre le breton lors de ses camps vélo Saint Corentin.
Après la veillée, fut un temps silencieux pour se rendre à la chapelle en procession aux flambeaux pour le salut du Saint Sacrement, avec encore nos plus beaux cantiques eucharistiques en breton : Adoramp holl, ni hos ador, hosti sakret, Kalon sakret Jézuz, mélamp holl, re vo mélet… puis l’adoration nocturne où les pèlerins se sont relayés jusqu’à l’aube, les autres pèlerins se couchant ou restant paisiblement à bavarder et chanter en douceur autour du feu de camp.
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Eil lodenn : A Vihui betak Keranna
Au dimanche matin, les pèlerins furent réveillés avec fracas pas la trompe de chasse à 6H30 pour être prêts à marcher pour 8 heures. La colonne des pèlerins s’élance joyeusement en égrenant les Pater et les Ave, tout comme les chants joyeux. C’est le moment de redescendre des landes de Lanvaux, de passer au bourg de Brandivy
Sant Dewi/ Dewi Sant
Brandivy, (en breton Berdewi, la colline de Dewi) ancienne trève (succursale) de la paroisse de Grandchamp (Gregam en breton) était primitivement sous le patronage de saint Dewi (forme britonnique de David) saint breton du VIème siècle honoré des deux côtés de la Manche ; c’est le patron du pays de Galles (Dewi sant en gallois) souvent représenté avec un poireau, car il incitait ses moines à cultiver la terre pour obtenir leur propre nourriture.
Né vers 500 et mort vers 589, moine et prédicateur en Bretagne insulaire et continentale, il fut évêque de Caerleon au pays de Galles, d’où il transféra le siège épiscopal à Mynyw (Ménévie en français) sur la pointe ouest du pays de Galles, lieu aujourd’hui appelé Tyddewi (la maison de Dewi), soit en breton Ti Dewi. En anglais, cette ville se nomme Saint David’s.
Saint Aubin, « nouveau » patron de Brandivy
Reconstruite à la fin du XIXème siècle, l’église de Brandivy, quoique sobre et coquette, ne brille pas par son caractère. À une date inconnue, le patronage de saint Aubin s’y est substitué à celui de saint Dewi.
Saint Aubin (Albin en breton) est né vers 470 à Languidic (Langedig en breton, diocèse de Vannes) de nobles parents bretons installés en Armorique. Il quitta la Bretagne et devint moine puis abbé de Nantilly près de Saumur et fut ensuite élu évêque d’Angers. Il était réputé pour son zèle apostolique intraitable qui dérangeait souvent les puissants. Si bien qu’au concile d’Orléans en 511, les autres évêques le considérèrent comme un peu trop sévère et pas assez arrangeant. Il fut ami et protecteur de saint Tudwal, son compatriote, premier évêque de Tréguier et lui servit d’interprète au concile d’Angers en 540. Saint Aubin mourut en 550 et son culte se répandit partout en France où de nombreuses églises lui sont dédiées.
Sur la route de Plumergat
Au sortir du bourg, on aperçoit en contrebas, sur les flancs escarpés de la vallée du Loch, une chapelle dédiée à N.D de Lourdes, avoisinant une reconstitution de la grotte, comme il y en a tant en Bretagne. On en compte plus d’une vingtaine rien que pour le diocèse de Vannes. La grotte et la chapelle furent bâties en 1910 à l’initiative de l’abbé Le Leuch, alors recteur de la paroisse sur un site ressemblant naturellement à la grotte de Massabielle. Les Bretons sont en effet aussi attirés par les dévotions plus lointaines en plus de celles de leurs saints du pays et les acclimatent très bien chez eux. À Lourdes même, il est impossible pour les pèlerins du monde entier de ne pas voir le monumental calvaire des Bretons offert par les 5 diocèses de Bretagne qui se dresse depuis 1900 à l’entrée du sanctuaire, oeuvre de l’atelier d’Yves Hernot, le sculpteur trégorois aux mille calvaires.
Plumergat (Pluergad en breton)
Les pèlerins y font une dernière halte avant le repas de midi à Gornevec. Les paroisses dont le nom commence par Plou, Plu, Pleu sont dites paroisses primitives ; ce sont les premières paroisses fondées par les saints fondateurs bretons aux Vème et VIème siècles. Elles étaient à l’origine de très grande taille et furent par la suite subdivisées au cours des siècles en de multiples nouvelles paroisses. À titre d’exemple, la paroisse primitive de Plumergat comprenait en plus de la paroisse actuelle, celles de Grandchamp, Locmaria-Grandchamp, Brandivy et Mériadec.
Le préfixe de Plou vient du latin plebs signifiant peuple, auquel est ajouté le nom du fondateur. En ce qui concerne Plumergat, celui-ci a été oublié. Certains croient y reconnaître saint Ergat, fondateur de Pouldergat, près de Douarnenez, ou bien un certain Maelcat (en vieux breton, prince du combat) ce qui paraît assez peu probable. Il faudrait plutôt chercher un fondateur s’appelant Morgat (du vieux breton mor : grand, et cat : le combat) car c’était un prénom encore attesté au XIème siècle et il existe d’ailleurs un lieu-dit Morgat dans la paroisse de Plumergat, similaire au toponyme de la paroisse de Morgat sur la presqu’île de Crozon.
À une date inconnue, l’église changea de titulaire comme à Brandivy. Ici, ce fut saint Thuriau qui devint de saint patron.
À noter que cette paroisse de Plumergat eut l’honneur d’accueillir en 1664 une mission prêchée par le Bx Julien Maunoir, apôtre de la seconde évangélisation de la Bretagne au XVIIème siècle, lui qui reçut de Dieu le don de la langue bretonne pour annoncer l’Evangile.
L’église et son patron saint Thuriau
L’église, probablement bâtie sur un ancien lieu de culte druidique, est remarquable tant par son ancienneté, son aspect que par le voisinage de deux chapelles, ce qui a fait surnommer Plumergat: « le bourg aux trois clochers » l’une des deux chapelles est dédiée à la sainte Trinité (XVème-XVIIème siècle) et l’autre à saint Servais, fut bâtie en 1610 par un riche paysan qui était allé en pèlerinage sur le tombeau du saint à Maastrich.
Les origines de l’église sont fort anciennes : la nef date des XI-XIIème siècles et possède de beaux chapiteaux romans. La tour fut bâtie au XIVème siècle et surmontée d’un clocher en charpente à bulbe aux XVIIème et XVIIIème siècles.
Saint Thuriau
(Turiaw en breton) vécut entre le VIIème et le VIIIème siècle. Jeune berger gardant les troupeaus de ses parents, il fut attiré par la vie monastique et entra au monastère épiscopal de Dol et fut préconisé par son vieil évêque-abbé Tiernmael (chef-prince en vieux-breton) pour lui succéder et devint un évêque de Dol très renommé pour sa piété et son sens de la justice, si bien qu’il est honoré dans de nombreuses églises et chapelles à travers toute la Bretagne sous divers noms : Thurial, Thurien, Urien, Tivisio. Il est aussi invoqué en-dehors de Bretagne, car en 878, les moines de Dol emportèrent son corps dans leur fuite devant les raids des Vikings, et ses reliques furent dispersées en plusieurs lieux : l’église abbatiale saint Germain des prés à Paris et la cathédrale de Chartres. Elles y seront détruites à la Révolution, si bien qu’il n’en reste presque plus rien. On retrouve aussi la trace de son culte en Normandie à Saint-Thurien, petit village de l’Eure où probablement une de ses reliques était arrivée.
C’est le cas pour un certain nombre de saint Bretons dont les reliques ont été emportées par les moines dans leur fuite lors des incursions normandes qui ont contribué à répandre leur renommée et leurs miracles bien au-delà des frontières de Bretagne.
L’arrivée à N.D de Gornevec
Quand les pèlerins voient enfin la tour de la basilique, ils mettent genou à terre en disant une prière à Sainte Anne : « Ô Mère de la Patrie, très puissante Anne, soyez le salut de vos Bretons, gardez-leur la foi, fortifiez leurs moeurs, donnez-leur la paix par votre sainte intercession. » O Mater patriae, antienne du Magnificat des secondes vêpres de sainte Anne, écrit par Dom Guéranger, premier abbé de Solesmes :
Bâtie aux XVème et XVIème siècle sur l’emplacement d’une chapelle plus ancienne, son pardon est célébré le dernier dimanche d’août. Il était jadis fréquenté par les nourrices qui venaient demander d’avoir un lait très abondant. On y amenait aussi les chevaux pour qu’ils soient bénis et protégés des maladies.
Cette chapelle a commencé à tomber en ruine en 1920, faute d’entretien et suite à l’effondrement du clocheton qui a entraîné peu à peu la chute de la charpente. À partir de la fin des années 80, les habitants du quartier se sont mobilisés avec l’aide de l’association Breiz Santel, spécialisée dans le sauvetage et la restauration des chapelles en péril. La charpente avec ses entraits ainsi que les sablières sculptées fut entièrement refaite à l’identique, de même que les vitraux. La façade ouest, construite sur des fondations insuffisantes, fut entièrement démontée et remontée pierre par pierre, les statues furent alors aussi refaites à l’identique, les originales étant conservées au sanctuaire de sainte Anne.
Cet exemple admirable de Gornevec parmi tant d’autres nous montre la fragilité de notre patrimoine : il suffit de peu de temps et de beaucoup de négligence pour que nos chapelles tombent en ruine et il faut beaucoup de temps et de moyens pour les relever.
Par bonheur, il existe dans toute la Bretagne des centaines de comités de chapelle vigilants et motivés qui se démènent pour leur entretien et leur restauration. Pour mémoire, il existe en Bretagne plusieurs milliers de chapelles.
à suivre….